Rencontre avec Friedemann Vogel pour La Chauve-souris de Roland Petit avec le Ballet de l’Opéra de Rome
Danseur au Ballet de Stuttgart, Friedemann Vogel est l’une des Étoiles internationales invitées à danser dans La Chauve-souris de Roland Petit par le Ballet de l’Opéra de Rome, au Théâtre des Champs-Élysées du 13 au 15 janvier. Souvent invité à l’étranger, le danseur était de passage à Paris en octobre dernier pour interpréter L’Oiseau de feu de Sidi Larbi Cherkaoui lors d’une soirée d’hommage aux Ballets Russes à la Fondation Louis Vuitton. C’est à cette occasion que Danses avec la plume l’a rencontré. Il s’apprêtait alors à partir à Rome pour se plonger dans le rôle de Johann, héros de La Chauve-souris qu’il interprète. Et il évoque avec enthousiasme cette prise de rôle.
Qu’est-ce que cela vous fait de danser La Chauve-souris au Théâtre des Champs-Élysées, où il a été créé en 1979 ?
J’adore Paris, c’est une de mes villes préférées au monde. Alors revenir ici est toujours un plaisir. Et oui, c’est presque magique de danser ce ballet là où il a été créé. C’est comme quand vous dansez au Mariinsky et que vous vous dites : « Le Lac des Cygnes, La Belle au bois dormant ont été créées ici !« . Et puis il y a toujours une atmosphère spéciale dans ce théâtre.
Que vous inspire ce ballet La Chauve-souris de Roland Petit ?
J’ai déjà vu ce ballet plusieurs fois, lors de galas, avec Manuel Legris notamment. J’ai hâte de danser cette oeuvre très française. Ce sens de l’humour, le décor… Quand vous regardez ce ballet, vous savez que c’est un chorégraphe français qui l’a fait. Et j’adore la musique de Strauss, elle est très dansante. J’ai hâte de pouvoir évoluer sur cette musique. Et puis ce ballet est très bien raconté, c’est un plaisir de le regarder et un plaisir pour les danseur.se.s de l’interpréter. C’est un ballet qui divertit tout le monde, les interprètes comme le public.
Comment se passe la préparation du rôle de Johann ?
C’est une prise de rôle pour moi. Je commence les répétitions début décembre, à Rome. Je connaîtrai déjà les pas mais pour l’instant, je suis très occupé à voyager, entre la Fondation Louis Vuitton et la Chine. La première sera à Rome, le 31 décembre, j’y danserai quatre dates. Puis nous viendrons à Paris.
Avez-vous déjà dansé dans un ballet de Roland Petit ? Connaissiez-vous le chorégraphe ?
J’ai rencontré une seule fois Roland Petit. Je dansais à la Scala et lui préparait son prochain spectacle. Nous nous sommes justes croisés, il m’a dit : « Ce serait bien que vous dansiez dans un de mes ballets« , mais c’était juste avant qu’il ne meure. La Chauve-souris est ainsi mon premier ballet de Roland Petit. Ce chorégraphe avait vraiment son style. C’est pour cela aussi que je voulais absolument prendre du temps pour préparer ce rôle, avec un mois de répétition, et ne pas seulement venir une semaine avant les représentations. Je veux vraiment m’imprégner de ce style, enrichir mon répertoire avec ce ballet. Cela ne vous fait pas seulement grandir en tant que danseur, mais aussi en tant que personne. Apprendre un nouveau rôle, c’est découvrir une nouvelle facette de soi-même, et j’ai hâte de vivre cette expérience.
Avec qui travaillez-vous pour remonter La Chauve-souris ?
Je travailler avec Luigi Bonino, qui s’occupe de remonter le répertoire de Roland Petit. Mais l’équipe d’Eleonora Abbagnato, la directrice de l’Opéra de Rome, connaît très bien le style Roland Petit. Benjamin Pech (ndlr : devenue maître de ballet à l’Opéra de Rome et grand interprète du chorégraphe) est là également.
Quels sont vos liens avec le Ballet de l’Opéra de Rome ?
Cela fait déjà un moment que je travaille avec eux. J’y ai dansé Giselle, La Sylphide, le programme Noureev en juin dernier. J’ai hâte d’y retourner, je connais tous les danseurs et danseuses. Je retrouve d’ailleurs pour La Chauve-souris Rebecca Bianchi avec qui j’avais interprété Raymonda et j’en suis très heureux. C’est ce qui est agréable quand on est invité quelque part. Je pense que les danseur.se.s sont des personnes très ouvertes, alors quand vous allez dans une compagnie, vous vous sentez vraiment comme à la maison. Nous nous touchons beaucoup, nous avons un contact très physique, alors pour nous c’est normal d’intégrer quelqu’un à notre groupe. Je voyage beaucoup pour ma carrière, et pourtant je ne me sens jamais « homeless« .
Vous dansez du John Cranko à Stuttgart, Roland Petit à Rome… Qualifieriez-vous votre répertoire de néo-classique ?
Non. J’adore danser, donc pour moi peu m’importe que ce soit très contemporain ou très classique. Ce qui m’importe c’est le mouvement, et puis raconter une histoire, transmettre des impressions, parler avec son corps. C’est cette variété de styles qui est intéressante selon moi. Un soir, je peux danser un prince dans Le Lac des cygnes, et puis le lendemain Johann, et le lendemain quelque chose de très contemporain comme Sidi Larbi Cherkaoui… Pour moi, être capable de danser des styles si différents est comme un rêve devenu réalité.
En parlant de Sidi Larbbi Cherkaoui, vous dansez en ce moment son L’oiseau de feu (ndlr : l’interview a eu lieu en octobre). Qu’aimez-vous chez ce chorégraphe ?
Sidi Larbbi Cherkaoui a adapté pour Marie-Agnès Gillot et moi son Oiseau de feu. Il change certains pas, certains éléments, il change également sa vision de la pièce. J’y prends beaucoup de plaisir. C’est tellement agréable de travailler avec lui ! Il est une personne très inspirante. J’ai vu deux de ses créations à la Villette, quand j’étais à Paris pour répéter avec lui. Sa vision de la danse m’inspire beaucoup. Ses pièces ont vraiment une signification profonde. Pour moi, c’est ça le plus important : qu’il y ait un sens, une raison à danser. Vous pouvez transmettre une histoire ou un sentiment à travers l’art, la danse. En tant que public, cela me captive. Et c’est ce qui est beau dans la danse, de pouvoir captiver son public.