Prix de Lausanne 2017 – Rencontre avec le candidat Younès Attoum
Après Louise Coquillard, rencontre avec un autre candidat français participant au Prix de Lausanne 2017 : Younès Attoum. Élève à l’École Nationale Supérieure de Danse de Marseille, âgé de 17 ans, il nous raconte ses ambitions au Prix de Lausanne et sa deuxième journée de concours.
Comment avez-vous commencé la danse ?
J’ai commencé la danse à 8 ans, chez moi à Roanne. Ma meilleure amie était dans ma classe. On s’amusait souvent à sauter et danser pendant la récréation. Sa maman était professeure de danse, elle m’a proposé de venir faire un essai dans son école. De là, tout a commencé. Au début, mes parents n’y croyaient pas forcément. Mais quand ils ont vu que j’étais passionné et que c’était vraiment ce que je voulais faire, ils m’ont suivi. Je suis resté de 8 à 14 ans dans cette école.
Comment êtes-vous arrivé à l’École Nationale Supérieure de Danse de Marseille ?
Mon école était une école privée, j’y étais le seul garçon. Ma professeure m’a dit que si je voulais devenir danseur, je devais intégrer une école supérieure. J’ai présenté l’École Supérieure de Danse de Cannes Rosella Hightower et l’École Nationale Supérieure de Danse de Marseille. J’ai été pris aux deux et j’ai choisi Marseille. Nous avons 25 heures de cours de danse par semaine. C’est soit danse le matin et lycée l’après-midi, soit l’inverse. Nous avons des cours quotidiens de danse classique, aussi des cours de danse contemporaine, du répertoire, pilates, de formation musicale, de culture chorégraphique… Je suis en terminale littéraire, je passe un bac L option danse coeff 6, cette dernière matière est donc très importante ! Je suis pensionnaire à Marseille, je ne rentre chez moi que pour les vacances. C’était un peu dur au début, mais j’y suis depuis trois ans, on s’y fait. De toute façon, c’est ça la vie d’un danseur.
Comment avez-vous eu l’idée de vous présenter au Prix de Lausanne ?
C’est ma directrice Paola Cantalupo qui m’a proposé de me présenter aux sélections. Pour moi, le Prix de Lausanne a toujours été un rêve, je le suivais chaque année.
Quelle est votre variation classique et pourquoi l’avez-vous choisie ?
J’ai choisi celle de Siegfried, extrait du troisième acte du Lac des cygnes. Au départ, j’ai hésité entre pas mal de variations, notamment Casse-Noisette et Grand pas classique. On a réfléchi avec mes professeurs à la scène, à la pente, à celle qui me mettrait le pus en valeur. Et Le lac des cygnes a finalement été mon choix. J’aime sa sobriété, l’histoire du Prince, ce rôle très présent et très ouvert, c’est une variation très artistique. Il y a beaucoup de sauts, ça demande donc un bon temps de saut, même si ça peut nous aider par rapport à la pente. Il y a beaucoup de tour en l’air aussi, des pirouettes, des arabesques : c’est un peu toute la technique masculine réunie.
Et concernant votre variation contemporaine ?
J’ai pris Yondering de John Neumeier, ça a été un coup de cœur. J’ai regardé toutes les variations, et celle-ci m’a attiré dès le début. C’est une sorte de rêve… Mon professeur Julien Lestel, m’a raconté l’histoire, j’ai pu m’imprégner de l’image que l’on doit avoir et transmettre au public. La musique est aussi très belle, C’est ce qui m’a ému.
Comment avez-vous travaillé ces variations ?
Je me suis mis à les travailler fin novembre, dès que l’on a su que j’étais sélectionné. L’école a aménagé mon emploi du temps pour me laisser des plages de travail. J’ai travaillé avec mon professeur Julien Lestel, à peu près 2h par jour. Pour Yondering, on a appris la variation par la vidéo. Julien Lestel a travaillé avec John Neumeier, il avait donc des repères et des bases pour savoir ce qu’aimait le chorégraphe. On a appris toute la variation en vidéo, on l’a beaucoup regardé pour être bien sur la musique, c’est une variation très précise et musicale. Puis on s’est intéressé à la partie interprétation et artistique. Pour Siegfried, c’est à peu près pareil. La variation n’est pas très longue, elle est donc rapide à apprendre. On l’a prise partie par partie, l’interprétation et la technique.
Quelles sont vos qualités en tant que danseur ?
J’aime beaucoup les pirouettes depuis que je suis petit ! Au-delà d’un aspect en particulier, j’aime aborder cette grande technique. C’est ce qui est difficile. À 17 ans, on doit travailler les doubles cabrioles, des grands manèges, des longs enchaînements. Mais ça me plaît !
Comment s’est déroulé votre premier jour au Prix de Lausanne ?
J’ai eu une barre et un milieu sur scène avec les filles B ce matin, puis un cours de danse contemporaine. Nous avons eu ensuite le cours de danse classique noté par le jury. Et après la pause déjeuner, j’ai eu le coaching de la variation contemporaine sur scène avec Yohan Stegli.
Comment s’est passé le cours de danse classique devant le jury ? Ce n’est pas trop stressant ?
On y pense un peu au début, parce qu’ils sont là. Mais je l’ai vite pris comme un cours. J’étais dans ma bulle et je ne pensais plus au jury. Je pensais à ma danse et à ce que je voulais montrer. Personne n’est parfait et tout le monde se trompe, mais dans l’ensemble, je pense être assez satisfait, j’ai montré de ce que pouvais, ce que j’ai travaillé, ce que je suis.
Le fait d’avoir votre directrice Paola Cantalupo dans le jury est un élément rassurant ou plus stressant ?
Un peu des deux ! Paola Cantalupo me connaît, il n’y a pas de pression à avoir. Mais je veux bien faire et donner une bonne image de l’école.
Comment vous situez-vous par rapport aux autres candidats ?
Avant le début du Prix de Lausanne, j’avais peur de ne pas avoir ma place, de ne pas y arriver, d’être à l’écart face à tous ces gens qui ont une très grande technique. On a toujours la crainte de ne pas être à la hauteur. Mais je pense que j’ai ma place, je n’ai pas été sélectionné pour rien. Dans l’ensemble, il y a un niveau homogène, même si certains se distinguent bien sûr.
Les cours de danse classique et contemporaine sont-ils différents de ce que vous faites à Marseille ?
Non, ils ne sont pas très différents. Patrick Armand, le professeure de Lausanne, propose des exercices très clairs et très précis. Mon professeur Julien Lestel travaille aussi beaucoup sur la propreté et la fluidité du mouvement. Pour la danse contemporaine, nous en avons de nombreux cours à Marseille, qui ne sont pas très différents des cours de Lausanne. La professeure de Lausanne Didy Veldman donne beaucoup de conseils et d’explications, elle nous remontre beaucoup, elle est très précise.
Quels ont été les conseils de Yohan Stegli pour la variation contemporaine pendant la séance de coaching ?
Tous ceux qui dansaient Yondering sont passé un par un, puis Yohan Stegli a donné des corrections pour tout le monde. Il nous a dit que c’était une variation très simple, qu’il ne fallait pas trop en faire. Il nous a aussi donné des détails sur l’histoire et les pas.
Qu’attendez-vous du Prix de Lausanne ?
Dans mon école à Roanne, j’avais passé des concours régionaux comme Le Chausson d’or. Mais le Prix de Lausanne est mon premier gros concours. Je viens avant tout pour vivre une belle expérience, autant qu’artistiquement qu’humainement, on rencontre de nombreuses personnes. Je viens prendre tout ce que je peux prendre, dans les cours, les coachings, tout. La finale, c’est un plus. Je sais qu’il y a beaucoup de candidats très forts, je ne me mets donc pas la pression là-dessus. Si ça marche, c’est super, sinon ce n’est pas grave. Je suis aussi intéressé par le Networking forum qui peut être une belle opportunité.
De quelles écoles rêvez-vous ?
J’aimerais bien intégrer une école aux États-Unis. L’année dernière, j’avais fait le stage d’été de la San Francisco Ballet School et j’y avais décroché une bourse pour y aller à l’année. Mais ma mère n’était pas forcément d’accord pour me laisser partir l’année de ma terminale et que je prépare mon bac par correspondance. Puis tout devait être bouclé en un mois, il fallait se décider très vite et prendre de grosses décisions, c’était trop de stress pour elle (sourire). J’aimerais bien aussi la Houston Ballet Academy, quand on voit les candidats qui y sont, ça donne envie d’intégrer l’école !
Et quels sont vos rêves de danseur ?
Je rêve des compagnies américaines, comme le Houston Ballet. J’ai une préférence pour le ballet classique, mais j’aime autant danser de grands ballets du répertoire comme de belles pièces contemporaines.
Quels sont les danseurs qui vous inspire ?
Daniil Simkin ! J’aime ce qu’il dégage, sa virtuosité, sa présence… Je pense comme beaucoup de danseurs de ma génération !