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Les Adieux de Clairemarie Osta : le film

Le 13 mai dernier, la Danseuse Etoile de l’Opéra de Paris Clairemarie Osta faisait ses adieux à la scène, dans le ballet L’Histoire de Manon. La réalisatrice A.D. Duval s’était glissée en coulisses pour filmer non seulement la soirée, mais aussi toutes les répétitions. En est sorti un documentaire de 50 minutes, sobrement intitulé Les Adieux, et projeté à la mi-octobre dans le cadre de l’AROP.

Tout démarre à J-52, sous entendu avant le dernier spectacle de Clairemarie Osta. Elle et son mari, Nicolas Le Riche, sont en studio avec Patricia Ruanne, pour démarrer les répétitions de L’Histoire de Manon de Kenneth MacMillan. Les adieux ne sont pas évoqués, même dans l’interview de Clairemarie Osta qui ponctue les images prises sur le vif. Seul compte le ballet, les personnages, comme si la danseuse avait évacué cette date fatidique pour se concentrer au mieux sur sa danse (et c’est d’ailleurs probablement ce qui s’est passé).

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Le documentaire suit ainsi la construction du spectacle, et se glisse là où le public ne peut jamais aller, dans l’intimité des studios. Cette première répétition est avant tout une histoire de transmission, entre une ancienne danseuse qui a beaucoup interprété ce rôle, et un couple qui veut donner sa propre version des choses. Ils n’ont pas dansé ce ballet depuis 10 ans, ils reprennent leurs marques. Et c’est assez fascinant de voir à quel point tout est déjà là. Les pas, bien sûr, mais surtout les personnages, l’émotion. Tout est déjà rempli de significations, un geste, un sourire. Les costumes et décors fastueux, s’ils participent au spectacle, ne sont presque que du superflu finalement, l’essentiel est ailleurs.

La caméra suit ainsi ce mois de répétition, en occultant soigneusement de parler du dernier jour. Place aux essayages des costumes. La robe bleu va à ravir à Clairemarie Osta, mais la robe finale ne lui convient pas tout à fait, c’est presque trop joli. Les couturières s’affairent, attentives à la moindre petite amélioration à apporter. Puis direction l’atelier des perruques. Celle aux cheveux court, la dernière, ne pose pas de problème. Les postiches du deuxième acte soulèvent plus de questions, et de quoi aura l’air le chignon ? La danseuse pense à tout, au moindre détail, pour que tout soit au mieux le jour J.

A J-12, le couple quitte son studio en solitaire pour la grande coupole, où se retrouvent tout le corps de ballet et les autres solistes. C’est là où tout se met en place, comme une ruche bourdonnante où chacun se pose avec les autres. Les morceaux du puzzle s’imbriquent, ce ne sont plus des petits bouts travaillés en studio, c’est un tout. Le lendemain sera la répétition du doute. Quelques portés posent problème à Clairemarie Osta. « Je sens comme Patty. Tu es… préoccupée« , se soucie Nicolas Le Riche. Tout ne va pas de soi, même pour les Étoiles. A une semaine de la première, direction, enfin, la scène. L’orchestre, les décors, le monde… Tout semble avoir trouvé sa place, presque comme par magie. A J-6, pré-générale, répétition qui servira de références à Clairemarie Osta. Tout ne peut pas être parfait, mais le « pourcentage de réussite » lui convient.

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Les premières représentations sont volontairement zappées pour arriver directement à la dernière, celle des Adieux. Là encore, ce mot fatidique n’est pas prononcé. Tout semble être comme une journée normale. Clairemarie Osta parle de ses gestes de façon presque banale : la confiance que l’on doit avoir avec sa maquilleuse, pourquoi le cours du matin est si important, les derniers échauffements. Pourtant, le public et les protagonistes ont dans la tête la même chose : ce jour est le jour des dernières fois. C’est la dernière fois que Clairemarie Osta parcourt ces longs couloirs, dernière fois qu’elle tourne la clé dans sa loge, dernière fois qu’elle prend son cours du matin avec le reste de la compagnie. Seuls quelques larmes furtivement effacées dans un coin de mouchoir rappellent combien cette journée est particulière.

Les quelques images des coulisses sont palpables de la tension qui peuvent y régner. Clairemarie Osta y est étrangement calme. « J’accueille mon personnage »… Le spectacle peut commencer.

Les derniers moment du documentaires sont à la fois remplis d’émotion et d’une certaine pudeur. Deux scènes se mélangent : les saluts sous les confettis, et le discours de Clairemarie Osta, une heure plus tard, alors que l’on lui remet la Légion d’honneur. Ses adieux au public, et ses adieux à ses collègues de danse. La salle est debout, les regards sont embués, la voix de l’Étoile vacille un peu, surtout lorsqu’elle évoque, pour terminer son discours, son ancienne professeure Christiane Vaussard, décédée quelques mois plus tôt. Il n’y a pourtant pas vraiment de tristesse lors de ces dernières images, il y a des sourires, et des regards tournés vers l’avenir.

J’espère que ces Adieux ne resteront pas dans les cartons de l’AROP, et bénéficieront d’une sortie DVD. Au-delà d’un beau témoignage sur Clairemarie Osta, il s’agit aussi d’un joli documentaire sur L’Histoire de Manon et sur la compagnie.

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Commentaires (7)

  • mary

    Une (autre) projection publique est-elle prévue?

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  • Nahid

    Je ne connais pas Clairemarie osta, j » adore son mari qui est un danseur extraordinaire. J’aimerai voir Manon danser par un cople qui se connaissent.
    Le couple le plus brulant pour moi ce sera toujours Bocca et Alexandra Ferri.
    Les danseuses Francaises generalement sont un peu trop froides.
    Sauf Suylvie Guillem qi est unique.

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  • Estelle

    J’espère moi aussi que ça ne restera pas dans les cartons ! J’ai envie de le voir

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  • petitvoile

    Et voici l’ex étoile filer à la direction de la danse du Cnsmdp…….

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  • a.

    eh bien, je crois que je pleurerais à chaudes larmes en regardant ce film… car c’est aussi la fin d’une génération très intellectuelle, voire spirituelle, qui pense son mouvement, on voit (on voyait?) si bien leur esprit dans leur corps… si bien qu’on finit, avec eux, par oublier que la danse est une affaire de corps, elle est avec eux l’histoire d’un esprit.
    il nous en reste encore quelques uns, de cette génération, mais quand tous seront partis, ce sera, pour moi, comme un grand vide…

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  • @ Mary : Pas à ma connaissance 🙁

    @ Nahid : J’ai découvert ce ballet à l’occasion de cette reprise, et c’est vrai que je n’ai pas été entièrement convaincue. Plus que les couples, c’était surtout l’état d’esprit général qui m’a semblé trop froid. J’ai beaucoup aimé en tout cas la proposition du couple Osta/Le Riche.

    @ Estelle : Je croise les doigts !

    @ Petitvoile : L’info a-t-elle évolué ou est-elle toujours au stade de la rumeur ?

    @ A. : Je n’ai pas bien connu cette génération, mais je trouve qu’il ne faut pas non plus enterrer toute de suite la nouvelle. Myriam Ould-Braham, par exemple, me semble tout à fait être dans ce ressenti.

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  • petitvoile

    L’info est officielle.

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