[Prix de Lausanne 2021] La finale remportée par António Casalinho
Le Prix de Lausanne 2021 s’est tenu du 1er au 6 février, exceptionnellement uniquement en vidéo à cause de la crise sanitaire. La finale a été remportée par le talentueux António Casalinho, portugais de 17 ans et élève de l’excellent Conservatório Internacional de Ballet e Dança Annarella Sanchez. Malgré les conditions difficiles, le Prix de Lausanne a su remplir sa mission : permettre à de jeunes danseurs et danseuses de se faire remarquer par les grandes écoles du monde de la danse, les prix étant sous la forme de bourse d’étude par les nombreuses écoles partenaires. Et cette finale 2021 a réservé de jolies découvertes.
Lauréat du Prix de Lausanne 2021 (OAK Fondations) et Prix d’interprétation contemporaine (Minerva Kunststiftung) : António Casalinho,17 ans et 7 mois – Portugal – Conservatório Internacional de Ballet e Dança Annarella Sanchez
À vrai dire, le nom d’António Casalinho circulait déjà avant même que la compétition n’ait commencé, tant ce jeune danseur s’est déjà fait remarquer dans le monde des concours. Et ses prestations en vidéo au Prix de Lausanne n’ont pas déçues. Il a d’abord proposé des exercices de cours intelligents, montrant avant tout son placement et ses lignes sans faire d’esbroufe. Le milieu était brillant, avec de formidables qualités de sauts et de tours, une musicalité et une générosité qui se sentait à travers l’écran. L’on sentait à la fois ses très grandes qualités naturelles et un bon et sérieux travail de fond. Sa variation de Diane et Actéon était enthousiasmante avec un vrai effet « whaou », tandis que sa variation contemporaine montrait à nouveau son grand sens du mouvement. Les compagnies devraient se bousculer pour l’engager. Un jeune talent à suivre de très près.
Deuxième bourse (Bourse Jeune espoir), Prix du meilleur Suisse et Prix du public : Luca Abdel-Nour, 17 ans et 10 mois – France et Égypte – Tanz Akademie Zürich
Candidat sérieux, Luca Abdel-Nour n’a pas volé sa place en finale, même si je ne le voyais pas aussi haut dans le classement. Il a proposé un travail de cours très propre, montrant son placement et ses lignes avec beaucoup de tenue et d’élégance. Un vrai prince ! Tout était très en place au milieu et maîtrisé, même s’il manquait un peu de brio, d’explosion, tout était encore un peu scolaire. Sa variation classique (extrait de Paquita) montrait toutefois une technique brillante et le mettait plus en valeur. Le potentiel est là et c’est aussi ce que récompense le Prix de Lausanne. Le public suisse a su en tout cas soutenir cet élève de la très bonne Tanz Akademie de Zürich.
Troisième bourse (Fondation Albert Amon) et Prix du jeune talent (Fondation Noureev) : Andrey Jesus Maciano, 16 ans – Brésil – Balé Jovem De São Vicente
L’on est là typiquement dans la récompense voulant soutenir un potentiel plutôt qu’un danseur déjà formé. Pendant la vidéo de cours, Andrey Jesus Maciano montrait aussi bien ses défauts (un peu raide, lourd dans les sauts) que de belles qualités naturelles et une danse généreuse et expressive. L’on sentait l’envie et la passion. Idem dans sa variation classique (Harlequinade), un peu too much dans l’expression mais montrant un jeune danseur généreux et vraiment attachant. Une personnalité rayonnante.
Quatrième bourse (Fondation Caris – Jeune espoir) : Seojeong Yun, 17 ans et 3 mois – Corée du Sud – Seoul Arts High School
L’une de nos coups de coeur de cette édition 2021 ! Dès la barre, Seojeong Yun montre une très jolie présence, pleine de charme et de musicalité. Les lignes et la propreté sont aussi là. Au milieu, elle occupe tout l’espace avec grâce et générosité, montrant de très belles qualités de sauts et de travail du bas de jambe. Dans sa variation, elle fut une irrésistible Kitri, montrant à la fois une forte personnalité et beaucoup d’éclat. Bref, une pépite !
Cinquième bourse (Fondation Coromandel) : Shunhei Fuchiyama, 18 ans et 2 mois – Japon – The Harid Conservatory
Voilà un très beau danseur qui s’est emparé avec classe et brio de la si difficile variation du Grand pas classique. Sa danse était superbe, avec beaucoup de classe et d’élégance (le choix de la variation mettait vraiment en valeur ses qualités) et l’on sent déjà chez lui une âme de soliste. Shunhei Fuchiyama a aussi fait preuve de beaucoup de personnalité dans sa variation contemporaine (A Solo for Diego) avec une fougue appréciable. Un « produit fini » plutôt qu’un jeune talent en devenir, qui devrait avoir de belles propositions de contrats.
Sixième bourse (Fondation en faveur de l’art chorégraphique) : Ashley Coupal, 18 an – Canada – Orlando Ballet School
Ashley Coupal n’était pas forcément la plus brillante, mais elle a proposé un parcours globalement équilibré. Pour sa vidéo de cours, elle a fait preuve d’une belle présence naturelle, et de jolis qualités dans la petite batterie. Sa variation de Giselle était un très joli moment là encore, avec une belle technique et un charme naturelle, un très beau travail. Elle fut cependant moins percutante dans sa variation contemporaine.
Prix d’interprétation contemporaine (Minerva Kunststiftung) : Rui Cesar Da Cruz, 18 ans et 6 mois – Brésil – Grupo Cultural de Dança Ilha
En plus d’António Casalinho déjà cité, le Prix d’interprétation contemporaine est revenu à l’étonnant Rui Cesar Da Cruz, un grand gaillard avec qui il reste encore du travail à faire, mais un talent à l’état brut ! Voilà un danseur à la folle énergie et aux superbes qualités de sauts. Il est limite un peu trop vieux pour rentrer dans une école, ce qui est dommage car son travail de fond n’est pas terminé, mais il est difficile de rester insensible à ce qu’il dégage. Dans sa variation Rain (très souvent choisie cette année), il fut un véritable Ovni, très différent des autres, très impliqué, avec un sens du mouvement étonnant. À voir ce que cette belle récompense lui apportera comme bourse d’étude ou contrat.
La finale en quelques mots
Le Prix de Lausanne est décidément unique. L’on pensait être frustré de ne vivre ça qu’en vidéo. Et évidemment que cela l’est. Mais entre les vidéos de cours, la première impression des sélections et 20 très beaux finalistes, il y a eu de quoi se faire une véritable impression sur ces jeunes espoirs. Et la finale resta malgré tout agréable à regarder. L’on ne pouvait aussi qu’être ému par la différence des conditions, entre un studio magnifique pour tel candidat et une salle bien plus petite pour telle autre, tout comme ces si nombreuses salles quadrillées où l’on devine les cours distanciés. L’on sentait aussi l’absence de coaching pour les variations, d’autant plus pour les contemporaines où il manquait souvent un fil conducteur.
António Casalinho était au-dessus du lot et sa première place est méritée. Mais son école, le Conservatório Internacional de Ballet e Dança Annarella Sanchez, n’a proposé que de magnifiques candidats. Ses collègues Giulio Diligente et Francisco Gomes auraient pu figurer sans rougir parmi les récompensés. De façon très subjective, je peux regretter au palmarès la toute jeune Airi Kobayashi, qui a proposé une très belle classe avec beaucoup de musicalité ainsi qu’un vrai sens du style dans L’éveil de Flore. Idem pour Luiza Falcão, rayonnante et très artiste aussi bien en classe que pendant ses variations. Koharu Yamamoto, l’élève japonaise du CNSMDP, a dignement représenté son école, en proposant aussi bien en cours qu’en variations une danse très musicale, élégante et placée. Peut-être manque-t-il encore un peu de brio, à briser une certaine timidité. Mais la qualité de sa danse devrait la faire remarquer.
Pendant cette finale, Wayne McGregor a reçu le Lifetime Achievement Award, tandis que le Young Creation Award Winners a été remporté par Samuel Winkler (élève de l’école de Hambourg) et Maya Smallwood (Canada’s National Ballet School). Leurs chorégraphies figureront dans la listes des variations contemporaines du 50e Prix de Lausanne, qui aura lieu du 30 janvier au 6 février 2022 à Montreux. Nous reviendrons sur ce Young Creation Award Winners dans quelques jours.
Elizzy8
Je suis d’accord avec vous en ce qui concerne Mlle. Kobayashi, la plus jeune des finalistes, et l’on ne peut qu’espérer lors des séances ‘networking’ qu’elle décrochera une offre d’une place dans une grande école de danse.