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Alvin Ailey American Dance Theater‎ aux Étés de la Danse – Programme Ailey/Ellington

L’Alvin Ailey American Dance Theater‎ continue sa tournée aux Étés de la Danse avec un programme Alvin Ailey/Duke Ellington (complété par Revelations). Une soirée séduisante, aux multiples couleurs et montrant toute l’inventivité du chorégraphe afro-américain. La collaboration entre le célèbre jazz-man et Alvin Ailey a été florissante, laissant des ballets qui ont passé l’épreuve du temps, uniques en leur genre avec ce je-ne-sais-quoi si typiquement américain.

Night Creature

Night Creature d’Alvin Ailey – Alvin Ailey American Dance Theater

« À la différence des étoiles, les créatures de la nuit ne disparaissent pas avec l’aube, elles continuent de briller, croyant chacune devenir une star avant que la nuit ne s’achève« , explique Duke Ellington à propos du ballet Night Creature. Mais qui sont les créatures de la nuit ? Des fantômes inspirés des Willis, des êtres étranges ? Pas du tout !  Les reines de la nuit sont ici celles du dancefloor des 60′.

Dès que le rideau se lève, c’est comme si l’on avait poussé la porte d’un cabaret black secret dans les rues de New York. La musique est jazz et trépidante, la danse toute en déhanchés et captivante, rappelant les comédies musicales de l’époque. Ils sont une quinzaine, se transformant pendant la nuit et oubliant leurs problèmes du jour. Les couples se forment sans préjugé, les corps sont libres, comme sorties de leur carcan. Rachael McLaren est la reine de ce monde, donnant le tempo d’un coup de hanche, d’un mouvement de bras, d’un regard qui s’allume. Si tout le monde regagnera la vraie vie une fois le soleil revenu, elle restera dans ce cabaret, véritable créature de la nuit qui se réveille au son du jazz.

Pas de Duke est la réécriture – et aussi le pastiche – du pas de deux classique, version jazz et décalée. Jacqueline Green a tout compris à cet état d’esprit. Tigresse aux longes jambes félines, elle déploie la chorégraphie qui mélange virtuosité classique et attitudes purement danse jazz. Elle y apporte cette pointe d’humour, se moquant gentiment des reines Cygnes blancs d’un sourire enjôleur au moment des saluts. Son partenaire n’a malheureusement pas été à la hauteur. Sean Aaron Carmon semble déjà limité techniquement (certes, ce pas de deux a été inventé pour Mikhaïl Baryshnikov). Surtout, le danseur ignore l’aspect humoristique de ce ballet, restant premier degré, rendant par là bien sage ses différents passages.

Pas de Duke d'Alvin Ailey - Alvin Ailey American Dance Theater

Pas de Duke d’Alvin Ailey – Alvin Ailey American Dance Theater

Après l’entracte, The River est peut-être la pièce la plus surprenante du programme. D’une part par la chorégraphie, riche de références. Il y a du pur classique, de la danse moderne, contemporaine, jazz, un esprit comédie musicale parfois, tout en sachant garder un ton propre. La musique de Duke Ellington étonne également. Pour la première fois, le compositeur s’est essayé à la musique symphonique, créée spécialement pour ce ballet. Il y a des accents de Debussy, de Stravinsky, du pur jazz, et une ambiance fantasmagorique absolument unique, révélant tout le génie de Duke Ellington.

Le ballet est changeant comme un cours d’eau. La pièce se veut d’ailleurs la métaphore du chemin d’une rivière, de sa source jusqu’à la mer, regardant ce qui se passe sur ses rives. Les ambiances se mélangent, un peu de mélancolie par là, une prière par ici, des retrouvailles plus tard, du bonheur, des séparations. La vie s’écoule comme l’eau, jamais sans soubresaut. Et dans l’air, une ambiance étrange, propice au voyage et à l’évasion. 

The River d'Alvin Ailey - Alvin Ailey American Dance Theater8

The River d’Alvin Ailey – Alvin Ailey American Dance Theater8

La pièce a été créée pour les artistes virtuoses de l’American Ballet Theatre. Quand Alvin Ailey l’a reprises pour sa troupe, il l’a raccourcie et supprimé les pointes. La chorégraphie a néanmoins gardé cette empreinte classique, qui n’est pas forcément ce qui met le mieux en valeur la technique des interprètes de l’Alvin Ailey American Dance Theater‎. Les personnalités ressortent moins, mais la troupe se trouve très joliment unie dans cette pièce où tout l’enjeu est d’instaurer une ambiance particulière, entre réalité et rêverie. 

Le programme se termine par Revelations, non pas sur une musique de Duke Ellington mais sur des standards de gospel. Le tube d’Alvin Ailey est présenté presque à chaque spectacle, c’est pour moi la troisième fois que je le vois en quinze jours. Mais la lassitude, jamais, ne semble effleurer les danseur-se-s. Au contraire, ils semblent plus investis encore. Les prières sont intenses, la peine est lourde lors des premières scènes. La deuxième partie se veut celle du chemin initiatique, la troisième celle de la joie. Et la quatrième, comme une tradition, la standing-ovation du public.

Night Creature d'Alvin Ailey - Alvin Ailey American Dance Theater

Revelations d’Alvin Ailey – Alvin Ailey American Dance Theater

 

L’Alvin Ailey American Dance Theater au Théâtre du Châtelet, dans le cadre des Étés de la Danse. 

Night Creature d’Alvin Ailey, avec Rachael McLarenet Kirven Douthit-Boyd ; Pas de Duke d’Alvin Ailey avec Jacquelin Harris et Sean Aaron Carmon ; The River d’Alvin Ailey avec Kirven Douthit-Boyd, Ghrai DeVore, Sean Aaron Carmon, Vernard J. Gilmore, Megan Jakel, Michael Francis McBride et Jacquelin Harris ; Revelations d’Alvin Ailey, avec Kanji Segawa, Danica Paulos, Samantha Figgins, Akua Noni Parker, Michael Jackson, Jr., Renaldo Maurice, Elisa Clark, Sean Aaron Carmon, Collin Heyward, Rachael McLaren, Yannick Lebrun, Demetia Hopkins-Greene, Marcus Jarrell Willis, Samuel Lee Roberts, Collin Heyward et Michael Francis McBride.

Samedi 18 juillet 2015.

 

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