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Les Saisons de Thierry Malandain – Malandain Ballet Biarritz

Thierry Malandain propose cet automne sa dernière création, Les Saisons, pour le Malandain Ballet Biarritz. Une commande de l’Opéra Royal de Versailles, mais dont la première a ouvert l’édition 2023 du Festival de Danse de Cannes. Ce ballet en quatre actes mêle la célébrissime partition d’Antonio Vivaldi à celle méconnue de Giovanni Guido, composée à la même époque. Le chorégraphe livre une création virtuose, composant une série de superbes ensembles complexes pour une compagnie irréprochable techniquement, portée par le soliste charismatique Hugo Layer qui illumine la scène. Musicien remarquable, Thierry Malandain parvient à se jouer de la collision entre deux partitions qui détonnent et propose une ode à la nature sublimée par la très belle scénographie de Jorge Gallardo.

 

Les Saisons de Thierry Malandain – Malandain Ballet Biarritz

 

Thierry Malandain ne cache pas que, jamais, il ne lui serait venu à l’esprit d’imaginer une chorégraphie sur Les Quatre Saisons d’Antonio Vivaldi. Une partition paradoxale, composée de quatre concertos pour violon qui comptent parmi les chefs-d’œuvre du répertoire baroque, mais que l’on a parfois usée jusqu’à la corde dans les interminables attentes téléphoniques ou les maudites musiques d’ascenseur. Aucune œuvre n’a été autant galvaudée, faisant parfois oublier son génie. Fort heureusement, on redécouvre depuis une trentaine d’années la qualité musicale unique des Quatre Saisons. Thierry Malandain a été séduit par l’idée d’entrecroiser cette partition iconique avec celle de Giovanni Antonio Guido qui, à la même époque, au début du XVIIIe siècle, écrit lui aussi sur ce thème des saisons.

L’idée est alléchante mais peut se révéler cruelle à l’écoute. La musique de Guido paraît bien anecdotique et sans génie. Apposée à celle de Vivaldi, elle heurte parfois l’oreille et oblige à une gymnastique permanente. Thierry Malandain se joue de ces dissonances grâce, en particulier, au décor unique réalisé par le chilien Jorge Gallardo. Soit trois murs recouverts d’une rangée de pétales géants aux allures de feuilles qui prennent les belles lumières de François Menou, passant d’une couleur à l’autre au fur et à mesure des saisons  Cette scénographie installe une élégance et fonctionne magnifiquement, comme une métaphore  de la nature et de sa pureté que l’on sait menacée.

 

Les Saisons de Thierry Malandain – Malandain Ballet Biarritz

 

Thierry Malandain refuse opportunément de faire une pièce politique. Comme il le confiait à l’issue de la représentation, la danse n’est pas forcément le vecteur le plus approprié pour ce  type de projet. Les préoccupations écologiques et les menaces contre notre environnement ne sont pas pour autant absentes : ces pétales géants qui entourent et dominent danseuses et danseurs sur scène virent parfois au noir, telle une allégorie d’un hiver éternel de la nature. Nul besoin de sur-ligner davantage pour alerter sur les dangers qui menacent la planète.

C’est en effet la problématique qui se pose immanquablement aujourd’hui. Les Quatre Saisons, celles de Vivaldi ou de Guido, s’entendent comme une ode à la nature. Comment s’en emparer quand elle est attaquée de toute part ? Thierry Malandain nous raconte ce cycle avec tact et savoir-faire. Il est l‘un des maîtres d’aujourd’hui pour construire sur scène des ensembles complexes, d’une élégance folle. Vingt interprètes sur le plateau du Palais des Festivals de Cannes en costumes noirs, sobres et austères, se croisent, s’alignent, s’assemblent et se séparent dans un geste impeccable. Les Quatre Saisons débutent traditionnellement par le Printemps, le temps de l’espoir et de la renaissance. Dans cet écrin de pétales, la danse est reine. Fidèle à son vocabulaire unique, seul en France à utiliser la grammaire académique sans pour autant faire chausser les pointes aux danseuses, Thierry Malandain construit un récit chorégraphique qui pourrait nous envelopper dans ce décor où la nature s’annonce dans une abstraction géométrique.

 

Les Saisons de Thierry Malandain – Malandain Ballet Biarritz

 

Mais surgit la composition de Giovanni Guido qui induit instantanément une rupture radicale. À la musique si familière  de Vivaldi succède la découverte de Giovanni Guido. Si les deux partitions ont été composées à la même époque, le style en est bien différent. Le son des Quatre Saisons de Guido est plus âpre. Thierry Malandain en profite pour glisser dans sa chorégraphie une danse de cour « à sa sauce » comme il dit, mais qui paraît étrangement très contemporaine dans son geste. Les costumes fleuris des deux couples de danseuses et danseurs accentuent le registre baroque, en phase avec la musique. Mais le mouvement est un mixte de danse baroque et de geste moderne, introduisant l’intemporel dans ce cycle de vie et de mort que sont les saisons.

Puis paraît Hugo Layer ! En justaucorps, le bras prolongé par un de ces pétales noirs comme une aile qui se meurt, il conclut l’acte du Printemps dans un solo éblouissant. Danseur majuscule, pilier de la compagnie, il se déplace tel un faune, splendide : une danse pure, des sauts amples, des bras ouatés, un charisme qui emporte tout sur son passage. On le retrouve à chaque passage d’une saison à l’autre, en duo et en trio, illuminant le plateau, phénix d’une des meilleures troupes françaises. Et l’une des seules à perpétuer l’école classique de la plus belle des manières.

 

Les Saisons de Thierry Malandain – Hugo Layer

 

Les Saisons de Thierry Malandain par le Malandain Ballet Biarritz, avec Noé Ballot, Giuditta Banchetti, Julie Bruneau, Raphaël Canet, Clémence Chevillotte, Mickaël Conte, Loan Frantz, Irma Hoffren, Hugo Layer, Guillaume Lillo, Claire Lonchampt, Timothée Mahut, Alessia Peschiulli, Julen Rodríguez Flores, Alejandro Sánchez Bretones, Ismael Turel Yagüe, Yui Uwaha, Chelsey Van Belle, Patricia Velazquez, Allegra Vianello, Laurine Viel et Léo Wanner. Samedi 25 novembre 2023 au Palais des Festivals de Cannes, dans le cadre du Festival de Danse de Cannes. 

À voir avec l’Orchestre Royal de Versailles dirigé par Stefan Plewniak les 14, 15, 16 et 17 décembre à l’Opéra Royal de Versailles, du 27 au 30 décembre à la Gare du Midi de Biarritz, puis en tournée toute la saison jusqu’aux Chorégies d’Orange le 12 juillet. 

Le Festival de danse de Cannes se poursuit jusqu’au 10 décembre 2023.

 




 

Commentaires (2)

  • MERRIOT

    Je suis enthousiasme par la richesse et la qualité des Ballets MALA.DAIN. Depuis peu je me suis i.scrite à L Association afin. De profiter au maximum de ces beaux Dpectacles que j aie découvert cet été à Biarritz en decouvra.nt le Ballet proposeNOE

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  • Hafs

    Super

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