Concours interne de promotion 2015 du Ballet de l’Opéra de Paris : résultats des danseurs
Le Concours Interne de promotion 2015 du Ballet de l’Opéra de Paris se tient pour les danseurs le vendredi 6 novembre (à lire : le résultat des danseuses)
Le jury est présidé Stéphane Lissner (Directeur de l’Opéra de Paris). Il était composé de Benjamin Millepied (Directeur de la Danse), Benjamin Pech (Danseur Étoile et « collaborateur artistique du Directeir de la Danse », un nouveau statut), Yuri Fateyev (Directeur du Ballet du Mariinsky), Noëlla Pontois (Danseuse Étoile et pédagogue), en suppléant Lionel Delanoë (Maître de ballet), et des danseurs et danseuses Laura Hecquet, Ludmila Pagliero, Lucie Clément, Sabrina Mallem et Alexis Renaud (suppléante Muriel Zusperreguy).
N.B. : Merci de rester MODÉRÉ-E dans vos commentaires. Ne pas être content-e des résultats ne justifie pas d’écrire des propos blessants sur les danseuses.
Résultats des Quadrilles
Deux postes de Coryphées à pourvoir. Variation imposée : La Belle au bois dormant, variation de Prince de l’acte II, chorégraphie de Rudolf Noureev.
1. Paul Marque, promu Coryphée (à l’unanimité)
2. Pablo Legasa, promu Coryphée (à l’unanimité)
3. Takeru Coste
4. Axel Magliano
5. Cyril Chokroun
6. Antonio Conforti
La classe des Quadrilles a été très agréable à regarder, comme l’ensemble du Concours des danseurs d’ailleurs. Chacun s’est illustré dans sa variation imposée (aucun gros plantage, même si certains ont une danse plus affinée que d’autres) et chacun a montré beaucoup d’engagement dans sa variation libre. Beaucoup de jeunes recrues étaient sur scène, c’était pour eux le premier ou deuxième Concours.
La première place de Paul Marque, et à l’unanimité, est une évidence. Ce jeune danseur a non seulement une belle technique, mais aussi, déjà, une âme d’artiste qui se voit. Il y a avait dans son Siegfried les prémisses d’une grande interprétation qu’il pourrait en donner dans quelques années. La deuxième place était moins évidente, dans le sens où plusieurs auraient pu prétendre à l’avoir. Malgré des réceptions un peu bruyantes, Pablo Legasa proposé une belle variation de James, avec du brio. Il avait manqué la promotion de peu l’année dernière, c’est une belle réussite pour lui cette année. Deux noms en tout cas à suivre de près, il serait étonnant que ces deux danseurs s’arrêtent au stade de Coryphée.
Axel Magliano n’a pas démérité non plus, avec une belle variation de Tchaïkovski – Pas de deux, dansé avec beaucoup d’engagement. Antonio Conforti aurait pu prétendre à une meilleure place, sa variation de Don Quichotte était tout de même bien envoyée, c’est aussi un danseur qui a une belle musicalité. Cyril Chokroun était un peu limite techniquement, mais il a pris visiblement un grand plaisir à danser Dances at a Gathering, et il a su créer un joli moment.
Takeru Coste ne pouvait prétendre à monter au vu de sa variation imposée, trop en-deçà des autres. Mais quelle variation libre ! Quelle personnalité ! Ce sont ces instants magiques du Concours. Parfois, un artiste entre en scène, il instaure une ambiance dès son premier regarde, il danse, et l’on oublie justement que l’on est en Concours. Son extrait de Speaking in Tongues était très fort, poignant. Qui je suis, pourquoi je danse, qu’est-ce que j’ai au fond de moi… Sa troisième place, au pied des recrues, est une belle récompense. Espérons que cela se concrétise par des rôles.
Variations libres choisies par les Quadrilles :
Pablo Legasa : La Sylphide, acte II, première variation de James (Pierre Lacotte)
Isaac Lopes Gomes : Dances at a Gathering, deuxième variation du Danseur en brun (Jerome Robbins)
Axel Magliano : Tchaïkovski – Pas de deux (George Balanchine)
Paul Marque : Le Lac des Cygnes, acte III, variation de Siegfried (Rudolf Noureev)
Antonin Monié : Pusch Comes to Shove (Twyla Tharp)
Jean-Baptiste Chavignier : La Bayadère, acte II, variation de Solor (Rudolf Noureev)
Cyril Chokroun : Dances at a Gathering, première variation du Danseur en brun (Jerome Robbins)
Antonio Conforti : Don Quichotte, acte I, variation de Basilio (Rudolf Noureev)
Takeru Costes : Speaking in Tongues (Paul Taylor)
Julien Guillemard : Paquita, acte II, grand pas, variation de Lucien d’Hervilly (Pierre Lacotte)
Résultats des Coryphées
Un poste de Sujet à pourvoir. Variation imposée : La Sylphide, variation de James de l’acte I, chorégraphie de Pierre Lacotte.
1. Jéremy-Loup Quer, promu Sujet
2. Hugo Vigliotti
3. Antoine Kirscher
4. Florent Melac
5. Yvon Demol
6. Mickaël Lafon
Là encore, une belle classe, très agréable à regarder, et de belles variations de James en imposée. Deux noms ressortaient pour moi à l’issue des épreuve : Hugo Vigliotti pour la forte personnalité, Jéremy-Loup Quer pour la technique brillante. Il était difficile de les départager sur leur imposée, tout deux étant très bons. C’est le deuxième qui a été choisi, même si ce n’est pas lui qui a montré une plus grande personnalité artistique. Mais il n’y a rien à redire, ce danseur a du charisme en scène et du brio. Choisir Mats Ek était-il un bon choix ? Hugo Vigliotti a dansé quelque chose de très personnel, de très engagé. Et c’est ce que j’aime. Peut-être fallait-il quelque chose de plus brillant pour passer Sujet ? Quel dommage, toutefois, qu’il doive attendre encore un an (s’il y a assez de place l’année prochaine), c’est un artiste rare. Espérons là-aussi que sa deuxième place lui ouvre les portes de beaux rôles (Mercutio par exemple).
Antoine Kirscher a montré beaucoup d’engagement dans ses deux variations, et une belle technique dans le Grand Pas classique. Mais le tout jeune danseur était parfois un peu scolaire. Il a besoin de prendre de la maturité de l’expérience. Il n’y a pas de doute qu’une place de Sujet (voir plus) l’attende assez rapidement, c’est un jeune talent à suivre. Quelle belle génération de jeunes danseurs au passage, l’avenir s’annonce bien.
Florent Melac, Yvon Demol et Mickaël Lafon ont tous les trois montré de l’engagement et de personnalité dans leur variation libre. Le stress de ne pas réussir un passage technique ne se voyait pas, chacun dansait, vraiment.
Variations libres choisies par les Coryphées :
Antoine Kirscher : Grand Pas Classique (Victor Gsovsky)
Mickaël Lafon : Le Lac des Cygnes, variation de Rothbart (Rudolf Noureev)
Florent Melac : Le Lac des Cygnes, acte I, variation lente de Siegfried (Rudolf Noureev)
Jérémy-Loup Quer : Esmeralda, variation du Pas de deux (Marius Petipa)
Hugo Vigliotti : Appartement, variation de la Télévision (Mats Ek)
Yvon Demol : Dances at a Gathering, première variation du Danseur en brun (Jerome Robbins)
Résultats des Sujets
Un poste de Premier danseur à pourvoir. Variation imposée : Sylvia-Pas-de-deux de George Balanchine.
1. Hugo Marchand, promu Premier danseur
2. Fabien Révillion
3. Germain Louvet
4. Marc Moreau
5. Florimond Lorieux
6. Sébastien Bertaud
Quelle belle classe des Sujets, là encore ! On avait l’impression que tout le monde savait que c’était joué d’avance (la place pour Hugo Marchand), alors autant se faire plaisir. De l’engagement, beaucoup de musicalité, de la personnalité, chacun a pu s’exprimer.
D’ailleurs, au vu uniquement du Concours, il était difficile de dire à qui irait la place. Hugo Marchand a très bien dansé, il a montré un grand sens du style et une danse élégante dans son Jerome Robbins. Son travail sur la saison lui donne la place. Mais Sébastien Bertaud a aussi été brillant. Il a dansé son imposée différemment des autres, une pointe de style en plus, des épaulements plus marqués. Surtout sa libre, A suite of Dances, était à couper le souffle. Comme pour Takeru Voste, le Concours s’est évaporé le temps de quelques minutes. Chaque geste respirait avec la musique, chaque pas avait une intention. La musique s’emballe, les fouettés s’emballent… Quelle émotion ! Digne d’un grand danseur avec beaucoup de maturité. Sa sixième place paraît ainsi un peu dure.
Fabien Révillion a dansé brillamment, mais a pris moins de risques dans l’interprétation, a fait preuve de moins d’engagement personnelle. Germain Louvet avait une danse pleine de promesses, si musicale dans Jerome Robbins. Une place de Premier danseur devrait lui revenir très vite. Florimond Lorieux a aussi montré beaucoup de personnalité, Marc Moreau aussi, même s’il paraissait plus juste techniquement.
Une pensée enfin pour Allister Madin, qui s’est blessé lors de son premier passage et a dû quitter la scène pendant sa variation. En espérant que le danseur soit sur pieds pour La Bayadère.
Variations libres choisies par les Sujets :
Florimond Lorieux : The Four seasons, variation de l’Automne (Jerome Robbins)
Germain Louvet : Other Dances, deuxième variation (Jerome Robbins)
Allister Madin : Speaking in Tongues (Paul Taylor)
Hugo Marchand : Dances at a Gathering, première variation du Danseur en brun (Jerome Robbins)
Marc Moreau : Études, Mazurka (Harald Lander)
Fabien Révillion : La Sylphide, acte II, deuxième variation de James (Pierre Lacotte)
Daniel Stokes : Roméo et Juliette, acte I, première variation de Roméo (Rudolf Noureev)
Sébastien Bertaud : A suite of Dances, première variation (Jerome Robbins)
Yannick Bittencourt : Dances at a Gathering, première variation du Danseur en brun (Jerome Robbins)
Bravo à tous les danseurs, quel que soit le résultat !
a.
Le billet des garçons est tt de mm bcp moins commenté que celui des filles… 🙂
P.C
Paul a été tout simplement époustouflant. Il a balayé d’une danse ses adversaires dont Legasa. L’unanimité n’est pas inattendue. Pour une des rares fois le concours correspond à la réalité. Il fera un grand danseur….
Agnès
Moins commenté parce qu’ils sont tous magnifiques … Dans la digne lignée de Laurent Hilaire, Kader, Wilfrid Romoli, Manuel Legris… Nicolas Le Riche, et tous ceux que nous avons tant aimés. Même si j’ai un petit faible pour Marc Moreau. Le choix a dû être difficile… Rien à voir avec le favoritisme flagrant et si injuste du choix des premières danseuses.
Aoudia
Bravo à tous! Petite pensé à Antonio Conforti bon courage pour la suite!
Lili
Il semble que les résultats soient moins discutés… Car sans doute font-ils l’unanimité !!
Quand je vois la liste des sujets, wahou quelle classe !!! L’avenir s’annonce bien, que de talents !! Nous avons de la chance, le corps de ballet, en tout cas pour sa partie messieurs, est un régal à regarder. Sans doute que la danse étant moins pratiquée par les garçons (hélas), des personnalités plus fortes et originales y sont valorisées… Chez les filles, j’ai toujours l’impression de voir certes l’excellence, mais plus de « lisse », moins de caractères affirmés… Mais c’est un avis peu expérimenté j’avoue…
Bravo à tous en tout cas.
Claude ROZSA
Quel métier, quel travail! Je ne suis pas danseur, j’en ai fait très tardivement pour le seul plaisir et j’ai compris ce que cela représentait. Que de publics sévères et inconséquents dans leurs propos. Je n’oublierai jamais cette soirée au retour d’une représentation de la Belle au bois dormant qui faillit par deux fois tourner au désastre: l’un des sabres de princes qui tombe et évidemment juste dans leur variation à quatre les obligeant à viser pour ne pas se prendre les pieds dedans (j’étais au premier rang à Bastille) puis ce fût l’horreur quand la barque menant le prince vers la château s’approche inexorablement de la rampe et s’arrête à quelques cm du bord de la rampe manquant de basculer dans la fosse d’orchestre! Rentrant chez moi en métro dans le compartiment un groupe de spectateurs commençaient à faire leurs remarques sévères et blessantes tandis que j’observais à coté de moi une jeune fille progressivement au bord des larmes. Je ne pus m’empêcher de remettre les spectateurs à leur place, leur rappelant ce que tenir deux heures et demi en scène représentaient de travail, de concentration, d’épuisement physique; en sortant du wagon la jeune fille vient vers moi et me remercie, elle faisait partie du corps de ballet et me dit « nous sommes épuisés entre les concours et les représentations de fin d’année on en peut plus, ça m’a fait du bien de voir qu’il y avait encore des spectateurs qui comprennent que nous ne sommes pas des machines… ». J’ai eu la chance inouïe dans ma vie de voir danser les plus grands.Mon premier ballet fut donné à la cour carré du Louvre par la troupe du Marquis de Cuevas, c’était en 1955, sur scène devant la façade illuminée Talchieff, Skibine et Golovine. Jean Martinon dirigeait. J’ai encore dans mes yeux de 14 ans la vue époustouflante de ce Roméo et Juliette de Berlioz, où lors du bal chez les Capulets les danseurs sortaient par le fenêtres de la façade descendant deux rampes symétriques de part et d’autre du plateau supérieur. Plus tard c’était lors du songe un effet magique de dédoublement quand les deux étoiles apparaissaient derrière leurs doublure couchés tous deux dans la scène de la Reine Mab faisant apparaître les âmes des deux amants. Je me souviens des Indes Galantes dans la productiond de Maurice Lehmann et les décors des grands peintres de l’époque, Chapelin Midi, Carzou, et bien d’autres, Lifar et Vyroubova en scène. Le jeudi je faisais la queue l’après midi pour avoir un fauteuil de poulailler et voir les après midi de ballet; la première version du Palais de Crystal, La symphonie en Ut de Franck, Apollon Musagette, Le fils prodique et bien d’autres; plus ce furent Chauviré, Pontois, Thesmar, Atanassof, Denard. Merci à tous pour ces souvenirs impérissables et bonne chance à tous ces jeunes qui nous permettent d’oublier pendant deux heures nos soucis, un monde ou l’éthique et la compétence et l’amour et la passion du travail poussé jusqu’au bout des pointes de pied semblent devenir l’exception.
Claude ROZSA-Paris
Claude ROZSA
Je voudrai rajouter à mon précédent commentaire mon impression à la lecture de ceux déjà postés. Je n’ai pas vu les concours et ne me permettrai pas de juger des choix du jury. Néanmoins je crois percevoir dans nombre de commentaires la réaction que j’ai personnellement au vue de certains artistes du comportement de spectateurs.
Tout comme pour les solistes des concours d’instruments de musique, la tendance aujourd’hui va à donner dans les concours la préférence à la virtuosité au détriment de l’inspiration et du ressenti. On a tendance à oublier dans les jurys que à force de travailler la technique je dirai que n’importe quel candidat peut par exemple jouer un Rachmaninov ou un Chopin ou un Liszt à la vitesse de la lumière. Il semble en aller de même dans la danse. On oublie hélas que la maturité n’est pas forcément acquise à 18 ou 20 ans et c’est elle qui va faire la différence. Rares sont ceux ou celles qui peuvent prétendre à cette âge d’avoir ce vécu qui permet de puiser dans ses souvenirs d’adulte voire même d’enfant ce qui permettra à une Odette d’être cynique et fourbe à souhait comme a su si bien le capter François Roussillon dans le Lac dansé par Letestu, ou pour un violoniste une Sophie Mutter dans les sonates pour piano/violon de Beethoven au TCE il y a quelques années. La virtuosité nous éblouit, mais nous donne-t-elle de l’émotion? Ce n’est pas certain. Le ballet n’est pas que de la danse, mais comme pour l’opéra c’est du théâtre auquel on a adjoint de la musique d’un coté, du mime de l’autre ou des paroles chantées sur un sujet précis pour l’opéra. Réduire la compétition et éventuellement la promotion à l’âge (voir le jeunisme ambiant dans tous les domaines au détriment de l’expérience) et un trente deux fouetté techniquement parfait, me parait un peu court. A l’opéra monsieur Alagna pourra chanter aussi fort qu’il le voudra cela n’empêchera pas que très souvent on à l’impression qu’il ne comprend pas son texte et que ce serait le bottin mondain on n’en verrait pas la différence. Enfin il y a cette manie de tous les nouveaux directeurs et M. Millepied semble prendre d’après ce que je lis ici le même pli, à savoir démolir, « rajeunir », « dépoussiérer » quand on arrive dans une organisation comme si le travail de plus de vingt ans de son prédécesseur avait été nul.
Grâce à son école de danse dirigée successivement par Bessy et Platel, à Brigitte Lefèvre par ailleurs, le ballet de l’opéra de Paris peut s’enorgueillir d’être la plus fabuleuse troupe du monde. J’ai vu le Bolchoï, le Kirov, l’ABT ou le NCY et le San Francisco ou Londres pour ne citer que quelques uns et pour moi sans le moindre nationalisme la troupe de l’Opéra de Paris est d’une qualité sans comparaison et où contrairement à bien d’autres compagnies le star system mettant en valeur les étoiles et oubliant derrière le corps du ballet sans qui elles ne pourraient briller, a été mis largement au second plan.
Je regardais hier un long documentaire sur Nicolas Leriche alors agè de 26-28 ans et me disait combien ce métier était cruel en pensant pourtant à l’inoubliable soirée de ses adieux l’an dernier. Hélas comme disait Racine « il avait des ans subi l’irréparable outrage ». Mais par contre la démonstration était faite qu’il avait gardé grâce à près de 20 ans de plus, l’intensité dramatique plus difficile à rendre à 20 ou 26. Son »jeune et la mort » m’a fait pleurer tout bêtement même vu de la galerie!
Reste aussi à espérer que le ballet ne prendra pas le pli désastreux des opéras aux mises en scène délirantes comme celles de monsieur Olivier Py pour des œuvres comme Aida, ou Mathis le Peintre truffé de chars d’assaut et de SS Nazi pour nous raconter une histoire se passant au XVIIe siècle!
Bonnes fêtes à tous