Conseil pratique – Comment améliorer ses arabesques
À la fin du XVIII siècle, Jean Dauberval crée La Fille mal gardée et Pierre Bardel prend la direction du Ballet de l’Opéra de Paris. L’arabesque apparaît alors dans un esprit à la fois créatif et révolutionnaire. Pourtant, ce mouvement, issu de postures de l’Antiquité et autres bacchanales, remonte à l’époque romaine. Sous Napoléon, l’arabesque devient picturale pour évoquer un mouvement aérien où, selon Carlo Blasis, les membres s’étendent dans des directions opposées sans liaison à une position spécifique de la jambe soulevée. Geste aérien si propre à la danse classique, l’arabesque s’identifie comme une position où la jambe est levée derrière et le corps incliné sur l’avant. Bien plus tard, l’arabesque devient un mouvement fréquent dans tous les styles de danse où puissance et amplitude des lignes corporelles émergent sans en occulter la grâce et la beauté du geste.
Comment améliorer ses arabesques, les levers plus haut tout en gardant un bon placement ? Voici quelques points pour visualiser, renforcer et comprendre cette position aérienne et picturale, c’est-à-dire en mouvement.
Les jambes, départ d’une arabesque
La progression passe par une visualisation et un renforcement des muscles impliqués dans votre arabesque.
Les parties du corps qui jouent la vedette dans l’arabesque sont les fessiers et les ischiojambiers ou l’arrière des cuisses. Ces muscles permettent une extension de la hanche.
Allongez-vous sur le ventre en posant votre front sur le dos de vos mains. Placez vos jambes en parallèle. Étirez votre colonne en inspirant. Sur l’expiration, décollez l’une des jambes du sol. Ressentez la contraction des muscles de votre jambe. Attention, votre bassin doit rester en position neutre, c’est-à-dire celle que vous avez lors du repos. L’élévation est basse, les muscles de la jambe travaillent en synergie avec la ceinture abdominale pour éviter que le bassin ne bascule vers l’avant. Le bas du dos ne doit pas se creuser par la volonté de lever la jambe plus haut, sinon vous provoquerez une tension sur la zone lombaire.
Maintenez la jambe levée quelques secondes. En inspirant, reposez votre jambe lentement. Faites une série d’une dizaine de répétitions pour chaque jambe. Réalisez le même exercice avec les jambes sur l’en-dehors.
Maintenant, mettez-vous debout en 6ème ou en position anatomique. Levez la jambe derrière vous et sentez les fessiers qui soulèvent la jambe. L’extension se retrouve vite bloquée. Normal : la liberté de mouvement n’est que de 15 degrés en parallèle. Bien que les mêmes muscles travaillent, la position parallèle n’offre pas la même liberté de mouvement que la position d’en-dehors. Votre extension dépendra donc dans un premier temps de votre faculté à positionner votre jambe derrière vous sur l’en-dehors. Pour cela, à chaque dégagé, vous devez ressentir uniquement le côté du gros orteil toucher le sol.
Le dos ou la continuité de l’arabesque
Une fois la zone de force identifiée, portons notre attention sur le dos, zone compensatrice. Souvent, la volonté de bien faire convertit la zone du dos en tension due à une mauvaise sollicitation des muscles du bassin. Votre colonne doit s’harmoniser avec la position de votre arabesque. Une tension excessive peut vous faire tenir le dos avec plus de rigidité que nécessaire, perturbant ainsi votre alignement, votre équilibre et donc votre respiration. La mobilité de l’articulation de la hanche se trouve connectée à votre colonne. Si cette dernière est tassée ou comprimée lors de l’arabesque, la hanche réduira l’amplitude de son mouvement.
Votre colonne doit garder de sa mobilité. La prise de force ne doit pas bloquer vos vertèbres ou vos organes. Les muscles de votre dos contribuent à créer de l’espace, du mouvement. Pour parfaire ce travail, faut-il encore ressentir les muscles dorsaux, c’est-à-dire savoir les solliciter puis les relâcher.
Allongez-vous sur le ventre. Placez vos jambes sur l’en dehors et vos bras en équerre à côté de votre visage. Etirez votre colonne en impliquant votre ceinture abdominale. Sur l’inspiration, soulevez le haut du corps. Les bras suivent le mouvement en restant dans la même position. Votre tête ne se soulève pas vers l’arrière, elle suit l’alignement de la colonne. Dans le doute, regardez le sol loin devant vous. Vous ressentez un appui au sol des dernières côtes avec un ventre rentré. Maintenez la position quelques secondes et redescendez lentement pendant l’expiration. Gardez les abdominaux en travail jusqu’au bout. Répétez le mouvement une dizaine de fois.
Lors d’une extension du dos ou d’un cambré, inspirez et sentez sur la partie avant le mur d’abdominaux qui s’étire. En expirant sur le retour de mouvement, accentuez la contraction progressive des abdominaux. Cette mobilité de la colonne peut être imaginée comme une vague ou une ondulation. Sur vos cambrés, tentez de visualiser cette mobilité qui sera le reflet de votre dos lors de l’arabesque. Parfois, les professeurs font démarrer le cambré par une respiration ou un petit mouvement de bras et de tête vers l’avant pour appeler le travail du dos. Cette mobilité de colonne doit se retrouver dans vos penchés sur l’avant. Souvent, nous restons focalisés dans cette sensation d’inconfort à l’arrière des jambes. Ainsi, n’hésitez pas à retrouver ce travail de vague de votre colonne.
La coordination ou le mouvement de l’arabesque
Parfois, des progrès effectués sur un travail de votre arabesque en souplesse statique ne sont pas toujours visibles dans une souplesse dynamique et inversement. Autrement dit, votre jambe ne se lève pas à la même hauteur selon que vous fassiez une arabesque ou un grand battement derrière. Comparez cette arabesque démarrée en développé et celle démarrée en grand battement. On note souvent une grande différence de sensation de hauteur et de confort.
Votre souplesse ne pourra être exploitée que si la force nécessaire et la coordination vont de pair.
Une belle arabesque est engendrée par un alignement et un équilibre musculaire. L’alignement permet de réduire la tension sur les muscles protagonistes et d’augmenter aussi leur élasticité. De même, l’alignement comme l’engagement de la ceinture abdominale doivent permettre une stabilité sans tension.
Ainsi, l’un des facteurs qui affecte la souplesse de la hanche est la longueur de la colonne durant l’effort. Plus cette dernière se retrouve tassée dans son ensemble ou par zone, plus l’articulation de la hanche perd en agilité.
Écartez les jambes dans la largeur du bassin puis poser vos mains au sol loin devant vous de manière à former un « V » inversé avec votre corps. Appuyez vos mains au sol, allongez votre tronc et équilibrez-vous afin de lever une jambe tendue derrière vous.
En inspirant, soulevez la jambe progressivement jusqu’à 90 degrés. Votre colonne s’agrandit car vos abdominaux sont en travail. Les fessiers et les ischio-jambiers se contractent pour continuer à soulever la jambe le plus au possible. Votre tronc ne subit pas de cambrure. Sur l’expiration, redescendez la jambe à 90 degrés et maintenez-la quelques secondes. Reprenez avec la même jambe. Ressentez ce travail de contraction qui s’associe à l’auto-grandissement de la colonne. Alternez en position parallèle et en-dehors.
Une fois l’extension de la colonne maîtrisée et les muscles de la hanche entraînés, il va falloir solliciter ces muscles pour entraîner progressivement la rotation et l’antéversion du bassin inévitables à partir d’une certaine hauteur. Le mouvement est initié par les muscles de la hanche s’associant à une extension du tronc. Pour permettre à la jambe de se lever, le haut du corps doit légèrement basculer sur l’avant. La maîtrise réside en une parfaite association de force de souplesse et de coordination entre les fessiers et les ischio-jambiers avec une colonne s’agrandissant pour un contrôle de la zone lombaire.
Les tensions ou les entraves de l’arabesque
Enfin, revenons au mouvement du bassin initié à partir d’une certaine hauteur. Une arabesque doit être pensée avec la participation de deux planchers, le plancher des épaules ou ceinture scapulaire et le plancher du bassin ou ceinture pelvienne.
Les élèves visualisent difficilement la position de leur bassin. La correction de leur geste n’incite pas non plus à en savoir plus : « Gardez le bassin droit » ou bien « Ne déhanchez pas« , ce n’est pas forcément très parlant. Pour vous aider, observez à la glace votre bassin en dégagé arabesque et visualisez la position dans l’espace des os iliaques ou os de bassin. Sentez leur différence. Simulez ou faites un début de glissement en grand écart droit, une jambe devant et l’autre derrière. Quelle est la position de votre bassin ? Tel serait un début de réponse pour monter votre arabesque.
Pour finir, votre ceinture scapulaire reste un plancher souvent oublié par manque de détente et d’implication dans le placement tant nous sommes dans la volonté de lever la jambe. Ce plancher doit se coordonner, s’aligner ou s’empiler harmonieusement avec votre plancher pelvien.
Pour ceux et celles qui réalisent la jambe sur la barre en arabesque, tentez au prochain cours de visualiser votre épaule par rapport à la jambe d’appui, c’est-à-dire : où se trouve-t-elle par rapport à l’os de votre bassin de ce même côté ? Dans le mouvement, la tension dans les épaules est très fréquente. Souvent, cette tension se traduit par une mauvaise ouverture des bras lors de la prise de mouvement. En général, le bras de côté se retrouve ouvert vers l’arrière avec une épaule fermée ou tournée vers l’intérieur.
Enfin, l’autre zone de tensions dans ce même plancher sont votre nuque et votre mâchoire. On tire souvent trop la tête en l’arrière ce qui a pour conséquence de bloquer la mobilité de la colonne. Pensez à monter votre arabesque en rentrant un peu le menton ou en poussant le sommet du crâne vers le plafond. Gardez le sourire mais sans serrer les dents !
L’arabesque est un mouvement, une réaction en chaîne de votre corps où la souplesse va de mise avec la coordination. Gardez un schéma de pensée, lui aussi progressif, démarrant du pied, impliquant le bassin, générant la colonne et finissant au sommet du crâne. Concluez vos efforts et vos progrès par des étirements en fin de cours.
Senga
Merci Lorena, c’est vraiment très intéressant comme explication.
Sweety
Un article très utile, merci pour tous ses conseils !
taboga
juste que le personne n’est pas sur sa jambe et j’aurai aimé la voir sans le tutu pour voir le placement des hanches