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Siddharta, ou la vision de Bouddha d’Angelin Preljocaj

Voila longtemps que je l’attendais, Siddharta, la création d’Angelin Preljocaj pour le Ballet de l’Opéra de Paris. J’y suis finalement allée, lors de la seconde représentation du ballet.

Tout a commencé avec un gros coup de stress. Toute naïvement, je me suis pointée une demi-heure avant le spectacle, à 19h, me disant que vu que c’était une création contemporaine, ça n’allait pas se battre pour les places de dernière minute. Erreur ! La foule était nombreuse, et j’étais la quatrième Pass Opéra. Ce Pass super, qui permet d’avoir des bonnes places à 10 euros, mais qu’on est jamais sûr d’en avoir.

19h25 : Je suis la prochaine Pass dans la file, mon Pass et mon billet de 10 euros dans la main, pleine d’espoir.

19h26 : Un retour de première catégorie. Si personne dans la file normale n’est prêt à débourser 84 euros, elle est pour moi…

19h27 : Elle est pour moi !

19h28 : Je traverse en trombe les 10 mètres sous la pluie qui séparent la billetterie de l’entrée principale, je manque de m’affaler une dizaine de fois sur le sol glissant de l’entrée avec mes chaussures à talons mouillés (l’architecte n’a décidément pensé à rien), et bouscule un couple de vieux grimpe les escaliers.

19h29 : J’ai juste la meilleure place de Bastille, yehhh.

19h32 : Même pas pile à l’heure, c’était bien la peine de courir.

Puis place au spectacle.


La première chose qui me soit venue à l’esprit une fois les lumières rallumées, c’est : whaouuuuuuuu ! Parce que visuellement, on s’en prend pleins les yeux. Claude Lévêque n’y est pas allé de main morte. Les installations sont imposantes, et que l’on aime ou pas, surprennent indéniablement. Les passages de groupe sont, comme souvent chez Preljocaj, un mélange de fluidité, force et sensualité. Le tout magnifié par de très beaux costumes et un vrai travail des lumières. On n’est clairement pas dans la danse contemporaine austère.

Ceci dit, mise à part cette claque visuelle à chaque tableau, est-on ému ? Et bien, pas vraiment. Bien sûr, il y a des passages très beaux. Outre les passages du corps de ballet, je pense au duo Siddharta/L’Eveil, quand la deuxième s’échappe accrochée aux cintres. On reste néanmoins dans une beauté froide, figée. A aucun moment on n’est pris à la gorge par l’émotion, on retient son souffle, on oublie les passages un peu ennuyeux grâce à un pure moment de grâce.


Ce qui me fait penser que, même si ce ballet aligne les grands noms, je ne pense pas qu’il passe à la postérité.

Voila, deuxième représentation, et j’enterre ce ballet.

C’est ça les journalistes culture.

Cette critique a été faite après mon premier Siddharta. Mon opinion a quelque peu changé au cours des différentes distributions. A suivre plus tard.

Je ne peux m’empêcher de faire une comparaison avec un autre ballet d’Angelin Preljocaj créé pour la Ballet de l’Opéra de Paris, Le Parc.

Le Parc n’est pas parfait. On s’ennuie un peu parfois, tout n’est pas forcément extrêmement inspiré. Mais il y a un moment, le pas de deux de l’Abandon, qui vous fait tout oublier. Vous pouvez avoir fait trois heures d’attente, avoir baillé tout le ballet, tout est occulté par ce duo. Un pur moment de grâce sublime qui prend n’importe qui à la gorge, une émotion primitive. On ne sait pas trop pourquoi, mais la gorge se serre, les larmes viennent aux yeux. Et ce duo suffit pour avoir passé une très belle soirée.

Je le remets d’ailleurs, juste pour le plaisir. Version Manuel Legris/Aurélie Dupont, filmé par Cédric Klapisch pour son documentaire Aurélie Dupont l’espace d’un instant.

Malgré la créativité et la profondeur indéniable de Siddharta, c’est ça qui m’a manqué.

Parlons néanmoins un peu des interprètes.

Jérémie Bélingard est un prince félin et un peu rebelle (et soooooooooooooo sexy). Pour sa scène finale, c’est un mélange de force et de plénitude. Mais entre les deux ? Son chemin vers la spiritualité se fait un peu seulement lors des cinq dernières minutes, on ne sent pas un vrai parcours intérieur durant tout le ballet. Le spectacle dure 1h50 tout de même. Seul sur scène, Jérémie Bélingard explose et fait preuve d’un vrai charisme, se servant comme il se doit des installations. Mais au milieux du corps de ballet, il a bizarrement plus de mal à prendre sa place. 


Clairemarie Osta est une Eveil lutin. Etre Immatériel, elle s’amuse avec Siddharta, le titille, l’hypnotise. Mais le lutin est petit, et reste parfois écrasé par les installations, en ne parvenant plus à prendre sa place. C’est surtout flagrant dans la scène de l’Illumination. Son rôle est pourtant primordial. Mais l’immense maison qui la surplombe prend toute la place, et cette scène si importante perd en intensité. Néanmoins, leur duo fonctionne très bien, surtout leur jeu du chat et de la souris du tableau VIII qui est vraiment réussi.

Muriel Zusperreguy est une très belle Yasodhara, l’épouse de Siddharta, à la fois aguicheuse et aimante. Belle surprise moi, je connaissais très peu cette danseuse et elle a su s’imposer. Alice Renavand fait tout ce qu’elle peut dans son rôle de la villageoise Sujata et montre une belle personnalité. Mais je ne vois pas trop l’intérêt dramatique de ce personnage. Marc Moreau est un bon compagnon, mais reste en retrait par rapport à Jérémie Bélingard.

Wilfried Romoli est tout simplement impérial dans on rôle du roi. « On se demanda pourquoi diable il avait été rappelé de sa retraite pour produire ce qu’il eut à produire » écrit Daniel Conrod dans sa critique dans Télérama. Sauf que la force d’un rôle ne tient pas à son temps sur scène. C’est vrai, Wilfried Romoli a assez peu de chose à danser. Mais ce qu’il fait est rempli d’intention et de présence, ajoutant une force dramatique indéniable au ballet. L’un de mes moments que je retiens reste d’ailleurs la scène finale, et son inclinaison de la tête face à son fils transfiguré. Magnifique. 

© Photos : Anne Deniau /Opéra National de Paris. Les deux premières photos sont avec Nicolas Le Riche et Aurélie Dupont.


Comments (2)

  • shana

    bon­­­­jour,
    je viens de décou­­­­vrir ton blog, j’aime bien la flui­­­­dité de tes arti­­­­cles!
    je vais le met­­­­tre en lien sur le mien!
    a bien­­­­tot sur le forum dan­­­­ser en france


    > Merci Shana !

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  • Camille

    Bon­­­­jour,

    Je suis tom­­­­bée par hasard sur ton blog il y a quel­­­­ques jours. Je m’inté­­­­resse depuis peu à la danse clas­­­­si­­­­que (je ne pra­­­­ti­­­­que pas), c’est un uni­­­­vers que je trouve magni­­­­fi­­­­que et j’aime­­­­rais mieux le con­­­­naî­­­­tre. Je vais déjà com­­­­men­­­­cer par lire plus atten­­­­ti­­­­ve­­­­ment ton blog (il est dans mes favo­­­­ris ^^) et si, à l’occa­­­­sion, tu as le temps de me don­­­­ner quel­­­­ques réfé­­­­ren­­­­ces je suis pre­­­­neuse. J’ai déjà vu le film de Fre­­­­de­­­­rick Wise­­­­man et le docu­­­­men­­­­taire sur Auré­­­­lie Dupont mais habi­­­­tant loin de la région pari­­­­sienne et dans une petite ville je n’ai pas la chance de pou­­­­voir assis­­­­ter à des repré­­­­sen­­­­ta­­­­tions…
    Voilà, con­­­­ti­­­­nue d’écrire, je te lis avec plai­­­­sir,

    A bien­­­­tôt

    Camille


    > Merci Camille 🙂 Pour les docu­­­men­­­tai­­­res, je te con­­­seille Tout près des Etoi­­­les de Nils Taver­­­nier, sur le Bal­­­let de l’Opéra de Paris. La com­­­pa­­­gnie a aussi édité pas mal de DVD de ses spec­­­ta­­­cles, faci­­­le­­­ment trou­­­va­­­bles sur les sites d’achat en ligne comme la Fnac. Sinon, You­­­tube est un ami fidèle 😉 

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