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L’inusable Casse-Noisette de George Balanchine par le New York City Ballet

Casse-Noisette est un ballet qui appelle les superlatifs ! En tout cas dans la production que George Balanchine créa pour sa compagnie, le New York City Ballet, le 2 février 1954. Et le programme se fait fort de le rappeler : 150 costumes, un arbre de Noël qui, de ses 3 mètres 1/2, s’agrandit pour atteindre plus de 12 mètres (ce qui immanquablement et à juste titre déchaine les applaudissements du public), les 150 danseur.se.s et musicien.ne.s qui participent à chaque représentation auxquels s’ajoutent les 125 enfants de la School of American Ballet (SAB, l’école du NYCB) qui alternent sur scène en deux distributions différentes,. Il faudrait y ajouter la débauche d’électricité nécessaire pour illuminer le grand final sans que l’on soit bien certain qu’en ces temps de réchauffement climatique, il fasse s’en enorgueillir. Mais à quoi bon être rabat-joie ? Même s’il n’a plus le goût de la nouveauté, le Casse-Noisette de Balanchine demeure un spectacle unique et dont l’identité est profondément liée à la ville de New York.

Casse-Noisette-Acte1- Les enfants.

Casse-Noisette – Acte 1, les enfants.

Derrière ces chiffres, il y a un ballet qui, pour les danseur.se.s comme pour le public, fait depuis plus de 60 ans son office de rite de passage. Nombreux sont les jeunes élèves de l’école de ballet du NYCB qui se sont retrouvés pour la première fois sur scène dans ce Casse-Noisette et ont ensuite poursuivi une carrière dans la compagnie. Et combien de parents mettent un point d’honneur à montrer à leur progéniture un spectacle qui les a émerveillés lorsqu’ils étaient enfants.

C’est tout ça, le Casse-Noisette de George Balanchine par le New York City Ballet. Et s’il fallait encore citer un chiffre, rappelons que 100.000 personnes, chaque année, convergent vers le Lincoln Center pour cette expérience unique. Et que reste-t-il de l’œuvre proprement dite 60 ans après sa création ? Peter Martins, le directeur du NYCB aura veillé depuis 25 ans à garder ce patrimoine vivant en y infusant toujours de nouveaux danseur.se.s. C’est là où le balletomane trouve son compte. Et puis il y a aussi la musique géniale de Tchaïkovski magistralement interprétée par l’orchestre du NYCB. Quel luxe d’entendre une formation entièrement dédiée à une compagnie et qui vient de nommer un nouveau chef, Andrew Litton, dont c’est la première saison.

Casse-Noisette- Acte1- Les Flocons.

Casse-Noisette – Acte 1, les Flocons.

Le premier acte est avant tout  celui des enfants. Avec 63 jeunes et très jeunes élèves de la SAB (de 6 à 10 ans), la scène leur appartient. Ils sont en tous points bluffants. Quelle tenue, quelle allure, quel sens du théâtre ! Aucune production ne sollicite autant et avec un tel bonheur de tou.te.s jeunes apprenti.e.s danseur.se.s. Ils sont le spectacle à eux seuls. Et avant que le rideau ne se referme sur cette première partie, place aux adultes avec la sublime danse des flocons qui confirme l’état de santé arrogant du corps de ballet féminin du NYCB : 16 danseuses, droites sur leurs pointes qui se croisent et se recroisent sans la moindre perceptible hésitation.

C’est une parfaite entrée en matière pour le second acte où la danse reprend ses droits. George Balanchine a placé d’entrée  la redoutable variation dite de la Fée Dragée. Megan Fairchild l’interprète avec une précision métronomique et beaucoup d’assurance. Il y manque peut-être une note de fantaisie.

Casse-Noisette- Acte2- Megan Fairchild ( la FéeeDragée)

Casse-Noisette – Acte 2, Megan Fairchild (la Fée Dragée)

Mais la vraie star  de la soirée fut sans conteste Sterling Hyltin dans l’autre rôle féminin du ballet, celui de la Goutte de Rosée : elle se joue de toutes les difficultés introduites par George Balanchine dans cette variation où la ballerine doit incarner une nymphe dans les airs, ce qui impose légèreté, hauteur de sauts et vitesse. Sterling Hyltin a tout cela. Elle est aujourd’hui l’une des danseuses les plus abouties de la compagnie.

Vient ensuite le défilé du Royaume des bonbons qui menace chacun.e dans la salle d’un coma diabétique ! George Balanchine, son décorateur Rouben Ter-Arutunian et sa costumière Karinska ont inventé un univers kitsch avant la lettre. Dans ce royaume des douceurs qui est un prétexte pour présenter la succession des divertissements, Savannah Lowery offre un peu de douce amertume fort bienvenue avec le solo  Coffee (café) magnifiquement exécuté, avec ce qu’il faut de tempérament et d’érotisme contenu.

Casse-Noisette-Acte2-Daniel Ulbricht (Le Sucre Candie)

Casse-Noisette – Acte 2 – Daniel Ulbricht (le Sucre Candie)

Vainqueur à l’applaudimètre, Daniel Ulbricht, Principal du NYCB, reprend encore cette saison son rôle de Candy Cane (sucre candie) dont il s’est fait le champion grâce à sa technique exceptionnelle, la qualité de ses sauts et une présence scénique affirmée. Il passe, repasse et s’enroule dans son cerceau avec une aisance inégalée. C’est un moment bref de pure virtuosité et qui niera qu’ils sont indispensables dans un ballet ?

Puis vient l’unique pas de deux de ce Casse-Noisette, l’un des plus difficiles que George Balanchine ait jamais écrit. Il n’y rien à redire à la prestation de Megan Fairchild et de son cavalier Adrian Danchig-Waring. L’un et l’autre sont techniquement parfaits. Les portés à l’épaule, aussi spectaculaires que difficiles d’exécution, sont réalisés sans la moindre hésitation et dans un rythme impeccable. Mais il manque entre ces deux partenaires ce qui s’appelle peut-être l’alchimie ou quelque chose de plus abandonné. Une forme de spontanéité retrouvée sur scène qui ferait oublier tout le long travail nécessaire pour arriver à ce niveau d’excellence. C’est beau bien sur mais sec et sans la moindre émotion.

Casse-Noisette-Acte2- Adrian Danchig-Waring ( Le Cavalier).

Casse-Noisette – Acte 2 – Adrian Danchig-Waring (le Cavalier)

Cela pourtant ne saurait gâcher le spectacle puisque le Casse-noisette de George Balanchine est avant tout un divertissement géant, quasiment hollywoodien. Qu’il soit toujours aussi populaire plus de 60 ans après sa création ferait taire toute critique. « The Nutcracker » de Mister B. est devenu un standard.

 

Casse-Noisette de George Balanchine par le New York City Ballet au Theatre  David H. Koch. Avec Megan Fairchild (la Fée Dragée), Adrian Danchig-Waring (son Cavalier), Sterling Hyltin (la Goutte de Rosée), Daniel Ulbricht (le Sucre Candie) et Savannah Lowery (Café). Mardi 8 décembre 2015. À voir jusqu’au 3 janvier 2016.

 

Comments (1)

  • Aventure

    Merci pour ce compte-rendu qui donne très envie de découvrir cette version du ballet ! 🙂

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