[Replay TV] Danser sa peine de Valérie Müller
Pendant des mois, Angelin Preljocaj a animé des ateliers chorégraphiques avec des détenues à la prison des Baumettes à Marseille. Avec comme objectif la création d’un spectacle intitulé Soul Kitchen. Réalisé par Valérie Müller, primé en janvier dernier au Festival international des programmes audiovisuels (FIPADOC) de Biarritz, le documentaire Danser sa peine retrace les différentes étapes qui ont conduit à cette création, l’approche de ces femmes qui n’avaient jamais dansé, l’éveil de leurs corps contraints par l’enfermement et leur cheminement intérieur vers leur propre liberté. Diffusé sur France 3, à voir en replay.
Pendant quatre mois, deux fois par semaine, des ateliers de deux heures ont réuni le directeur du CCN d’Aix-en-Provence et cinq détenues de la prison des Baumettes. De cette expérience est née une création Soul Kitchen présentée au pavillon Noir à Aix-en-Provence puis au festival Montpellier danse en 2019 et un documentaire. Car l’idée d’Angelin Preljocaj n’est pas uniquement de partager des moments avec ces volontaires, mais de les inviter à se produire sur scène. Pour inciter un public à porter un regard neuf, « dénué d’ironie ou de curiosité malsaine« , sur ces femmes, dont aucune n’avait jamais pratiqué la danse.
Diffusé sur France 3, ce documentaire de Valérie Müller, compagne du chorégraphe, suit au plus près ce hardi « pied de nez aux barreaux », selon les mots d’une des participantes. On les voit débuter, hésitantes, un peu gauches, n’osant pas se mettre en mouvement. Par moment, on peut lire l’envie, l’appétit chez certaines, l’incrédulité chez d’autres. Mais toutes s’accrochent, même quand l’une d’entre elles décide de quitter le groupe. Toutes s’arriment à cette expérience artistique et humaine qui leur est proposée. Notamment grâce au travail et à l’infinie bienveillance du chorégraphe.
Entre deux séances de danse, Malika, Annie, Sylvia, Sophia et Litale se confient sur la détention face à la caméra de Valérie Müller. Et ces moments d’épanchement filmés avec pudeur, sont totalement complémentaires avec ce que l’on peut lire dans leurs corps. Cette libération de la parole semble aller grandissant au fur et à mesure qu’elles s’affirment dans leur état d’être dansant. Sans se départir de son exigence, Angelin Preljocaj accompagne ses interprètes singulières. Il les guide pas à pas sur ce chemin parfois chaotique, mais dont il perçoit tout ce qu’il peut faire naître en elles et leur apporter. Et lui apporter aussi. Aussi, lorsque vient l’heure de se quitter, l’émotion est palpable de part et d’autre. La séquence est filmée avec beaucoup de sensibilité, la même qui traverse d’un bout à l’autre ce passionnant documentaire.
Danser sa peine de Valérie Müller. 60 mn. À voir sur France 3, jeudi 26 mars à 23h25 puis en replay.