Tanztheater Wuppertal Pina Bausch – Für die Kinder von gestern, heute und morgen
Après les oeillets, place au château de sable ! Le Tanztheater Wuppertal de Pina Bausch s’est installé sur Paris pour deux oeuvres très fortes : Nelken d’un côté et sa forêt de fleurs roses, Für die Kinder von gestern, heute und morgen (« Pour les enfants d’hier, d’aujourd’hui et de demain ») de l’autre, et son décor blanc mouvant où les interprètes deviennent parfois de véritables enfants.
Les chroniques d’un spectacle de Pina Bausch sont toujours un peu compliquées à écrire, car j’ai l’impression d’y mettre toujours les mêmes idées. Ce regard féroce mais à la fois si tendre sur les gens. Nos travers mis en lumière, notre amour aussi, notre imagination, notre folie. Aller voir un Pina Bausch fait toujours du bien, comme une douce thérapie. On en ressort non seulement plus joyeux-se, mais aussi avec une foi renouvelée en l’humanité (oui nous sommes stupides. Mais au fond, l’être humain est quelqu’un de bien qui ne cherche qu’à trouver sa place).
Für die Kinder von gestern, heute und morgen contient, en trois heures, les clés et tics habituel-le-s de Pina Bausch : l’absurdité, les saynètes qui se succèdent, le comique de répétition, les scènes parlées où les interprètes se confient, ce mélange de douleur et de folie, les robes ballprom (que je veux toutes dans mon placard) pour les femmes et les looks old school pour les hommes. Les danseurs et danseuses semblent parfois retomber en enfance : c’est une course en planche à roulettes, un caprice, un château de sable. Chacun-e s’invente une histoire, comme les enfants le font lorsqu’ils sont seuls dans leur chambre. La pièce peut aussi se voir comme un hommage aux interprètes de Pina, ceux d’hier, d’aujourd’hui et de demain. Les générations se mélangent d’ailleurs, entre nouvelles têtes et présent-e-s de la première heure. Dominique Mercy ou Nazareth Panadero donnent le ton, si indissociables de toutes les pièces de Pina Bausch.
« Tanztheater » signifie « théâtre dansé ». Si Nelken porte plus vers le théâtre, Für die Kinder von gestern, heute und morgen contient de nombreux passages dansés, et c’est peut-être ce qui surprend le plus pour une pièce récente dans la carrière de la chorégraphe (créée en 2002 ). Ces moments sont d’ailleurs les plus prenants. Cela commence par un premier solo de Ditta Miranda Jasjfi qui ouvre le bal. Puis ce sont des ensembles vivants et joyeux qui concluent la première partie. C’est enfin un superbe final, ou quelques danseur-se-s se croisent dans une énergie fulgurante. On ne sait pas bien ce qui les anime, tristesse ou bonheur, nostalgie ou vitalité. Ils offrent en tout cas un superbe élan, si rempli d’humanité qu’il pourrait ne jamais s’arrêter.
Für die Kinder von gestern, heute und morgen de Pina Bausch par le Tanztheater Wuppertal, au Théâtre de la Ville. Avec Pablo Aran Gimeno, Rainer Behr, Clémentine Deluy, Lutz Förster, Ditta Miranda Jasjfi, Dominique Mercy, Pascal Merighi, Breanna O’Mara, Nazareth Panadero, Helena Pikon, Azusa Seyama, Julie Anne Stanzak, Michael Strecker, Fernando Suels Mendoza, Kenji Takagi et Paul White. Jeudi 21 mai 2015.