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Conseil pratique – Décortiquer le grand jeté en tournant

Grand jeté en tournant, entrelacé, pas de bourrée jeté… Le conseil pratique de ce mois serait d’abord de choisir le bon mot pour le beau geste. Ce mouvement de grand allegro présente une amplitude et une technique qui nécessite de se mettre au diapason. On vous dit tout pour améliorer ce pas qui marque un palier de progression dans le long apprentissage de l’art de la danse classique. 

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Définir le mouvement

Selon le nom que vous lui donnez, on peut définir un tronc commun à ce pas. Toute la magie et la beauté de la danse qui permettent de se comprendre sur la même chose à n’importe quel endroit du monde ! 

Les jambes

Étape 1 – Le pas débute par un pointé, un dégagé en arabesque. Pour une meilleure compréhension, on suppose dans nos explications une jambe droite pointée derrière soi et le corps de face, en plan frontal.

Étape 2 – Tournez votre corps, d’un quart ou d’un demi-tour sur la droite. Selon les enseignements, réalisez un chassé à la seconde, soit de profil à la position de départ, soit deux pas marchés sur la demi pointe.

Étape 3 – Mettez le poids du corps sur la jambe droite pliée face à la direction choisie, ou dos à la position de départ. La jambe gauche est lancée en grand battement quatrième par le passage en première. Impulsez et, durant ce saut, tournez d’un demi-tour sur votre droite pour se retrouver face à la position de départ. Pendant ce temps, la jambe droite est lancée en grand battement arabesque.

Étape 4 – Le saut se réceptionne sur la jambe gauche pliée, face à la position de départ. La jambe droite se maintient en position arabesque. Vous pouvez enchaîner le mouvement du même côté.

Les bras

Maintenant que vous imaginez les jambes, visualisez les bras. Durant le pas de liaison, les bras se maintiennent à la seconde. Lors du passage en position première de la jambe gauche, les bras font de même. Lors du grand battement en quatrième de la même jambe, les bras s’élèvent en couronne. Ils sont maintenus dans cette position durant le saut. À la réception et selon le travail souhaité par votre professeur.e de danse, les bras s’ouvrent en seconde, en arabesque ou restent en couronne.

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Les subtilités

La longueur de la définition et le nombre de termes utilisés pour ce pas en disent beaucoup sur les points à développer.

Le pas de liaison

Comme dit précédemment, le pas peut se dire « (Grand) Pas de bourrée jeté » souvent attribué à la technique française, « Entrelacé » ou « Grand jeté en tournant ». À vous de voir quelle école vous préférez. De ce choix en découle le pas de liaison utilisé comme élan au saut – l’étape 2 vue juste au-dessus. Vous avez comme possibilité le chassé, le pas de bourrée ou la glissade en remontant. Par exemple : un chassé se fera en rabattant la jambe derrière l’autre, le pas de bourrée ou pas marché se fera en passant une jambe par devant l’autre.

Quel que soit le pas utilisé, il permet de faire la liaison entre le plan ou la position de départ et l’exécution du grand battement et du saut. À ce titre gardez la tête et le regard face à la direction de départ, le pas de liaison se fera ainsi subtilement de profil. Il doit se faire avec soin et dynamique. Le sol s’attaque par la pointe avec un plié nécessaire à la puissance souhaitée pour le saut. De la compréhension et de la qualité du pas en découlera le ballon.

Le départ du saut

Il se fait en mettant le poids du corps sur la jambe pliée face à la direction choisie ou dos à la position de départ. Puis l’autre jambe est lancée en grand battement quatrième par le passage en première. Le saut débute donc sur une jambe et finit sur l’autre. La force et l’élan doivent être optimum, pour cela les bras doivent se coordonner. Le passage en première se fait alors par le plié des deux jambes, avec les bras dans la même position. Le grand battement se fait ensuite sur une jambe d’appui pliée, montant en même temps que la couronne des bras. Le plié se densifie durant ces deux moments. La pression doit être lâchée avec explosivité, permettant au corps de s’élever puis de revenir face à la direction de départ.

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Le temps de saut

Durant le temps du saut, la jambe du grand battement doit se rabattre pour permettre la réception. Toute la difficulté est là. Pour vous faciliter l’exécution, certains professeurs de danse peuvent vous encourager à lancer la jambe en grand battement seconde, c’est-à-dire après le passage en première, la jambe part en seconde (grâce à l’en-dehors !) pendant que le corps s’engage immédiatement dans le changement de direction. Pour améliorer le travail de cette jambe, vous pouvez aussi visualiser le geste en deux temps. Le premier, la jambe est lancée devant soi (ou devant son nez). Le second, la jambe est relancée ou avancée au dessus de soi avant de poser le saut. Ce dernier geste vient en synergie avec le travail de la seconde jambe. C’est celle sur laquelle vous êtes appuyée durant le passage précédent.

Durant l’élévation du saut, votre buste se tourne progressivement et cette jambe est libérée en grand battement arabesque ou lancée derrière-soi. La difficulté est l’extension du genou. Vous étiez en position pliée : la tentation de lancer sa jambe en attitude ou « attibesque » est grande. Le saut peut être réceptionné en attitude mais est ce que votre professeur.e l’a souhaité ainsi ? 

Parmi les termes employés pour ce pas, il y a celui de grand jeté. Dans l’imaginaire collectif, c’est le geste où l’on saute en grand écart dans les airs. En combinant les conseils précédents, un grand écart pourrait se dessiner lors du saut. La jambe lancée derrière soi en grand battement arabesque se combine à la poussée de l’autre jambe en dessous de soi.

La réception du saut

Enfin arrive la réception, qui n’est pas non plus une mince affaire. Elle se fait en arabesque plié, soit sur une jambe. Le confort de la réception doit présenter de la stabilité et de l’équilibre. La jambe lancée en arabesque se maintient à la même position et de préférence à la même hauteur… Si le maintien de la jambe est correct, il ne devrait pas exister de contrepoids vous entraînant sur l’arrière. Pour améliorer ce travail, n’hésitez pas à maintenir à la réception durant un long moment ou bien enchaîner avec un relevé en arabesque.

Les bras peuvent aussi être un contrepoids lors de leur ouverture en seconde à la réception. Cette fois, l’erreur serait d’entraîner le buste sur l’avant, abandonnant l’angle fait entre la jambe et le dos. Pour optimiser le travail, maintenez vos bras en couronne ou en arabesque. Si vous tenez la position suffisamment de temps ouvrez délicatement vos bras comme une offrande de votre saut au public.

 

Les différents termes vous permettent de visualiser l’histoire et le patrimoine de cet art dans un simple pas. Par l’évolution technique du pas et du langage parlé, il est fort à parier que dans de nombreuses années, le pas de bourrée jeté portera un autre terme… mais gardera les mêmes difficultés de réalisation.

 




 

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