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Rencontre avec Davit Galstyan pour ses adieux à la scène

Entré au Ballet du Capitole en 2004, Premier Soliste en 2012 avant de prendre le titre d’Étoile en 2018, Davit Galstyan était un pilier du Ballet du Capitole. 18 ans après ses débuts, le danseur a décidé de faire ses adieux à la scène, le 28 juin dernier, dans la prise de rôle du solo L’Après-midi d’un Faune de Thierry Malandain. Rencontre quelques jours après cette soirée si particulière, pour évoquer son parcours, ses grands rôles ou ses projets pour la suite.

Davit Galstyan lors de ses adieux à la scène

 

Quelques jours après votre dernière représentation, dans quel état d’esprit êtes-vous ?

Je suis très heureux d’avoir terminé ma carrière de cette manière. Et le Théâtre a très bien fait les choses. Je me sens bien, comme un jeune retraité (sourire). J’espère que la suite sera pareille.

 

Vous avez 36 ans, ce qui est encore jeune même pour un danseur classique. Pourquoi avoir décidé de quitter la scène ?

J’ai parlé avec Kader Belarbi, le directeur du Ballet du Capitole, je lui ai dit que je trouvais que c’est le bon moment d’arrêter. Il a respecté mon choix, le théâtre aussi. J’ai toujours voulu quitter la scène en étant au sommet de mes capacités. L’on dit en russe : « Il faut que ce soit toi qui quittes la danse plutôt que la danse ne te quitte« . Je prenais toujours autant de plaisir dans le travail, mais il y a un moment pour tout et il faut avoir le courage de se dire : « C’est le moment ». J’ai eu 18 ans d’une très belle carrière, j’ai dansé énormément. Je n’ai aucun regret. J’ai préparé mon dernier spectacle avec beaucoup de responsabilité. Je voulais que le public ressente une belle émotion et garde un joli souvenir de moi après mon départ. Tout donner pour cette dernière a été ma motivation.

 

Pourquoi avoir choisi le solo L’Après-midi d’un Faune de Thierry Malandain, une prise de rôle ?

Je pensais que c’était très bien de partir sur ce solo, c’est un beau cadeau de Thierry Malandain. Et puis c’est une soirée avec l’orchestre du Capitole, le chœur, toutes les forces de la Maison. J’en ai parlé avec Kader Belarbi et l’on s’est arrêté sur cette soirée.

L’Après-midi d’un Faune de Thierry Malandain – Davit Galstyan

Pendant vos adieux, Kader Belarbi a fait un discours en scène et l’on vous a senti tous les deux très émus. Qu’est-ce qui vous unit ?

Avec Kader, je travaille depuis dix ans, et nous avons écrit une très belle histoire ensemble au Ballet du Capitole. Il a créé avec moi son Corsaire, La Reine morte, nous avons fait un très beau voyage artistique. En tant que directeur, il cherche constamment la perfection. Il m’a fait énormément travailler ! Il vient de cette école française de la rigueur, il a travaillé avec Rudolf Noureev et il essaye de transmettre cela à la nouvelle génération.

 

Qu’est-ce qui vous a amené au Ballet du Capitole en 2004 ?

J’ai commencé la danse chez moi, en Arménie, ma mère était danseuse et mon père directeur du Ballet d’Arménie. En 2001, j’ai participé au Prix de Lausanne et j’y ai remporté la bourse Noureev, qui m’a ouvert les portes de la Royal Ballet School pendant trois ans. Cette école va chercher les meilleurs élèves un peu partout dans le monde, j’avais dans ma classe Steven McRae (Principal au Royal Ballet) ou Cory Stearns (Principal à l’American Ballet Theatre). Il y avait une grande émulation entre nous. À la fin de ma formation, j’avais des propositions de contrats au Birmingham Royal Ballet et à l’English National Ballet. Mais mon professeur de danse connaissait Nanette Glushak, qui dirigeait à l’époque le Ballet du Capitole. À l’époque, la troupe dansait beaucoup de ballets de George Balanchine. Cela m’intéressait beaucoup, j’adorais les ballets de Balanchine, je les adore toujours d’ailleurs ! C’était intéressant pour commencer ma carrière. Je suis donc venu à Toulouse, j’ai été engagée le jour même.

 

Comment s’est passé votre travail avec Nanette Glushak ? Votre carrière a quasiment été divisée en deux : huit ans sous la direction de Nanette Glushak, dix sous celle de Kader Belarbi.

Nanette Glushak avait donc un répertoire très tourné vers George Balanchine. J’ai appris cette école, très rapide, très musicale, très virtuose. J’étais un jeune garçon qui sortait de l’école. Elle m’a donné beaucoup d’opportunités, je n’ai quasiment jamais dansé dans le corps de ballet avec elle. Avec Kader Belarbi, j’ai plus grandi artistiquement. J’ai pu danser des ballets de Rudolf Noureev, de lui-même. Il a fait la création de La Reine morte sur moi, Le Corsaire, La Bête et la Belle… J’étais aussi un peu plus mûr à ce moment-là, j’appréciais plus le travail de détails.

Raymonda de Rudolf Noureev – Davit Gaylstan et Natalia de Froberville

L’envie de partir de Toulouse s’est-elle faite à un moment sentir ?

D’abord, j’aime beaucoup la ville de Toulouse, elle est devenue ma deuxième maison après l’Arménie. C’est vrai que j’ai eu un moment de réflexion au moment du changement de direction, j’avais de belles propositions ailleurs. Mais quand Kader Belarbi est venu, que l’on a commencé à travailler ensemble, j’ai senti qu’il misait beaucoup sur moi. Et j’ai tout de suite vu que ça allait très bien fonctionner. Il a fait cette même année la création du Corsaire. Je n’étais pas encore Premier soliste (ndlr : grade qui deviendra ”Étoile” en 2018) à l’époque, c’est lui qui m’a promu. Un beau début de collaboration ! Une collaboration qui fut belle et dure. Mais la danse, ce n’est pas un métier comme les autres. S’il n’y a pas la rigueur, de la discipline et la volonté de faire toujours plus, cela ne marche pas.

 

Quels rôles retenez-vous dans votre carrière ?

Mes débuts dans Basilio quand j’avais 20 ans ! La Reine Morte de Kader Belarbi, Le Corsaire, Giselle et le rôle d’Albrecht… J’aimais beaucoup Les Mirages de Serge Lifar, j’ai aussi beaucoup apprécié de travailler avec Johan Inger ou Jiří Kylián. Et j’ai adoré faire ce solo de Thierry Malandain L’Après-midi d’un Faune.

 

Et des moments plus difficiles ?

J’ai eu la chance de ne pas avoir de gros moments de doute. Et je n’ai pratiquement jamais été blessé, j’ai été très discipliné et j’ai eu un peu de chance. Mais comme pour tout le monde, il y a des regrets, notamment L’Arlésienne de Roland Petit que je n’ai pas dansé.

 

Et quelles ont été vos grandes partenaires ?

C’est difficile de dire, elles sont toutes différentes ! J’ai partagé une grande partie de ma carrière avec Maria Gutierrez et j’ai beaucoup aimé danser avec elle. Elle était une très belle artiste et nous avions une vraie et très forte connexion ensemble sur scène. J’ai aussi beaucoup dansé avec Natalia de Froberville, ainsi qu’avec Jurgita Dronina, aujourd’hui Principal au Ballet National du Canada. Nous avons dansé plusieurs fois dans des galas, j’ai adoré danser avec elle.

Le Corsaire de Kader Belarbi – Davit Galstyan et Maria Gutierrez

Quels sont vos projets pour la suite ?

Pour le moment, je veux prendre un temps de réflexion. Une page se tourne, je vais me préparer, voyager, voir ce que me réserve le futur. Il y a un poste de maître de ballet à pourvoir en ce moment au Ballet du Capitole, mais ça ne m’intéresse pas forcément. Je veux plutôt me préparer pour un jour, j’espère, diriger une compagnie de danse. Je vais continuer à prendre des cours de danse évidemment, je ne veux pas arrêter tout, tout de suite… En fait, je pense que je prendrais toujours mon cours de danse !

 



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