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La Giselle d’Isabella Boylston, nouvelle Étoile américaine de l’ABT

Isabella Boylston entretient un rapport tout particulier avec Giselle : c’est à l’issue d’une représentation de ce lors de la saison de printemps 2014 qu’elle fut nommée Principal de l’American Ballet Theatre. (l’équivalent d’Étoile). C’est dire qu’elle avait à cœur de reprendre ce rôle cette année, d’autant plus qu’elle est aujourd’hui la star montante de la compagnie après les adieux cette saison de trois ballerines qui ont fait l’histoire récente de l’ABT, Julie Kent, Xiomara Reyes, Paloma Herrera. Dans un environnement dominé par les danseuses russes, Isabella Boyslton a la lourde tâche de représenter la relève américaine de l’ABT.

Isabelle Boylston- Giselle-ABT

Isabella Boylston – Giselle -ABT

Giselle, c’est un peu le rendez-vous obligé des saisons de printemps de l’American Ballet Theatre, un blockbuster pour remplir le Metropolitan Opera et donner l’occasion de proposer un plateau  de danseur-se-s unique au monde grâce à la politique d’artistes invités. Entre Diana Vishneva et Natalia Osipova, il faut parvenir à trouver sa place et son interprétation.

Et si Giselle fascine à la fois ses interprètes et le public, c’est parce que c’est un ballet unique, d’une richesse inégalée : l’amour, la mort, la jalousie, la vengeance, la rédemption, tout y est ! Cela exige des qualités techniques et artistiques d’un niveau qui en fait l’un des ballets les plus difficiles du répertoire. Car à y regarder de plus près, ce sont presque deux ballets en un. Le premier acte se suffit presque à lui même et requiert des danseur-se-s qui doivent imposer d’emblée leurs personnages et leurs richesses psychologiques. Le second est une démonstration de pure danse où la moindre erreur technique peut être fatale.

Devon Teuscher (Myrta)- Giselle-ABT

Devon Teuscher (Myrta) – Giselle -ABT

Et ce sont bien deux ballets que j’ai vu sur la scène du MET ou du moins deux séquences bien différentes. Certes, Isabella Boylston irradie dès son entrée. Elle est dotée d’un charisme exceptionnel mais cela ne suffit pas à rendre crédible son incarnation de Giselle : trop noble, un peu hautaine, son interprétation frise le contresens et on ne comprend jamais comment elle peut tomber amoureuse d’Albrecht, interprété par Alexandre Hammoudi. Ce dernier paraît de bout en bout empoté, sans personnalité et très mal à l’aise sur scène lorsqu’il ne danse pas. Or c’est là un travail essentiel pour construire un personnage dans un ballet narratif : rester immobile et inexpressif nuit à la qualité dramatique du ballet.

L’Hillarion de Roman Zhurbin n’est pas plus convaincant. Quant à la pantomime, ce bijou du ballet romantique, elle est exécutée mécaniquement, sans âme, sans intention et donc incompréhensible pour ceux qui ne connaissent pas le ballet. Le seul vrai moment de grâce de ce premier acte est dû à Skylar Brandt et Arron Scott qui délivrent un Pas de deux des vendangeurs virtuose et n’ont aucun mal à voler la vedette. Le rideau se referme ainsi sur une impression d’inachevé.

Mais c’est un tout autre spectacle qui débute avec le deuxième acte. Devon Teuscher tout d’abord est une Myrta phénoménale : elle vole littéralement en Reine des Wilis. Sa technique impeccable et son autorité naturelle donnent le ton de cette deuxième partie et dopent littéralement la troupe et les solistes. Le corps de ballet sort ainsi grandement applaudi, et à juste titre, avec un sans faute de la danse des Wilis, si emblématique de ce ballet.

Les Wilis- Giselle-ABT.

Les Wilis – Giselle – ABT.

Et Isabella Boylston révèle – enfin ! – son singulier talent. Autant elle semblait peu à l’aise en paysanne, autant sa danse est précise, nuancée, infiniment poétique dans ce deuxième acte. Le geste est abouti, musical et parvient à faire naitre l’émotion. Même son partenaire, Alexandre Hammoudi paraît transfiguré et libéré du trac qui plombait son premier acte.

Sans doute attendait-on un peu trop de la reprise de Giselle par Isabella Boylston. Elle aura pas éclipsé les prestations magistrales de ses ainées Julie Kent, Paloma Herrera et Xiomara Reyes  qui ont toutes les trois une dernière fois livré leur interprétation de ce rôle phare du répertoire. Avec leur départ, Isabella Boylston est désormais un pilier de l’ABT, à revoir avec grand plaisir cet automne au David Koch theater où se prolongeront les festivités du 75ème anniversaire de l’ABT. Si sa Giselle n’est pas entièrement convaincante, ses prouesses techniques et sa danse généreuse en font une des danseuses à suivre au sein de l’American Ballet Theater.

Isabella Boylston-Giselle-Acte2-ABT

Isabella Boylston – Giselle – Acte2 – ABT

 

Giselle de Kevin McKenzie par l’American Ballet Theater au Metropolitan Opera- Isabella Boylston ( Giselle), Alexandre Hammoudi( Albrecht), Roman Zhurbin (Hillarion), Devon Teuscher (Myrta)-représentation du 23 mai 2015/14H

 

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