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[Les Étés de la Danse 2016] Une courte histoire du New York City Ballet

Le New York City Ballet est la troupe invitée des Étés de la Danse 2016, à voir du 28 juin au 16 juillet au Théâtre du Châtelet. Quelle est l’histoire de cette troupe si importante dans le monde de la danse ? Quelles sont ses forces – et ses faiblesses – aujourd’hui ? Que représente la troupe ? Petit historique du New York City Ballet, emblématique de la danse américaine.

Le New York City Ballet aux Étés de la Danse

Le New York City Ballet aux Étés de la Danse

Le NYCB, la maison de George Balanchine

C’est une aventure unique et peu banale que celle du New York City Ballet, celle d’une compagnie qui en quelques années a réussi à devenir l’une des toutes premières troupes mondiales. Quand le Ballet de l’Opéra de Paris, le Théâtre Bolchoï de Moscou et le Mariinsky de Saint-Pétersbourg sont les héritiers d’une tradition centenaire, le NYCB a démarré bien modestement après la Seconde Guerre mondiale, sans grands moyens financiers ni subventions d’états. Et c’est précisément ce qui en fit la force et continue à la définir aujourd’hui.

Sur ce terrain vierge, le génial George Balanchine – émigré russe originaire de Géorgie, formé à Saint-Pétersbourg et ancien danseur du Ballet impérial de Russie – façonne une troupe telle qu’il la conçoit et invente une chorégraphie révolutionnaire fondée sur une technique adaptée de l’école russe de Saint-Pétersbourg, mais totalement novatrice. Aujourd’hui encore, le New York City Ballet est la maison de George Balanchine : il y est vénéré et son répertoire conservé et transmis de génération en génération.

Mais son œuvre n’aurait pu advenir sans l’autre personnalité clef dans l’avènement du NYCB : Lincoln Kirstein. En 1933, l’Amérique vit une crise économique sans précédent. Lincoln Kirstein rencontre à Londres George Balanchine. Il est immédiatement convaincu qu’il tient là l’artiste majeur qui pourra concrétiser son rêve : bâtir une grande compagnie classique aux États Unis. Issu d’un milieu de riches industriels, Lincoln Kirstein, esthète et philanthrope, est jusqu’à sa mort en 1996, le pivot financier du NYCB, l’homme qui sait faire affluer l’argent dans un pays où l’État ne s’engage guère financièrement dans le monde de la culture, prérogative du secteur privé.

 

Avant la troupe, la naissance d’une école

Or dans les années 1930, l’Amérique est un désert en matière de ballet. New York est certes le centre de toutes sortes d’expérimentations chorégraphiques passionnantes, incarnées notamment par Martha Graham, mais le ballet classique exige une école et une tradition dont les États Unis sont dépourvues. D’où l’idée de créer tout d’abord une école pour former des danseur-euse-s. C’est ainsi que voit le jour en 1934 la School of American Ballet (SAB) qui existe encore aujourd’hui et fournit la quasi-totalité des artistes du NYCB. Et c’est avec ces apprentis que Balanchine crée un de ses chefs-d’œuvre, Sérénade, aujourd’hui au répertoire de toutes les grandes compagnies mondiales, développant dans cette œuvre une esthétique qui change la face du ballet classique.

L’école est donc en place. Mais avec les péripéties de la Seconde Guerre mondiale, il faut attendre 1946 pour que naisse le Ballet Society, rebaptisé New York City Ballet en 1948. Il n’y a alors que deux très courtes saisons sur la scène du City Center Theater ou de plus petits théâtres. Mais l’entregent de Lincoln Kirstein et son carnet d’adresses unique vont très vite faire du New York City Ballet un pôle majeur de la vie culturelle new-yorkaise et américaine. Et parce que George Balanchine n’a à se soucier d’aucune tradition, il ne cesse durant toute sa carrière à faire appel à des artistes étrangers. Dès 1950, il invite ainsi le britannique Frederick Ashton qui crée Illuminations. L’année précédente, Jerome Robbins rejoint le compagnie pour être immédiatement nommé directeur artistique associé. C’est le début d’une longue et fructueuse collaboration. Jerome Robbins apporte à George Balanchine sa culture américaine déjà nourrie de ses expériences sur Broadway (les chorégraphies de West Side Story, c’est lui). Leur dialogue, pour compliqué qu’il fut, n’a jamais cessé et définit ce qu’est encore aujourd’hui le NYCB.

 

Les années 1960, l’âge d’or du New York City Ballet

Mais il faudra attendre 1964 pour que la compagnie ait enfin son théâtre, le New York State Theater (aujourd’hui David H. Koch Theater) au Lincoln Center dans le quartier du West Side. Lincoln Kirstein et George Balanchine collaborent étroitement avec l’architecte Philip Johnson pour faire de ce théâtre une scène et une salle faites pour le ballet et la danse. Certes, le NYCB n’est pas la seule compagnie à s’y produire, mais la compagnie a enfin trouvé sa maison. C’est une époque dorée où la compagnie est composée d’artistes majeurs : Jacques d’Amboise, Patricia McBride, Arthur Mitchell, Violette Verdy, Edward Villella, Suzanne Farrell

C’est le début d’un âge d’or pour le NYCB, qui désormais se produit à New York lors de saisons d’hiver et de printemps, mais qui tourne aussi à l’étranger. Période faste qui se prolonge la décennie suivante avec l’arrivée dans la troupe de Peter Martins venu du Ballet Royal du Danemark. Après George Balanchine, Jerome Robbins et Lincoln Kirstein, Peter Martins est le dernier membre du quatuor menant le NYCB. Il est en fait est la personnalité qui incarne depuis plus de 30 ans le NYCB. Il assume la position de Maître de Ballet en chef depuis 1983, une longévité inégalée dans le monde du ballet. Le NYCB d’aujourd’hui est SA troupe. Il en a choisi tous les danseu-r-euse-s et composé l’intégralité du répertoire.

 

 

Le New York City Ballet aujourd’hui et ses nouveaux défis

Danseur exceptionnel mais chorégraphe sans grand relief, Peter Martins a le génie de s’entourer des meilleurs chorégraphes néo-classiques du début du XXIe siècle, toutes celles et ceux – mais surtout ceux… – qui à un degré ou à un autre se réclament ou s’inspirent de George Balanchine. Deux chorégraphes majeurs marquent ainsi l’histoire récente du New York City Ballet. Christopher Wheeldon d’abord, formé au Royal Ballet, qui devient chorégraphe en résidence de 2000 à 2008. Justin Peck ensuite, qui prend sa suite en 2011, soliste dans la compagnie. À 29 ans, il est déjà à la tête d’une œuvre prolifique pour le NYCB, aux États-Unis et à l’étranger (sa première création pour l’Opéra de Paris est à voir en juillet).

The Most Incredible Thing de Justin Peck - NYCB

The Most Incredible Thing de Justin Peck – NYCB

Le New York City Ballet se produit Paris aux Étés de la danse avec ce répertoire composé d’œuvres des maitres fondateurs, George Balanchine et Jerome Robbins, auxquel on a adjoint leurs successeurs. Avec ce format court, autour de 30 minutes, qui est le principe cardinal du ballet balanchinien. Reste à savoir comment le New York City Ballet va évoluer et comment élargir le répertoire dans les prochaines années. Les tentatives de mettre sur scène les grands ballets classiques (Le Lac des Cygnes, La Belle au Bois Dormant, Romeo et Juliette) se sont révélées des succès du box-office mais le résultat artistique n’est pas à la hauteur. Et le NYCB semble être resté à l’écart des grandes évolutions contemporaines. Enfin, qui pourra succéder à Peter Martins ? Ce n’est pas à l’ordre du jour, mais après plus de 30 ans de direction, la question finira vite par se poser.

 

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