Gala Hommage à Yvette Chauviré – Ballet de l’Opéra de Paris
La grande Yvette Chauviré, ballerine emblématique du XXe siècle au Ballet de l’Opéra de Paris, aurait eu 100 ans le 22 avril. L’occasion idéale pour un gala hommage de la part de la compagnie, d’autant plus que la Danseuse Étoile est décédée il y a quelques mois, le 19 octobre 2016. Si peu de monde aujourd’hui a vu finalement danser Yvette Chauviré (même si cette dernière a fait ses adieux à la scène à plus de 50 ans), ce spectacle était l’occasion de se pencher sur l’héritage de la compagnie, saluer toute une époque à l’heure de regarder vers le XXIe siècle. Las… L’on savait que le programme serait peu consistant. Pas l’impréparation qui a semblé régner sur scène durant toute la soirée (aussi bien du côté des danseur.se.s que de l’orchestre ou de la technique).
Tout avait pourtant joliment commencé avec le traditionnel et toujours émouvant Défilé du Ballet, chaleureusement applaudi ce soir-là. Et pour cause, il s’agissait du premier Défilé de trois jeunes Étoiles (Hugo Marchand, Léonore Baulac et Germain Louvet), le dernier aussi d’artistes très appréciés (Emmanuel Thibault), et l’occasion globale pour le public de saluer ses chouchous, des grandes Étoiles à une certaine ligne de deux Premiers danseurs.
Tout avait aussi bien continué avec le Grand Pas classique de de Victor Gsovsky, créé spécialement pour Yvette Chauviré en 1949. Un morceau de choix pour un gala, une démonstration technique tout autant que stylistique dans la grande et pure tradition de l’élégance de la danse française qui n’appartient qu’à elle. Mathias Heymann et Myriam Ould-Braham ont d’emblée ce chic en scène. Voilà pour lui une danse moelleuse et raffinée qui surprend toujours. Voilà pour elle des ports de bras, des épaulements, ce soin si particulier apporté aux détails et qui fait le style justement. Et puis voilà aussi une faille technique, qui peut arriver à tout le monde, mais qui ce soir a sonné le début d’un enchaînement de ratés. Il est difficile d’en vouloir à ce couple, deux artistes si attachants et qui ont été si bouleversants dans Giselle ou plus récemment Le Lac des cygnes. Mais ce soir, c’était gênant. Amandine Albisson et Josua Hoffalt enchaînent avec le dernier pas de deux des Mirages de Serge Lifar. Ils sont investi.e.s, à l’aise (notamment lui) dans ce répertoire narratif. Mais huit minutes de pas de deux et voilà que c’est déjà fini. Pas de variation, même pas un acte en entier, c’est qu’il faut enchaîner avec l’entracte de 30 minutes. Le couple a donné un avant-goût d’un très joli moment de danse, l’on aurait bien aimé plus qu’une évocation.
L’École de Danse entame la deuxième partie avec un court (3 minutes !) des Deux Pigeons d’Albert Aveline. Les Petits rats sont investi.e.s (voilà, il faut bien le dire, l’un des extraits les mieux préparés du spectacle) et Bleuenn Battistoni défend crânement sa variation de la Gitane malgré le tempo aléatoire de l’orchestre. Mais trois minutes et puis s’en vont. Il était sûrement difficile de demander plus à des élèves qui viennent de terminer une superbe et exigeante série de spectacles avant d’enchaîner avec les vacances scolaires. Dans ce cas, des artistes de la compagnie n’auraient-ils pas pu s’emparer de ce ballet, lui aussi représentatif de toute une époque ? Faire venir l’École de Danse pour si peu semblait bien ingrat. Dorothée Gilbert a enchaîné avec La Mort du Cygne de Michel Fokine. La ballerine qui a tant brillé la saison dernière montre son statut d’Étoile internationale. La poursuite la cherche au début (le fait qu’elle entre côté jardin n’a pas été une information transmise visiblement) avant d’illuminer la scène de ses bras ondulants et poétiques, qui donnent le regret de ne pas l’avoir vu en Odette en décembre dernier. Plus que l’émotion, la Danseuse Étoile travaille les postures, celle d’un style, d’une époque là encore. Un temps suspendu.
Et puis c’est déjà l’heure du final avec Suite en blanc tronqué (10 minutes pas plus, tant pis pour le beau final) de Serge Lifar. Ludmila Pagliero et Mathieu Ganio font honneur à leur statut d’Étoile avec un magnifique adage. Style, présence, élégance et un certain glamour : ça c’est l’Opéra ! Léonore Baulac envoie joliment une belle variation de la Flûte dansée avec charisme, même si le certain glamour lifarien manque à l’appel. Plutôt que de l’imputer à la danseuse, le manque cruel de répétition semble en être la cause, comme le reste du spectacle pourtant prévu il y a six mois. Le chef prend pour tout le monde et récolte quelques huées bien senties (alors que, même si l’orchestre a joué continuellement comme s’il n’y avait personne en scène, il y a eu pire soirée musicalement parlant). La soirée se termine par un joli film d’archives sur Yvette Chauviré. Même s’il aurait été plus sensé de le placer au début du spectacle, les images font revivre une ballerine hors du commun. Dans ses paroles – si justes, si profondes – comme dans sa danse encore actuelle. Sa Giselle notamment respire l’universel. La technique classique passe pourtant vite. Mais la danse d’Yvette Chauviré – et c’est ce qui était vraiment frappant dans ce film – respire la modernité. Quelques applaudissements, les lumières se rallument. Le dîner attend dans le Foyer. Un.e généreux.se mécène s’intéresse-il.elle forcément plus à son assiette qu’à la danse ? (spoiler alert : non).
Hommage à Yvette Chauviré par le Ballet de l’Opéra de Paris au Palais Garnier. Défilé du Ballet d’Albert Aveline et Serge Lifar ; Grand Pas classique de de Victor Gsovsky avec Mathias Heymann et Myriam Ould-Braham ; Les Mirages de Serge Lifar (extrait) avec Amandine Albisson et Josua Hoffalt ; Les Deux pigeons d’Albert Aveline (extrait) avec Bleuenn Battistoni (la Gitane) et les &lèves de l’École de Danse ; La Mort du Cygne de Michel Fokine avec Dorothée Gilbert ; Suite en blanc de Serge Lifar (extraits) avec Ludmila Pagliero et Mathieu Ganio (adage), Léonore Baulac et Germain Louvet (la Flûte). Samedi 22 avril 2017.
Elisabeth92
J’ai fait le déplacement tout exprès pour la mémoire de cette grande dame que j’ai vu si souvent danser Giselle en son temps… déçue par la minceur du programme en effet, tout de même compensé par le Défilé…. curieux d’évoquer Yvette Chauviré sans une variation de Giselle, d’un passage d’Istar pour évoquer sa nomination d’étoile .. . Grande frustration de n’avoir vu que 10 minutes de Suite en blanc, ballet court qui aurait pu être donné dans son intégralité…
On sentait en effet que l’ambiance était plus tournée vers le dîner de gala, et que pour les non participants, il était temps de dégager au plus vite vers 22h15…
lahaye marie
comme je l’ai déjà dit à diverses reprises. Le corps de ballet et les danseurs du corps de ballet de l’opéra de Paris sont devenus trop « people »; danseuses représentant des marques etc… ne suis plus fan du tout
Lili
Cette photo (Ganio-Pagliero) !!!! C’est vrai que ce partenariat était très réussi, je n’avais pas eu l’occasion de les voir ensemble et c’était très harmonieux.
Cygne blanc
2 mots: cher et déception … 🙁 J’ai été vraiment gêné d’avoir insisté auprès de ma soeur pour qu’elle assiste à ce gala. Nous avons toutes les deux apprécié le défilé, mais cette soirée s’est malheureusement résumée à peu près à cela (le film était intéressant aussi)
Choï
Je suis sortie franchement fâchée, et pourtant sue j’aime l’opéra de Paris et tous ses danseurs. Mais là ça faisait beaucoup pour si peu à voir et tellement cher du ticket : 120€ en catégorie 2 . J’ai eu honte quand j’ai vu tous les illustrés danseurs qui ont assisté à ce foirage quasi intégral. Une affreuse soirée qui sera difficile à oublier.
Julien
J’avais assisté au précédent gala en présence d’Yvette Chauviré qui arrivait sur scène en fin du défilé du corps de ballet, une très belle soiree.
Et cette fois j’ai assisté à une terne soirée en hommage à cette magnifique dame de la danse decedee récemment à l’occasion de l’anniversaire de ses 100 ans…..sinistre programme expédié….j’avais emmené une petite de 8 ans qui fait une école de danse pour faire connaissance avec cette danseuse ..heureusement qu’il y a eu le défilé et le film qui a eu du mal à démarrer.
Qui a pu avoir l’idée de cette programmation ? Le traiteur qui organisait le dîner…..?