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Les espagnolades de Paquita, épisode 2

Billet que je pourrais sous-titrer : ode à Myriam Ould-Braham.

Après toute une journée de concours, ce spectacle fut un vrai délice rafraîchissant, même si je suis restée deux heures debout. Mais d’abord, quand on aime, on ne compte pas. Et ensuite, j’aurais pu rester perchée une heure de plus sur mes talons sans problème face à un si joli spectacle.

Je l’ai déjà dit ici, j’ai une véritable admiration pour Myriam Ould-Braham. Elle représente pour moi l’idéal de la ballerine classique : une technique extrêmement sûre mais sans jamais tomber dans le démonstratif, une classe naturelle en scène, un vrai brillant toujours élégant, un moelleux irrésistible, un vrai sens musical, et un personnage, un parti pris artistique, défendu du premier au dernier pas.

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C’est exactement ce que nous a fait Myriam Ould-Braham dans Paquita, ce samedi 6 novembre à Garnier.

Elle n’a pas l’exubérance d’une Dorothée Gilbert. Donc elle ne va pas surjouer de ce point de vue. Elle est née aristocrate, elle l’est, même après une enfance passée au milieux des gitans. Ce qui ne l’empêche pas d’être joueuse, parfois aguicheuse et coquette. C’est autre chose que ce que font les autres danseuses. Elle a dansé la Paquita de Myriam Ould-Braham. Et lorsque je vais voir un spectacle, c’est ce que j’attends. Ne pas voir la même chose tous les soirs, mais voir chaque personnage interprété avec la personnalité de l’artiste. Cette danseuse a cette grande qualité. Elle défend jusqu’au bout son personnage, son parti pris artistique. Après, on adhère ou on n’adhère pas ce qu’elle présente, il se trouve que j’ai complètement adhéré, d’où ma si agréable soirée.

Lors du premier acte, Myriam Ould-Braham était parfaitement dedans, avec une pantomime très drôle, tout à la fois enjouée, timide face au prince, et des variations plus enthousiasmantes les unes que les autres (ohhhh, ce bas de jambes, ce moelleux dans les bras…). Yann Saïz campe un Inigo très différent de celui de Stéphane Phavorin. Ici, pas de blague, pas de grimace, Inigo est un vrai méchant. Mais face à la fragile Myriam, ça marche plutôt bien.  

Quand à Karl Paquette, qui jouait le rôle de Lucien, et bien c’est incroyable, mais je l’ai enfin apprécié. A force d’entendre de si grands compliments sur lui (Kaaaaaaaaaarl), je me demandais sérieusement ce que je ratais, et me concentrais fortement dès qu’il entrait en scène pour essayer de voir ce qui m’échappait. Sans MA Gillot à porter, il semblait beaucoup plus à l’aise, et ça décollait enfin dans ses variations, même si je n’avais pas en face de moi la démonstration d’une technique classique irréprochable.

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Et puis les deux ensembles, ils étaient vraiment adorables. Avec son allure altière et ses cheveux blonds, lui est un prince idéal. Elle est Paquita idéal, c’est un couple idéal pour ce ballet, tout ce qu’ils font est délicieux, et puis c’est tout. Certes, nous ne versons pas des torrents de larme (c’est le ballet qui veut ça), mais il faudrait être dans un très mauvais état d’esprit pour ne pas succomber à leurs charmes. C’était aussi savoureux qu’une coupe de champagne et un macaron framboise.

Bref, un vrai petit régal.

Le deuxième acte commence aussi bien. Myriam Ould-Braham est parfaite dans l’aristocrate qui retrouve sa place. Elle a tellement de style et d’élégance, chez elle, tout semble naturel. Mais soyons honnête, aussi savoureuse soit-elle, elle n’a pas tenu le Grand Pas.

Le Grand Pas, c’est une monstruosité technique, où plus ça avance, plus il faut briller pour finir en apothéose. MA Gillot avait su gagner mon enthousiasme grâce à cette fin.  Myriam Ould-Braham a fait une magnifique diagonale de grands jetés, avec beaucoup d’autorité sans y perdre son élégance. Idem pour la série de fouettés, qui commençaient très bien, avec un minuscule ralentissement au début de chaque fouetté, cette petite accentuation musicale qui fait tout la différence, et le troisième doublé… Mais la belle ne tient pas. Au milieu de l’exercice, elle se désaxe, manque de rentrer dans le corps de ballet, et éclipse la fin. Les derniers pas furent une lutte physique, même si Karl Paquette, en bon partenaire, l’a bien aidé. Mais nous n’avons pas eu droit à l’apothéose.

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Pour excuse, Myriam Ould-Braham rentre d’une très longue blessure, presque un an loin de la scène. Et Paquita est un rôle monstrueusement difficile. Donc je lui pardonne.

Le lendemain, Ludmila Pagliero dansait ce même rôle. Je ne l’ai pas vu, mais à la lecture de nombreux commentaires, il y avait prédominance technique. Prédominance de présence, de musicalité, d’élégance, de moelleux, je ne sais pas. Mais prédominance technique, c’était apparemment indéniable. Et cela pourrait trancher lors d’une prochaine nomination.

© Photos : Agathe Poupeney / Opéra national de Paris

Commentaires (3)

  • aah que j’aurai aimé la voir!!!

    les photos sont très belles. C’est toi qui les as prises?

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  • Rhhoooo, tu me donnes des envies de champagne à 10h du matin maintenant! 😆
    Plus sérieusement je te rejoins sur Myriam. Je suis émerveillée à chacune de ses représentations.
    Merci pour ce riche compte-rendu!

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  • @ Cams : je serais bien incapables de faire de si belles photos. 😉 Elles sont d’Agathe Poupeney, pour le service de presse de l’Opéra.
    @ Alice : Ah non, pas d’alcool si tôt, même à Barcelone 😆 Myriam est vraiment l’une de mes danseuses préférées, comme toi, j’enrage de la voir si peu distribuée.

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