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Rencontre avec Sabrina Marnet-Letellier, auteure du « Guide nutritionnel du danseur »

Le Guide nutritionnel du danseur bénéficie d’une deuxième sortie en 2019, améliorée et complétée avec une approche plus pratique, toujours disponible en e-book et désormais en format livre.

Une bonne alimentation et la pratique de la danse, notamment la danse classique, ne font malheureusement pas toujours bon ménage. Pourtant, manger sainement est indispensable pour pratiquer la danse de façon intensive, encore plus lorsque l’on veut en faire son métier. Ingénieure en Sciences de l’Aliment & en Nutrition, assidues de ses cours de danse depuis 30 ans, Sabrina Marnet-Letellier a publié le Guide nutritionnel du danseur. Avec de nombreux conseils pratiques et des recettes, on y apprend la base d’une alimentation saine (qui peut servir à tout le monde) et les besoins spécifiques du danseur/de la danseuse : être en forme en cours de danse, éviter les blessures ou ne pas manquer d’énergie pendant un spectacle. Rencontre et chasse aux idées reçues sur la nutrition et la danse.

Guide nutritionnel du danseur de Sabrina Marnet-Letellier

Quelle est votre parcours de danseuse et spécialiste de la nutrition ?

J’ai commencé la danse classique à sept ans, sur Toulouse. J’ai monté les niveaux au fur et à mesure, jusqu’à prendre 5-6 cours par semaine à 12 ans. Mon objectif était de rentrer au conservatoire, je travaillais beaucoup pour ça. L’ambiance en cours était bonne, mais au collège, j’ai eu droit à des commentaires comme : « Tiens, tu as grossi, tu as de grosses cuisses« . À l’époque, je faisais 1,60 mètre pour 50 kilos, j’en riais. Mais cela m’est resté dans la tête.

Vers 15 ans, j’ai commencé à me regarder un peu plus dans la glace, à me trouver des kilos en trop. Je me suis mise à faire attention à ce que je mangeais, à éliminer les protéines le soir, puis à éliminer les matières grasses. Tout le monde se dit : « J’ai trop de gras, je dois donc éliminer le gras« . C’est une erreur ! À éliminer complètement les matières grasses, au bout d’un moment, le corps dit non et les problèmes arrivent. Les repas de famille étaient une torture, j’avais l’impression que l’on me gavait. En quelques mois, je suis tombée dans l’anorexie. Personne ne s’en est aperçu, que ce soit ma famille ou mes professeurs de danse : je devenais un peu extrême dans mes choix alimentaires, je me faisais vomir quand j’avais l’impression d’avoir trop mangé, mais je n’avais pas perdu 20 kilos, c’était une anorexie limitée. Mais le fait de moins bien manger me rendait tout le temps fatiguée, je n’avais plus goût à rien. J’ai même arrêté la danse pendant un an, surtout que je n’avais pas pu rentrer au conservatoire. À 20 ans, j’ai quitté ma famille pour faire mes études en nutrition à Paris et ça a été le déclic. J’ai recommencé à manger à peu près normalement.

 

Vous avez continué à prendre des cours de danse sur Paris, à haut niveau, parfois avec de futures professionnelles. Quel regard portaient-elles sur la nutrition ?

J’étais en contact avec des filles qui passaient des auditions, surtout dans le milieu de la danse classique. Le point-clé restait le poids, et les mensurations. Même de grands stages de danse classique demandent des photos avec les mensurations, ce que je trouve aberrant. Cela entraîne forcément des problèmes d’alimentation chez les danseurs et danseuses. Récemment, une ballerine de 13 ans est venue me voir après une conférence pour me demander comment perdre du poids. Je l’ai regardée, elle faisait 40 kilos. C’est dans les moeurs, notamment en danse classique, où l’on se regarde dans la glace tout le temps, où l’on a des tenues très moulantes. Le moindre petit bourrelet devient une obsession et l’on a une vision déformée de la réalité.

Aujourd’hui, peu d’écoles de danse en France se sentent vraiment concernées par l’apprentissage d’une bonne alimentation. Certaines le font, mais cela s’apparente souvent à faire attention aux calories. À part culpabiliser une danseuse parce qu’elle a craqué sur un pain au chocolat, ça ne sert pas à grand-chose. Et beaucoup de danseuses professionnelles, pourtant dans d’importantes compagnies, n’ont aucun suivi nutritionnel, elles se débrouillent toutes seules. C’est à ça que sert mon livre : faire prendre conscience aux danseurs et danseuses qu’ils.elles sont des artistes, mais aussi des athlètes. Et que sans une alimentation adaptée, le corps lâche. Si l’on veut continuer à danser longtemps et limiter les blessures chroniques, il faut vraiment faire attention à son alimentation. 

Guide nutritionnel du danseur de Sabrina Marnet-Letellier

Quels sont concrètement les risques de blessure avec une mauvaise alimentation ?

Ne pas manger assez de protéines (animales ou végétales) se traduit par des déchirures plus fréquentes. Couper toutes les matières grasses, notamment celles où l’on trouve des Oméga-3 comme les huiles végétales, donne des problèmes inflammatoires chroniques, comme des tendinites régulières.

 

Quel est le gros défaut de nutrition que l’on va retrouver chez les danseurs et danseuses ?

Souvent, c’est de ne pas manger assez. Ou de penser que l’on compense un excès (un sandwich bien gras ou des frites pour le déjeuner par exemple) en sautant le repas suivant.

 

Comment alors, quand on a de mauvaises habitudes alimentaires, se remettre à manger correctement ?

Il faut commencer par un bon petit-déjeuner, quelque chose de bien complet, cela évite de faire des erreurs après et ça permet de bien démarrer la journée. Et quand on a des moments un peu plus calmes dans la semaine, de se mettre à cuisiner. Et tester ainsi de nouvelles recettes, de nouvelles saveurs. Il n’y a pas que les pâtes ou le riz pour les glucides, on peut aussi se faire une salade de lentilles, de pois chiches… Le dimanche soir, par exemple, on se prépare sa gamelle pour le lundi et le mardi, ça évitera le sandwich et ça permet de remettre du fait-maison dans son alimentation. C’est aussi se redonner goût au plaisir de manger.

 

Dans votre livre, vous expliquez la base d’une bonne alimentation, qui est la même pour tout le monde, qu’il.elle soit danseur.se.s ou non. Quelles vont être, sur cette base, les besoins spécifiques du danseur. de la danseuse ?

La bonne base saine est la même pour tout le monde, danseurs ou non. Ensuite, un danseur/une danseuse va avoir besoin d’un plus de protéines (animales ou végétales), parce qu’il.elle.s sollicitent beaucoup leurs muscles. Et l’apport en protéines a tendance à être consommé en trop faibles quantités quand on se limite à des petits repas. Il y a ensuite des conseils sur la récupération, comme consommer beaucoup de fruits et légumes pour les antioxidants. Il faut aussi faire attention à consommer beaucoup d’Oméga-3, que l’on trouve dans les huiles végétales ou les poissons gras, on voit beaucoup de carence en Oméga-3 chez les sportif.ve.s en général. Les danseur.se.s sont aussi plus sujets aux carences en calcium. Il y a des choses un peu plus particulières auxquelles il faut faire attention : les aides musculaires, les repas avant un concours ou un grand spectacle.

Guide nutritionnel du danseur de Sabrina Marnet-Letellier

Et comment adapter ces conseils dans la vraie vie ? Vous recommandez par exemple un repas complet trois heures avant l’effort, mais ce n’est pas forcément évident quand le cours de danse démarre à 10h.

J’ai indiqué les recommandations, mais à chacun de voir ensuite comment il.elle se sent. Tout le monde ne va pas réagir de la même manière selon son corps et sa génétique. Certains vont apprécier un petit-déjeuner complet deux heures avant le cours, d’autres vont se sentir un peu « lourds ». On peut dans ce cas manger un peu moins le matin et faire un en-cas ensuite pour récupérer.

 

Comment avez-vous élaboré les différentes recettes du livre ?

Pour les boissons énergétiques, différents sportifs m’ont influencée et m’ont appris à les faire. Pour les plats et energy balls, je suis partie des recettes de monsieur et madame tout-le-monde que jai adaptées et pensées pour les besoins spécifiques des danseurs et danseuses, en les testant dans ma cuisine.

 

Guide nutritionnel du danseur de Sabrina Marnet-Letellier, disponible en format e-book.

 

Comments (2)

  • Bonjour,

    encor merci pour cet article et cette interview. Juste pour ajouter une petite mise à jour: j’ai édité une nouvelle version du Guide Nutritionnel du danseur en septembre 2019, avec plus de recettes et plus de conseils pratiques, notammentdes exemples de menus sur une journée.
    Dernière nouveauté: le guide est disponible au format e-book ET au format imprimé désormais 🙂

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    • Silène

      Bonjour et merci beaucoup pour votre ouvrage Sabrina, je vais directement me le procurer 🙂

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