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Marie-Antoinette de Thierry Malandain – Malandain Ballet Biarritz

Après Cendrillon et La Belle et la bête, Thierry Malandain a de nouveau été convié par Laurent Brunner, directeur de Château de Versailles Spectacles, à créer un ballet pour le magnifique Opéra Royal de Versailles. Cette fois-ci, le chorégraphe s’attaque à la figure de Marie-Antoinette, dernière Reine de France, qui a inspiré tant d’écrivain.e.s, d’historien.ne.s et de cinéastes. Dans un ballet narratif pour 22 danseurs et danseuses composé de quatorze tableaux, il choisit de situer son action dans les années versaillaises de la souveraine. Quatorze épisodes clés où la danse palpite tantôt joyeuse et légère, tantôt mélancolique et empreinte de gravité pour évoquer la trajectoire peu commune de cette personnalité qui ne cesse de fasciner.

Marie-Antoinette de Thierry Malandain – Malandain Ballet Biarritz

Pour montrer une Reine enfermée dans son palais, Thierry Malandain a choisi de mettre en mouvement ses interprètes dans un écrin fixe composé de boiseries, derrière lesquelles est tendu un cyclo aux divines teintes pastels très XVIIIe siècle. C’est élégant et sobre, laissant respirer une danse tout aussi raffinée. La trouvaille, au début du ballet, tient dans un immense cadre tenu par les danseurs et danseuses au milieu duquel se glisseront le Dauphin et la Dauphine. De membres du corps de Ballet (de la Cour), ils émergent comme le couple de souverains qui concentre toutes les attentions.

Comme toujours avec Thierry Malandain, la danse est belle avec des lignes pures, des envolées lyriques et des mouvements d’ensemble calibrés. Pour les scènes de bal,  le chorégraphe a puisé dans la gestuelle de la danse baroque dans la composition de certains tableaux. C’est intelligemment fait. On reconnait sa patte malgré les poignets cassés et les coudes pliés. Il y a de beaux moments chorégraphiques, notamment des duos intenses qu’il peaufine de ballet en ballet. Comme cette nuit de noces – dont il n’est un secret pour personne qu’elle ne fut pas une réussite – où devant nos yeux, deux enfants préfèrent renoncer aux histoires d’adultes. Ou encore le duo qui réunit Louis XV (Frederik Deberdt) et la Comtesse du Barry (Miyuki Kanei), sensuel et passionné, dont l‘écriture si délicate fait merveille pour dépeindre les sentiments amoureux.

Mais il manque parfois à ce Marie-Antoinette des surprises scénographiques auxquelles le chorégraphe nous a habitués dans des pièces précédentes. D’où l’impression fugace mais récurrente d’une répétition entre les tableaux. Sans doute tient-elle au choix de la musique. Judicieux en ce que les symphonies 6, 7 et 8 intitulées Matin, Midi et Soir constituent un cycle comme celui évoqué, de l’aube au crépuscule d’une Reine, elle manque, hélas, d’aspérité.

Marie-Antoinette de Thierry Malandain – Malandain Ballet Biarritz

En maîtresse de céans, Claire Lonchampt tire avec habilité son épingle du jeu en incarnant avec justesse et intensité les différentes expressions et états d’âme de Marie-Antoinette. Progressivement, elle réussit à faire émerger la personnalité de la Reine qui succède à la Dauphine. Comme toujours, elle affiche une technique sûre et de belle facture. Elle sait se montrer mutine et badine quand il le faut, comme dans ce tableau, clin d’œil délicieux au Truc en plumes de cette chère Zizi Jeanmaire, plus grave et solennelle dans d’autres. S’il n’y a pas d’interprètes à proprement parler solistes dans la compagnie, elle est celle qui s’imposait pour danser la Souveraine par ses lignes très travaillées. La qualité de ses mouvements de bras est comme toujours remarquable.

Dans un des tableaux intitulé Maternité, sur un court extrait emprunté au Orphée et Eurydice de Gluck, avec son partenaire Mickaël Conte, le duo offre une parenthèse fort émouvante où le roi et la reine se découvrent dans leur rôle de parent en compagnie de la première de leurs quatre enfants. Cette présence qui prend vie à travers un pantin évoque bien plus qu’un moment de béatitude parentale.

Un conseil enfin, si les détails de la vie de Marie-Antoinette ne vous sont pas familiers, parcourez attentivement la feuille de salle distribuée avant le spectacle. Cette démarche préliminaire vous permettra de vous concentrer sur la danse plutôt que de chercher à comprendre quels sont les personnages ou la situation évoqués au fil des quatorze tableaux. On peut bien sûr aborder l’œuvre avec sa propre connaissance du sujet, mais ce serait passer à côté de détails que Thierry Malandain se plaît à semer tout au long de son ballet.

Marie-Antoinette de Thierry Malandain – Malandain Ballet Biarritz

 

Marie-Antoinette  de Thierry Malandain par le Malandain Ballet Biarritz au théâtre Kursaal à San Sebastián (Espagne). Avec Ione Miren Aguirre, Raphaël Canet, Clémence Chevillotte, Mickaël Conte, Frederik Deberdt, Romain Di Fazio, Baptiste Fisson, Clara Forgues, Loan Frantz, Michaël Garcia, Irma Hoffren, Miyuki Kanei, Hugo Layer, Guillaume Lillo, Claire Lonchampt, Nuria López Cortés, Arnaud Mahouy, Ismael Turel Yagüe, Patricia Velazquez, Allegra Vianello, Laurine Viel, Lucia You González. Vendredi 15 février 2019. Premières en France les 29, 30 et 31 mars à l’Opéra Royal du château de Versailles. Puis en tournée.

 

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