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Conseil pratique – Comment améliorer ses pirouettes

Maîtriser la pirouette semble parfois être un objectif inaccessible. Le tournis, le pied de terre qui flanche, l’impression de ne pas pouvoir y arriver… Ce seul travail abordé en cours suffit pour démoraliser un-e élève quel que soit son attente et son potentiel.

Pourtant, avec une bonne approche de ses sensations et une conscience aiguisée de son propre corps, tout le monde a ses chances de progrès. J’ai donc réuni ici quelques remarques et sensations d’élèves, avec mes réflexions et conseils pour améliorer votre technique des pirouettes. À vos chaussons !

Petit rat de l’Opéra et ancienne danseuse au Ballet de Marseille (Marie-Claude Pietragalla), Lorena Lopez est professeure de danse au conservatoire de Suresnes et à L’Institut International de Danse Janine Stanlowa.

 

« Je n’ai pas d’élan »

Le problème – Comparons le danseur et la danseuse à une toupie en métal. Pour se rapprocher au maximum de l’effet giratoire dû à la rigidité de la tige, il faut exercer par le plié un maximum d’appui au sol. Cela permet ainsi de répartir cet appui en résistance sur notre corps, c’est-à-dire notre tige. Le plié permet de prendre la force. Vous devez créer une résistance avec le sol. L’appui communiqué au corps entraîne l’immédiate sensation d’impulsion, fondamentale au tour.

Cependant, l’appui du plié est souvent peu optimisé. Pour une prise de force réussie, les articulations des jambes doivent rester dans le même plan que l’appui en évitant toute torsion. La hanche et le genou lors de la flexion se retrouvent au-dessus du pied. Vous devez sentir l’étalement de votre pied au sol dans sa totalité et veiller à ne prendre aucun appui sur son intérieur.

Mon conseil – Pour cet alignement, le meilleur regard reste celui de votre professeur-e. Pour la résistance, l’appui du plié, pensez à ralentir et à soigner la préparation du plié en prenant plus de temps que nécessaire avant d’engager votre tour.

Les genoux se situent au dessus des 5 orteils

Les genoux se situent au dessus des 5 orteils

Les genoux ne sont plus alignés, les pieds basculent sur l'avant

Les genoux ne sont plus alignés, les pieds basculent sur l’avant

« J’ai la tête qui tourne »

Le problème – La pirouette provoque souvent une sensation de vertige. Votre travail devra se porter sur votre regard, ou de façon plus globale sur votre tête. La vue, synonyme d’équilibre, influence l’oreille interne et donc la stabilité du corps. Soutenir le regard sur un point de repère durant la pirouette atténue la sensation de vertige en stabilisant l’équilibre. Ce seul atout favorisera votre nombre de tours. Plus simplement, ce sont vos yeux qui vous font tourner. Mais pour y parvenir, la mobilité de la tête est cruciale.

Mon conseil – Travaillez votre mouvement de tête en tournant lentement sur vous-même, les bras relâchés et sur vos deux pieds. Le regard prend repère sur un point précis de l’espace pour y revenir au plus vite. La tête doit toujours suivre l’intention du regard par une rotation, tant à droite qu’à gauche. Une fois cette étape réussie, accélérez le mouvement.

 

« Je préfère les bras dans cette position »

Le problème – Faire une pirouette, pas de problème, mais seulement avec une position de bras bien précise (mains à la taille, aux épaules, bras en couronne…). Il suffit que votre professeur-e change vos habitudes pour que vous soyez complètement perdu-e.

Le travail se portera alors sur un judicieux placement des omoplates en corrélation avec les épaules (ce qu’on appelle la ceinture scapulaire). Lorsqu’elle est insuffisamment maintenue, elle peut être, selon le positionnement des bras, contrariée. Étant le balancier du funambule, la maintenir permet de diminuer l’amplitude des oscillations dues aux mouvements du bassin. Les muscles grand dentelé (sous les aisselles, des côtes aux omoplates) et trapèzes doivent maintenir les épaules basses et surtout les omoplates éloignées l’une de l’autre. Comme se plaisent à le dire vos professeurs, vous aurez les épaules basses, un dos large ou encore un dos qui parle. Ce dernier sera actif et maintiendra votre ceinture scapulaire durant la pirouette.

Mon conseil – Placez un bras au-dessus de la tête tout en veillant à contrôler l’omoplate de ce même bras, par la main disponible. Descendez le bras lentement en latéral sur le côté extérieur. Au toucher, l’omoplate doit rester immobile. Continuez à descendre le bras lentement jusqu’à sa fermeture. L’omoplate ne doit toujours pas bouger. D’une manière générale, les omoplates doivent glisser vers le bas et l’intérieur du corps, comme plaquées contre les côtes. Enfin, songez à ouvrir la poitrine. Dans l’attente de ressentir cette posture, entrainez-vous à soutenir votre bras par l’arrière bras (humérus) en le pensant le plus éloigné de votre buste. Ne le plaquez pas sur vos côtes.

Le dos est plat, les omoplates sont plaquées

Le dos est plat, les omoplates sont plaquées

Les omoplates ressortent

Les omoplates ressortent

« Je ne suis pas sur mon axe »

Le problème – Le décalage de l’axe, très facile à observer, procure à l’élève une sensation parfois désagréable. La recherche d’un axe stable est un travail permanent et se trouve à l’origine d’un bon équilibre. L’ensemble du corps en est responsable.

Concentrons-nous d’ailleurs sur le centre du corps : le bassin. Comme nous l’avons vu, la prise d’élan nécessite un plié soigné. La première erreur consiste à générer une cambrure au niveau du bassin par antéversion. Cette posture décale considérablement l’axe et favorise le relâchement des muscles abdominaux. Cela participe à rompre l’alignement du bassin et du genou. Votre pied est soumis à réduire la prise de force de son appui ce qui favorise l’apparition de micros torsions.

La deuxième erreur récurrente provient généralement de la jambe qui se lève (la jambe extérieure à la jambe de terre). Du fait de sa position haute, le décalage de l’axe est souvent dû à un mauvais positionnement du bassin provoqué par une contraction des fessiers ou un relèvement de la hanche. La jambe doit trouver sa hauteur en prenant le mouvement par le pied, voir par le genou.

Mon conseil – Lorsque vous travaillez vos équilibres et vos levés de jambes, prenez comme repère votre ceinture de jupette ou de short pour veiller à la maintenir parallèle au sol. Enfin, travaillez le gainage de votre buste et de vos abdominaux.

Le bassin est sur la jambe d'appui, l'académique ne présente pas de plis

Le bassin est sur la jambe d’appui, l’académique ne présente pas de plis

Le bassin est décalé vers la jambe extérieure, l'académique présente des plis à la hanche

Le bassin est décalé vers la jambe extérieure, l’académique présente des plis à la hanche

« Je n’arrive pas à placer mon autre jambe »

Le problème – Revenons à cette jambe dite extérieure, souvent difficile à placer. Pour une pirouette où la jambe extérieure touche la jambe pivot durant le tour (tour à la cheville, tour au genou…), le travail doit toujours se baser sur une position saine du bassin (voir ci-dessus). Cependant, lorsque la jambe extérieure s’écarte involontairement de la jambe pivot, le travail visera ce que j’appelle le temps d’équilibre. Cet exercice implique de maintenir cette jambe un maximum de temps. Cela entretient l’endurance et engendre un renforcement musculaire de votre jambe dans cette position.

Mon conseil – C’est le travail de base de l’équilibre. À vos barres… Prêts… Restez !

« J’ai mal au pied sur lequel je tourne »

Le problème – Parfois, les élèves se plaignent de douleurs durant les tours. Souvent, il s’agit de la voûte plantaire comprimée par les 1⁄2 pointes. À cet endroit et par réaction au travail, la peau forme de la corne. Apres une interruption ou une période de repos prolongée, les cornes disparaissent et laissent votre pied sans protection. Dans le cas d’un travail régulier, le pied restera protégé et donc sans douleur.

Pour les tours réalisés pieds nus, utilisez du talc. Pour les douleurs au tendon d’Achille, soyez vigilants aux tendinites et aux déchirures. En effet, il est primordial de solliciter les muscles responsables de la flexion plantaire assurant un maintien du pied de votre jambe pivot. Dans le cas contraire, le pied risque de subir des torsions et de solliciter injustement le tendon d’Achille. Spécialement pendant la rotation du tour, les trois articulations de la jambe pivot (hanche, genou, cheville) ne doivent jamais quitter leur alignement.

Mon conseil – Réceptionnez tous vos mouvements les talons posés. Au repos ou au changement de position, le pied garde ses trois points d’appui au talon, au gros orteil et au petit orteil, formant le polygone de sustentation. L’échange avec votre professeur sera le meilleur garant de ce travail.

« Et ma réception ? »

Le problème – Tourner, c’est bien. Arriver proprement et sans sautiller, c’est encore mieux. Pour optimiser votre réception, pensez à décomposer votre descente. La jambe de terre sera la première jambe de réception. Une fois la seconde jambe au sol, enclenchez le frein par le plié. En pliant, descendez votre centre de gravité pour gagner un maximum d’adhérence au sol. La descente doit être pensée comme une absorption de l’inertie des jambes uniquement. Le buste et les bras restent maintenus dans leur position. Le bas du dos ne doit pas afficher de cambrure. Enfin, avant de débuter la réception, tentez de maintenir votre point d’équilibre.

Mon conseil – Même si une réception soigneusement effectuée est proportionnelle à la réussite d’une pirouette. Réceptionner une pirouette nécessite un véritable travail. Dissociez votre travail avec d’un côté les tours et de l’autre la réception. Si le tour enchaîne avec un saut, assemblez vos jambes et vos pieds lors de la réception puis insistez sur le plié.

« Je n’y arriverai jamais »

Le problème – L’idée même de réaliser un tour correct vous semble tout simplement infaisable. Mais ne vous découragez pas, avec de la volonté et du travail, il n’y a aucune raison de ne pas y arriver. Cependant, il faut éviter de tomber dans l’obstination, car cela ajouterait de l’appréhension et pourrait engendrer de nombreux blocages corporels.

Mon conseil – Votre respiration. Respirez pendant l’effort ! La prise des tours provoque souvent l’apnée. Réfléchissez à votre respiration durant votre danse.

 

Le conseil perso de François Alu, Premier Danseur au Ballet de l’Opéra de Paris :

« J‘ai un ami cubain, qui comme beaucoup de cubains tourne très bien. Il disait : « If you have to fall, just get up! » (Si tu tombes, relèves toi!). Je trouve que cela résume bien l’état d’esprit du danseur à l’abord d’une pirouette« .

 

Vous rencontrez un problème technique dans votre pratique de la danse ? Vous aimeriez quelques conseils ? Posez votre question en commentaires, elle servira peut-être pour un prochain article « Conseil pratique ».




 

Commentaires (15)

  • Pascale

    Ah lala.. les pirouettes : un cauchemar pour moi ! Je vais lire et relire cet article et surtout pratiquer !!
    Merci pour ces bons conseils

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  • LorenaDanse

    J’espère que ce sera le début d’un doux rêve, restez optimiste! Merci beaucoup

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  • Catoucat

    Quelques bons conseils glanés pendant des cours aux USA:

    – pour avoir de l’élan tout en gardant l’équilibre: dès le début du tour, fermer le bras de la jambe de terre en 1ère, et imaginer qu’il ne fait qu’un avec l’épaule (il faut qu’il reste solide et vraiment encastré au buste pour lui transférer son élan)

    – pour garder l’équilibre et ne pas pencher du côté de la jambe de terre, imaginer qu’on appuie sur votre épaule de la jambe en retiré

    – pour finir proprement un tour: la pirouette ce n’est pas le tour mais la fin du tour! Il faut évidemment regarder le point fixe à l’arrivée et penser qu’il ne faut pas atterrir mais rester en retiré face à ce point fixe, avant de poser délicatement le pied au sol 😉

    – pour faire plusieurs pirouettes sans perdre la concentration (et tomber lamentablement): à chaque fin de tour, dire un mot devant son point fixe (ex: « je – peux – y – arriver » pour 4 pirouettes)

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    • Amélie Bertrand

      @ Catoucat : Merci pour vos conseils 😀

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  • Merci Lorena, pour ces bons conseils, et au plaisir de te croiser au conservatoire de Suresnes (je suis le cours adultes de Nathalie et vais tâcher de me souvenir de tout ça pour améliorer mes pirouettes, qui en ont bien besoin).

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  • Des conseils utiles tant aux danseurs débutants qu’aux danseurs confirmés et toujours bons à se remettre en tête.
    Merci

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  • LorenaDanse

    Merci @Catoucat pour les conseils, j’espère qu’avec tout ça les progrès sont au rendez vous de certains lecteurs

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  • GuillonAudrey

    Bonjour,
    ma prof de danse me dit toujours que je ne danse pas en globalité, comme un pantin désarticulé. Notamment mes bras qui sont déconnectés du reste du corps. Pourtant je pratique la danse depuis 10 ans….
    Merci de votre réponse.
    Audrey

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    • Éléonore5

      Bonjour,
      Est- ce un problème de coordination ou non?
      Si c’est le cas il faudra vous entraîner en particulier sur les ports de bras!(Pas de remède miracle tristement…)
      Si ce n’est pas cela, alors pensez à ce que vous éprouvez quand vous dancez, et surtout pensez à danser jusqu’au bout des doigts. Je tiens ses conseils de professeures de danse et cela m’a beaucoup aidé.
      J’espère que se sera le cas pour vous.

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  • LorenaDanse

    Bonjour Audrey,
    Si votre professeur trouve que vos bras sont déconnectés du corps, je pense que c’est de façon général et pas uniquement sur les pirouettes. Dans un premier temps, analysez comment vous passez vos bras entre 2 positions. Lors des positions de bras, visualisez le dessin crée et évitez les excès (position trop sur l’arrière, ou trop haute).
    Enfin si votre professeur vous le signale durant les pirouettes, il est possible que vous preniez trop d’élan avec vos bras, ou que vous retardiez votre fermeture de bras.
    Je vous invite à lire l’article du mois de mars sur les bras et je reste à votre disposition.
    Merci

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  • Clothilde

    Merci Lorena pour tes conseils très utiles ! ❤️❤️❤️ A mercredi 😉

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  • Morgane

    Bonjour,

    Ma professeure me dit que je prends trop de force avant un tour, du coup, j’ai bcp d’élan et j’en fais même pas un proprement
    De plus, la jambe en l’air ne fait jamais un retiré propre au genoux, je despère. 15 ans de danse et aucune amélioration.

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  • Després Alain

    Bonjour je m’appelle Alain, je prépare le diplôme d’État au CND, l’autre jour j’ai placé dans un enchaînement un tour enveloppé en dedans qui finit en demi pointes cinquième pour bien faire travailler le poser des talons avant de plié, c’est un tour arrêté donc en cinquième. Certains de mes collègues assurent que ce genres de tour n’est pas académique, j’aurais voulu avoir votre avis et vos conseils. J’avais appris ce tout à l’Opéra et je pense qu’il est toujours efficace qu’en pensez vous ?

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  • daniel taboga

    ouais generalement quand je regarde les videos de tour cela n’est pas bon du tout et on peut remarquer que la tete n’y est pas… je vous propose de regarder une video d’alicia alonso demontrant l’attaque des pirouettes..avec cette technique des eleves qui ne tournaient pas ont pu tourner sans probleme …le probleme est souvent le bras, qui lorsque vous partez pour la pirouette, est stoppé il faut le laisser partir en meme temps que le corps le tete restant biensur mais regardez la video et vous comprendrez

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    • Alexandra

      Bonsoir,
      Pourriez-vous m’indiquer le lien de cette vidéo svp ?
      Merci.

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