La Danse et la grossesse 3/5 – Le deuxième trimestre
Après l’annonce et le premier trimestre, continuons notre série « La Danse et la grossesse ». Vous entamez votre deuxième trimestre avec sagesse ou presque. Vous êtes belle et épanouie. Votre corps change et laisse de la place à des sensations et des émotions étonnantes. Souvent cette période est l’un des bons moments de la grossesse, avec les grosses fatigues et les nausées du premier trimestre qui sont derrière vous. Votre envie de danser est toujours intacte mais quelques désagréments liés à la grossesse peuvent vous gêner. Comme toute œuvre, le temps de création a des hauts et des bas. Tentons d’en déceler suffisamment pour que la danse participe à votre chef-d’œuvre.
Petit récap de la professeure de danse
La grossesse se rapproche de l’Art. C’est un état limité dans le temps où votre corps et votre esprit créent une œuvre. Les changements physiques et émotionnels sont importants et nécessaires. Cependant, telle la création d’une œuvre, ils ne sont ni immédiats ni identiques et peuvent prendre divers chemins.
À ce titre, le suivi médical et spécialisé est indispensable. Il n’est pas remplaçable par des interprétations ou des conseils. Votre santé physique et mentale prime.
Tenir la barre, maintenir le cap
De profil à la barre ou face au miroir, votre état n’est plus un secret. Si l’envie et le plaisir de danser sont toujours là, et si votre médecin-e ou sage-femme vous y autorise, vous pouvez sans problème continuer vos cours de danse. L’idée est de maintenir une forme physique pour vous et votre bébé mais sans recherche de performance ou de compétition. Par rapport à vos habitudes d’avant-grossesse, il faut réfléchir à moduler, selon l’état de fatigue, l’effort à fournir ou l’heure du cours
Les points fondamentaux
Petite surprise au moment de se mettre à la barre : désormais, vous ne voyez plus vos pieds ! Vous ne pouvez donc plus ajuster votre première position au coup d’œil. Parfait ! Vous êtes donc obligée de veiller à l’auto-grandissement et à la prise d’en-dehors par le haut de la jambe et le bassin.
À noter : le travail de pieds et de bas de jambe vous permet de remettre du flux sanguin, de l’énergie sur le bas de corps. Les dégagés, jetés ou ronds de jambe à la barre sont pour vous.
La tenue
Au deuxième trimestre, on oublie les rubans de chaussons et la jupette n’est plus à l’ordre du jour. Vous préférez les élastiques au pied. La bouteille d’eau et le petit en-cas sont toujours dans votre sac de danse.
Le contenu du cours
Le contenu du cours est à réfléchir ou à discuter avec votre professeur-e de danse. L’idée est de réduire les pertes d’équilibre, les chutes et les collisions. Selon les effectifs ou le parcours chorégraphié demandé, la prise de l’espace comme l’exécution peuvent être gênées ou enclavées. Afin de ne pas danser petit ou avec la crainte d’un coup de coude de votre voisine, les cours particuliers peuvent être une solution. Le professeur s’adaptera ainsi à vos besoins, réduira vos doutes et orientera son travail.
Sur ce deuxième trimestre, oubliez les barres au sol ou le travail des portés.
Travailler ses défauts
Il est possible que vos défauts ou manques de coordination soient encore plus présents avec la grossesse. Notez les points à travailler. Lorsque vous reprendrez la danse de façon intensive, vous pourrez ainsi orienter le travail. Par exemple, si le cambré n’était pas votre fort, enceinte vous vous sentez vraiment bloquée. Notez-le dans un coin de la tête ou sur un petit carnet de bord. De retour en cours après votre accouchement et votre récupération, vous pourrez corriger sans appréhension le geste et sa visualisation. Vous pouvez bien sûr le corriger durant la grossesse mais vous aurez besoin d’être accompagnée par votre professeur de danse car votre construction mentale du geste sera confrontée à votre appréhension de la grossesse. Acceptez l’état de votre corps dans le geste donné et corrigez ce dernier quand vous serez disponible physiquement et mentalement.
Au cas par cas
Hors mis le cambré, d’autres pas vous interrogent. Le médecin prône souvent la réduction de l’effort et de l’amplitude du geste. Mais pour vous, même un simple grand plié démarrant le cours de danse demande de l’effort et de l’amplitude ! Comme le grand fondu en arabesque (grande fente), le grand écart et bien sûr les sauts. L’idée est de pratiquer en sécurité en gardant le suivi médical, votre ressenti et les chorégraphies demandés, de façon alternée pour favoriser la récupération, et au cas par cas. Certaines vont pouvoir continuer leur cours de danse comme avant lors de ce deuxième trimestre, avec les sauts et les diagonales – qui ne sont pas contre-indiqués si votre suivi médical vous y autorise. Pour d’autres, la barre peut être suffisante. Dans ce cas, à la place du travail au milieu, vous pouvez ajouter des exercices de renforcement de chevilles ou de bras.
Lâcher la barre, rester à bon port
La pratique de la danse a plein d’avantages pendant la grossesse : elle permet une mobilité et une sollicitation musculaire du bassin importante, la zone du périnée est visualisée et soutenue, l’auto-grandissement de la colonne et sa mobilité reste un travail de base.
Cependant nous ne sommes pas égales. Certaines pratiquent la danse jusqu’à l’accouchement, d’autres s’arrêtent dès l’annonce. De même en cours, vous n’avez pas le même niveau, le même temps de pratique, les mêmes sensations que votre voisine. Pour réduire le risque, le professeur de danse peut vous orienter sur un penché à mi-chemin, un grand plié plus lent, un changement de pied plutôt qu’un échappé ou l’interdiction du geste. Et les différences sont nombreuses. Vous pouvez attendre plusieurs bébés, souffrir de troubles respiratoires ou vasculaires, avoir des carences ou encore des antécédents qui entraînent une modification de la pratique.
Discutez avec vos copines pour évaluer votre essoufflement. Si c’est le cas : on s’arrête. Idem si vous êtes sujette aux dyspnées (respiration désagréable) accentuées par l’aération de la salle ou la chaleur de l’effort. Les courbures de la colonne vont aussi se modifier, cela peut jouer sur l’équilibre et amenant peut être des lombalgies : vous risquez d’être freinée dans la réussite de vos retirés ou pirouettes et être plus propice aux chutes.
Ce sont vos consultations mensuelles avec votre médecin ou votre sage-femme qui établiront la continuité ou l’arrêt complet de la danse selon le terme de la grossesse et son évolution. Si tout va bien et que vous le sentez : faites-vous plaisir et continuez votre cours de danse comme avant, avec cependant les précautions citées ci-dessous. Si tout va bien mais que la fatigue ou l’appréhension vous bloquent : écoutez-vous et limitez-vous à la barre. Si vous êtes motivées comme jamais mais que votre médecin ou sage-femme met le holà : apprenez à travailler différent et lâchez prise ! Quelques mois sans faire de grands sauts ne seront pas irrécupérables. Vous pouvez travaillez vos cheville, votre bassin, vos bras… et votre esprit (valable aussi si vous continuez la danse !). Plongez-vous ainsi dans l’anatomie et la mobilité du bassin. Cette petite zone du corps qui supporte une nouvelle vie et centralise bien d’autres fonctions.