Tanzolymp 2016 – Une vague latine a déferlé sur Berlin
Du 18 au 22 février 2016 s’est déroulé la treizième édition du plus grand concours de danse d’Allemagne et d’Europe, Tanzolymp. Quatre jours d’un événement dont la particularité réside dans la pluralité des genres de danse, la diversité des nationalités et l’immense panel des âges des participant.e.s (8-21 ans). De plus, les danseur.se.s provenant d’écoles publiques comme privées concourent, certes, séparément, mais sont évalué.e.s par le même jury et peuvent participer équitablement à tous les cours proposés, en parallèle des variations présentées lors des qualifications. Et comme je le prédisais, le gala de clôture au Theater des Westens fut un grand moment qui en a laissé coi plus d’un.e…
Le rideau s’est levé sur le sublime pas de deux de Diamants, extrait de Joyaux de George Balanchine. Émois de magnificence devant ce couple du Bolchoï, invité pour l’occasion (Olga Smirnova et Semen Chudin). La ballerine, en tutus blancs incrustés de diamants, rayonne de mille feux. Olga Smirnova a la morphologie parfaite, une technique en acier, une passion qui n’a d’égal que sa précision. Le directeur du concours, Oleksi Bessmertni, est venu, à la suite du pas de deux, offrir à Mademoiselle Smirnova un cadeau précieux signé Chopard (sponsor de l’événement), tout en métaphore.
L’Étoile est revenue au cours de la soirée au bras d’Atem Ovtscharenko pour danser le pas de deux du Casse-noisette de Jean-Christophe Maillot, entré il y a peu au répertoire de la compagnie moscovite. Le directeur des Ballets de Monte-Carlo aime revisiter les classiques : Roméo et Juliette, Cendrillon, La Belle, etc. Le pas de deux débute par un baiser, puis Olga Smirnova et Atem Ovtscharenko ne cessent de frétiller de passion, s’embrassent sans cesse, s’étourdissent d’émotions incontrôlables dans un flot de technique, lui, contrôlé jusqu’au bout des pieds. En un mot : magnifique ! Qui du chorégraphe ou des interprètes est le plus génial.e, telle est la question (bien difficile d’y trouver une réponse).
Ludmila Konovalova (Staatsballett de Vienne) et Marian Walter (Staatsballett de Berlin) étaient également invités à danser le pas de deux d’Odile du Lac des cygnes. Rien à redire : nous avons à faire à de vrai.e.s pros. Les quadruples pirouettes de Marian Walter sont précises, le bas de jambes de Ludmila Konovalova est pointilleux (et son cou-de-pied splendide !). Peut-être manque-t-il à cette dernière, toutefois, un brin de maléfique dans son jeu ? On les sent aussi un peu trop détendu.e.s, parfois, comme dans cette dernière pirouette du couple, à la coda, où Ludmila Konovalova a posé son pied alors que son partenaire souhaitait continuer à la faire tourner. Mais comme chaque petit détail, cela ne s’est que peu vu…
Par contre, l’organisation a laissé un peu à désirer : Marian Walter a en effet dû refuser un bouquet tendu par une fan avant de commencer sa variation, et le nom du prochain participant médaillé a été annoncé alors que les premières note de sa variation se faisaient entendre… Quand on annonce « Pas de deux », cela veut dire « Adage + variation homme + variation femme + coda ». Si le public était mieux que quiconque au courant du déroulé, il faudrait par contre briefer le staff ! Certains spectateur.rice.s et internautes ont souligné ces problèmes de raccords et d’éclairages, ils ont raison. Mais n’oublions pas que le professionnalisme se paye : Tanzolymp ne reçoit aucune subvention de la ville de Berlin ou du Sénat et toute l’équipe organisatrice est plus ou moins bénévole ! N’est pas Berlinale qui veut…
Place aux finalistes. Pas de Grand Prix cette année mais une palette de danseur.se.s étonnant.e.s. La procédure de demande de visa pour les Russes étant devenue encore plus compliquée que les années précédentes, beaucoup d’écoles et notamment folkloriques ont décliné l’invitation. En invitée d’honneur, l’École russe Eksiton (souvent lauréate depuis la date de création du concours en 2004 !) a présenté deux pièces. Un ensemble « romantico-kitsch » comme les Russes savent savamment chorégraphier, rythmé par un crooneur slave et affublé de simples tuniques blanches… Le goût de l’alignement allié à la joie de danser, cela emballe les foules, même si on aimerait qu’il y ait plus de mesure parfois. J’ai préféré la seconde pièce, intitulée Cossack Girls, superbe de prouesses, de charme, de fougue et de sincérité.
Parmi les autres médaillé.e.s russes, les Écoles Arabesque et Shchelkunchik (écoles publiques de Moscou et d’Orenbourg) ont aussi retenu mon attention, elles ont obtenu des médailles d’argent en catégories Moderne et Pop (8-12 ans). Dans cette même catégorie, en Pop également, l’Allemagne (et l’École Tanzbrücke de Hambourg) a tiré son épingle du jeu en décrochant aussi une médaille d’argent avec sa virevoltante chorégraphie Oliver Twist. En Folklorique, ma mention spéciale revient à la Hungarian Dance Academy pour une danse hongroise, sorte de legényes pour danseurs uniquement, dansée en bottes et très rythmée. Des danseurs virtuoses qui ont impressionné la galerie en offrant au public une véritable battle enchaînant des sauts enlevés et des ronds de jambes inouïs. Et puis, n’oublions pas Yoel Ferre Vargas (école privée, 8-12 ans), jeune danseur de flamenco venu de Tarragone remporter une médaille d’or (haut la main) : un sacré petit bailaor !
En Contemporain, un certain Jonathan Reimann (16-18 ans, Gymnasium Essen Werden) a remporté une médaille d’or bien méritée. La force de son corps se concentre dans ses jambes et ses pieds, permettant ainsi au haut du corps de s’exprimer librement, farouchement. Son énergie corporelle aspire à une sensibilité toute particulière qui se traduit en un mouvement perçu comme continu et ce, même dans l’immobilité. Génial ! Sa compatriote, Afra Kleinert (école privée, 16-18 ans), excessivement souple, a également remporté l’or avec une variation très impulsive, aussi enlevée que dans le sol. J’ai noté aussi la prestation de la toute jeune Julie Raiss (école privée, moins de 8 ans) au charisme scénique envoûtant.
Plus au sud, la Portugaise Ana Baptista (école publique, 16-18 ans) a été couronnée par une médaille d’or en dansant la fragilité et la profondeur des sentiments humains sur un fado poignant. Son compatriote Frederico Loureiro (école privée, 13-15 ans) était tout aussi brillant, même si moins charismatique sentimentalement parlant. Les Brésilien.ne.s étaient, cette année, moins époustouflants…
En ensemble, ils.elles étaient par contre excellemment bons ! L’Akademie Balletarrj Escola de Danca de Rio de Janeiro a scotché l’assemblée avec une chorégraphie néo-classique, dénommée Origem. Un retour aux sources alliant pirouettes et portés très physiques, emplis d’une énergie voluptueuse et vitale. Une médaille d’or pour de valeureux seniors (18-21 ans). En classique, il faut retenir un autre nom, également brésilien : Pedro Neto (école privée, 16-18 ans). En plus de posséder une technique bluffante et un corps divin, ce danseur a cette spontanéité innée qui transpire dans sa danse et le rend follement sympathique. Sa variation d’Harlequinade est un gros cadeau offert au public, qu’il embrasse et salue dans sa totalité comme si tous les spectateurs étaient des membres de sa famille.
Enfin, en solo classique et en duo contemporain, le grand vainqueur demeure à mes yeux, dans la limpidité de mouvement, l’École Royale de Ballet d’Anvers. Bercée par Non, je ne regrette rien d’Edith Piaf, la médaillée d’or Mafalda Fideles (16-18 ans) nous danse une histoire banale et sublime à la fois. Sa gestuelle est d’une précision inouïe. Aux longues pauses en arabesque succèdent des leitmotivs de pas d’une rapidité extrême. Ses collègues Hava Hudry et Enrico Vanroose, quant à eux, décrochent une médaille d’argent (Contemporain, 16-18 ans) avec Switch Lake, un duo osé sur une coda entraînante, qui joint et disperse les lignes, méticuleusement et avec une grande dextérité. Chapeau ! Comme quoi, le Vieux Continent a encore son mot à dire chez lui.
Tous les résultats sont à retrouver sur la page Facebook du Tanzolymp.
Loigge Heinz
Jonathan Reimann is student at the Gymnasium Essen Werden!!!, not at the FolkwangUniversität!
Heinz Loigge
Chairman Dance Department
Gymnasium Essen Werden
Suzanne
This is what the author wrote: « Un certain Jonathan Reimann (16-18 ans, Gymnasium Essen Werden) a remporté une médaille d’or bien méritée », translating as « A certain Jonathan Reimann (16-18 years, Gymnasium Essen Werden) won a much deserved gold medal ».