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Guillaume Diop nommé Danseur Étoile – Retour sur son parcours

Guillaume Diop a été nommé Danseur Étoile le 11 mars, lors d’une tournée du Ballet de l’Opéra de Paris à Séoul, alors qu’il dansait le rôle principal d’Albrecht dans le ballet Giselle, aux côtés de Dorothée Gilbert. Une promotion à 23 ans, récompensant un parcours rapide, accéléré notamment après la pandémie où le jeune danseur a multiplié les premiers rôles. Tant et si bien que José Martinez, le Directeur de la Danse, n’a pas attendu qu’il soit Premier danseur pour le promouvoir Étoile, Guillaume Diop étant encore Sujet. Retour sur le parcours de ce jeune danseur, en fouillant dans les archives de DALP.

Guillaume Diop

Né en 2000 à Paris, Guillaume Diop est né d’un père sénégalais et d’une mère française. Son parcours dans la danse est classique. Il découvre tôt cet art, vers 4 ans, par des cours d’initiation à la danse contemporaine. Sa professeure le dirige vers la danse classique, repérant ses qualités. Le danseur suit alors les cours du conservatoire municipal du XVIIIe arrondissement, avant de rentrer en horaires aménagés au CRR de Paris. En 2012, à 12 ans, il tente le concours d’entrée de l’École de Danse de l’Opéra de Paris, dirigée par Élisabeth Platel, et est reçu en tant que grand stagiaire, en cinquième division, dans la classe de Marc Du Bouaÿs. Un professeur avec qui Guillaume Diop continuera de travailler durant toute sa scolarité.

Guillaume Diop entre pleinement en tant qu’élève en quatrième division, en 2013, aux côtés notamment de Jack Gasztowtt, Aurélien Gay ou Luna Peigné. Il monte les divisions petit à petit, sans forcément se faire remarquer dans le classement. Lors des spectacles, il danse D’ores et déjà de Béatrice Massin et Nicolas Paul en 2015 (3e division) ou Piège de lumière de John Taras en 2016 (2e division). À la fin de cette année, il part en stage d’été à la Ailey School, à New York et revient plus motivé que jamais. Néanmoins, son parcours n’est pas forcément des plus rapides. En 2017, alors en première division, il est distribué dans le corps de ballet de Raymonda lors du spectacle de l’École, mais pas forcément dans un rôle principal. Lors du Concours interne pour entrer dans le Ballet, il n’est pas recruté et finit cinquième, derrière Alexandre Boccara, Milo Avêque, Samuel Bray et Jack Gasztowtt, qui eux sont reçus dans le Ballet. Le danseur choisit de refaire une première division, alors que sa deuxième place au concours externe aurait pu lui assurer une place de surnuméraire. Une sage décision pour l’apprenti-danseur, qui outre de continuer ses études, prend de l’ampleur. Il se fait ainsi remarquer aux Démonstrations, et surtout lors du spectacle de l’École où il danse Un Ballo de Jiří Kylián et Spring and Fall de John Neumeier. Et au concours interne, le danseur finit cette fois-ci premier. Il est reçu dans le Ballet en même temps que Nathan Bisson, Aurélien Gay et Lucie Devignes, Hohyun Kang, Loup Marcault-Derouard et Nikolaus Tudorin étant reçus suite au Concours externe.

Guillaume Diop à l’École de Danse – Spring and Fall de John Neumeier

Les premières années de Guillaume Diop dans le corps de ballet ne sont pas non plus forcément le signe d’une trajectoire à toute allure. Le jeune danseur est sur scène régulièrement, dans le corps de ballet, on le repère dans les galas à l’extérieur. Mais n’a pas d’opportunité en tant que soliste à l’Opéra de Paris. La faute au Concours de promotion où Guillaume Diop, s’il y montre tout de suite une joie de danser et de grandes facilités, n’arrive pas à passer dans la classe des Coryphées. Ainsi en 2019, lors de son premier Concours, l’on note « Guillaume Diop est clairement un jeune talent à suivre, plein de promesses« , malgré une troisième place non-synonyme de promotion. Il y dansait Napoli d’Auguste Bournonville et Lucien d’Hervilly. Trois mois plus tard, c’est le black-out du Covid et la fermeture des théâtres pendant 18 mois. Guillaume Diop, comme toute une génération de jeunes talents, doit patienter alors qu’ils ont de l’énergie à revendre et la soif d’apprendre.

Pendant ce long confinement, Guillaume Diop fait parler de lui en faisant partie des artistes signataires du manifeste « De la question raciale à l’Opéra national de Paris », qui amena à la publication en février 2021 d’un Rapport sur la diversité à l’Opéra de Paris par Pap Ndiaye et Constance Rivière. Un rapport conseillant notamment de distribuer et inviter plus souvent des danseurs et danseuses noires dans les rôles principaux. Deux mois plus tard, retour à la danse pour Guillaume Diop. Il échoue une nouvelle fois au Concours de promotion pour passer Coryphée, avec La Sylphide de Pierre Lacotte en variation imposée et Études de Harald Lander en libre. Encore une fois, le danseur est troisième classé pour seulement deux postes, devant Chun-Wing Lam et Jack Gasztowtt qui sont promus. Mais Guillaume Diop se fait néanmoins remarquer au même moment lors du programme Jeunes danseurs et danseuses, donné à huis clos et jamais diffusé. Il y danse le classique des classiques pas de deux de La Belle au bois dormant dans la version de Rudolf Noureev, aux côtés de Hohyun Kangle. Et il s’y fait remarquer par sa danse ample et musicale, sa joie d’être sur scène.

Guillaume Diop dans La Belle au bois dormant – Soirée Jeunes danseurs et danseuses

Est-ce cette distribution, le rapport cité plus haut, un peu des deux ? En juin 2021, lors de la réouverture des théâtres, Guillaume Diop a droit à son premier rôle de soliste. Et pas n’importe lequel : un premier rôle, celui de Roméo dans Roméo et Juliette, aux côtés de Léonore Baulac. Le danseur est Quadrille, n’a encore jamais eu un rôle de soliste. Il remplace Germain Louvet, a quinze jours pour répéter… Et relève le défi haut la main. Qu’importent alors les raisons de cette distribution : le jeune danseur a montré ses capacités, son talent de s’emparer d’un personnage et d’assurer quoi qu’il arrive. Alors que la troupe manque cruellement d’Étoiles masculines, que les Premiers danseurs ont la malchance d’avoir des blessures, ces talents-là sont précieux. Aurélie Dupont, si stricte sur la hiérarchie concernant les danseuses, a aussi toujours été plus souple pour les danseurs, n’hésitant pas à distribuer des non-gradés dans des premiers rôles, quitte à déséquilibrer parfois l’unité de la troupe.

Pour Guillaume Diop, c’est en tout cas le début, enfin, de son ascension fulgurante. En 2021, il rafle le Prix de danse du Cercle Carpeaux et le Prix AROP de la Danse. Moins stressé, en pleine possession de ses moyens, il survole les Concours de promotion. ll passe Coryphée en novembre 2021 avec la variation lente de Siegfried. « Guillaume Diop finit naturellement à la première place. Sa libre, la variation lente du Lac des Cygnes, manquait peut-être un peu d’émotion, mais il a montré qu’il avait toutes les qualités pour jouer les rôles de princes (qu’il commence déjà à aborder). Une promotion tout à fait logique et méritée« . Idem en 2022 où il passe Sujet, avec Marco Spada de Pierre Lacotte et Siegfried, une nouvelle fois, cette fois-ci avec la variation de l’acte III. « Le jeune espoir n’a pas failli. Sa variation imposée était de loin la plus belle du Concours (tous grades confondus), ample, généreuse, soucieuse du style et de l’École« .

Guillaume Diop lors du Concours de promotion 2022

Et côté des distributions, les premiers rôles s’enchaînent. Quelques mois après son Roméo, il danse le si difficile rôle de Basilio dans Don Quichotte avec Léonore Baulac, puis en avril Solor dans La Bayadère, cette fois-ci aux côtés de Dorothée Gilbert. À chaque fois, cela se fait dans des conditions pas évidentes, faites de remplacements souvent de dernière minute. Mais le danseur se fait remarquer, par sa présence, sa faculté à faire vivre un personnage. Même si l’on peut être frustré : l’on sent dans ses performances qu’il n’a pas forcément eu le temps nécessaire pour bien approfondir un personnage. Et que l’on préfèrerait presque le voir dans un rôle un peu moins important, mais dans de bonnes conditions. En juin 2022, Aurélie Dupont part de la Direction de la Danse. Pour Guillaume Diop, c’est un tout petit creux (relatif) dans les distributions, où il retrouve sa place officielle de Coryphée. Rien ainsi dans Giselle pour terminer la saison 2021-2023. Quand tombent les distributions du Lac des cygnes en septembre, il apparaît uniquement en tant que remplaçant de la danse espagnole. Néanmoins dans Mayerling de Kenneth MacMillan à l’automne 2022, on le retrouve parmi quatre officiers hongrois, avec sa présence naturelle intacte.

Et puis l’on a vite besoin de lui. Le Lac des cygnes prévu en décembre souffre de nombreuses blessures parmi les solistes masculins. L’on a besoin d’un danseur brillant, qui apprend vite, fiable, qui ne se laisse pas envahir par le trac. Et Guillaume Diop s’impose. Il devient titulaire de Siegfried, alors que José Martinez vient tout juste de prendre la Direction de la Danse. Cette prise de rôle m’avait laissé indécise. « Rêveur et mélancolique, Guillaume Diop apparaît un peu désarmé face à lui au premier acte. Mais son regard juvénile tient la route dans cette histoire, et comment ne pas être emporté par sa danse absolument superlative, brillante et musicale ?« . Sur scène Pablo Legasa en Rothbart semble plus prêt au titre d’Étoile. Mais il se blesse. Et lors du gala hommage à Patrick Dupond en février, c’est Guillaume Diop qui brille dans le si virtuose Études de Harald Lander, encore une prise de rôle. La tournée en Corée du Sud s’enchaîne. Remplaçant sur Albrecht dans Giselle, Guillaume Diop reste à Paris. Mais Paul Marque se blesse à son tour, le danseur s’envole à Séoul pour le remplacer. Il fait sa prise de rôle dans ce personnage emblématique le 8 mars, sous les yeux de son nouveau directeur José Martinez. Celui-ci est conquis. Et pour sa deuxième date, le 11 mars, il le nomme Danseur Étoile.

Giselle de Jean Coralli et Jules Perrot – Guillaume Diop et Dorothée Gilbert, en tournée à Séoul

Guillaume Diop fait ainsi partie des rares danseurs nommés Danseur Étoile en étant Sujet, sans passer par la case Premier danseur. Cela reste néanmoins presque anecdotique. Il était évident que la place de Premier danseur lui serait revenue au prochain Concours de promotion, avec une nomination dans la foulée. Cela rend finalement bien plus ouvert le prochain Concours aux Sujets, qui auront tous leurs chances, et officialise une situation où le danseur, de fait, était distribué comme un Premier danseur. À 23 ans, Guillaume Diop est jeune, mais tout autant que Paul Marque, Hugo Marchand ou Germain Louvet, moins que Mathieu Ganio nommé à 20 ans (lui aussi directement Sujet) et Mathias Heymann à 21 ans. La carrière de Guillaume Diop a mis un peu de temps à démarrer, le long arrêt du Covid l’a écarté de la scène longtemps. Il a su néanmoins rattraper ce retard avec de nombreuses prises de rôles réussies. Et a eu le petit coup de pouce de la chance, avec ce manque d’Étoiles masculines qu’il faut combler pour assurer une saison plus calmement. Guillaume Diop a montré tout son potentiel, sa capacité à occuper la scène, à animer sa danse, sa si généreuse virtuosité. Il a maintenant le titre qui va lui permettre de travailler sereinement. Avec devant lui 20 ans d’étoilat qui s’annonce passionnantes et enthousiasmantes.

Études de Harald Landr – Guillaume Diop

 



Comments (7)

  • Geraldine Renoux Chauvet

    C’est assez étonnant …. comme vous pouvez véhiculer des choses fausses ! Cela fait de vous des professionnels peu crédibles : Guillaume Diop a été promu PREMIER DANSEUR à l’automne dernier ! Il suffisait de jeter un coup d’oeil à la composition du ballet sur le site de l’Opéra pour le savoir : il n’est donc pas passé directement Etoile mais a bien gravi les échelons comme tous : une seule exception à ce dur chemin, inégalée à ce jour : Mathieu Ganio passée Etoile d’amblée et à 20 ans ! Du reste : Guillaume Diop montre de nombreux progrès depuis cette nomination de Premier Danseur . . . mais on constate encore un certain manque d’assurance dans la technique et une subtilité de jeu à travailler : et le jeu compte car c’est la particularité de ce ballet, l’élégance, la  » chose  » que l’on ne sait expliquer et que d’autres ballets n’ont pas, d’où qu’ils soient ! Ceci-dit son physique convient pour le jeu du ballet Classique – peut-être un peu tôt ! C’est vrai qu’on manque cruellement d’Etoiles masculines – Pablo Legasa ou Jérémy – Loup Quer semblaient davantage indiqués car vraiment prêts ( et non, ils ne font pas partie du petit lot de blessés de cette fin d’année ) !
    . . . . . . il sert à quoi, votre blog stupide, si vous n’êtes pas capable de vérifier si vos dires sont justes ou faux ! NUL !

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  • Lopez

    Assurer en Roméo ????? On ne doit pas parler du même danseur … la technique ne suffit pas !!! Loin très loin de là !!!

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  • Sylvie Swanilda

    J’ai eu la chance de voir Guillaume Diop comme partenaire de Dorothée Gilbert dans le Lac en décembre dernier. Si la différence de niveau , mais surtout de maturité, était flagrante entre ces 2 danseurs , Guillaume est tout de même un beau danseur qui possède une très belle technique classique .Il a surement besoin de temps et de travail pour approfondir les grands rôles masculins du répertoire qui lui seront confiés, surtout quand on est nommé Etoile aussi jeune. Bravo à lui pour cette belle nomination ,et on espère que leur tour viendra rapidement pour certains 1ers danseurs très talentueux aussi…

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  • CATTENATI

    Chère Amélie,
    BRAVO pour votre blog intelligent et inégalé en matière d’actualités de la DANSE!!!
    Continuez à nous informer, à nous faire Rêver et réagir aussi, car tous les journalistes ou blogueurs qui interviennent dans le monde de l’art, le font avec leur sensibilité et le pluralisme est essentiel.
    Nous en avons assez des Monsieur et Madame je sais tout, arbitres intraitables des élégances et du talent…
    Bien cordialement
    Florence

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  • Alan

    je viens de regarder Casse-noisette sur France 5 et j’ai découvert avec admiration ce magnifique et talentueux danseur. J’ai voulu savoir qui c’était au générique, et maintenant je me renseigne sur lui, et…admiration! C’est formidable un (ou une) à l’Opéra! je lui souhaite une magnifique carrière !

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  • Alan

    je précise la fin de ma phrase; un ou une métis(se) à l’Opéra
    Alan

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