Lobby – Tie Break
Venus des Pockemon Crew, groupe de danse hip hop multi-récompensé un peu partout dans le monde, Moncef Zebiri, Fares Baliouz, Patrick Mbala Mangu et Naguéyé Mahmoud se sont émancipés pour créer leur propre troupe Tie Break. Leur spectacle Lobby s’inspire de leur vie de danseur en tournée, où les hôtels devenaient leur seconde maison. Du breakdance bien envoyé (les neuf interprètes ont déjà une sacrée expérience scénique derrière eux), mâtiné d’acrobaties et de danse africaine pour un tout bien sympathique. Mais qui ne dépasse pas ce stade par un manque parfois assez cruel de dramaturgie.
Avec les Pockemon Crew, Moncef Zebiri, Fares Baliouz, Patrick Mbala Mangu et Naguéyé Mahmoud, les quatre chorégraphes de Lobby, ont sillonné la planète. Les chambres d’hôtel devenaient leur seconde maison, avec leur lot de personnages et situations que l’on retrouve aux quatre coins du monde. C’est de cette idée qu’est parti leur spectacle : un hall d’hôtel et ces gens qui s’y croisent, du groom débutant au client bling-bling, en passant par le concierge tatillon ou l’homme d’affaires pressé. Les rencontres dans l’ascenseur, le hall, le porte-bagage ou le dormeur important à ne pas réveiller : tout devient prétexte au jeu et à la danse. Celle de Tie Break est du bon hip hop bien envoyé, avec quelques accents d’acrobatie pour impressionner un minimum le public et ce qu’il faut d’humour. Les danseurs de la troupe connaissent leur métier et n’ont pas peur de le montrer. L’ambiance choisie est très 60’s, avec un hall à la Grand Budapest Hotel comme on n’en fait plus et une bande-son menée par Nina Simone, qui donne un groovie au breackdance pas désagréable.
Voilà tous les ingrédients en place pour un spectacle « feel good ». Mais quel dommage que la troupe y soit restée à la porte. Lorsque le spectacle commence, chacun arrive à son tour sur scène et prend sa posture : le groom avançant son porte-bagage, le concierge derrière son bureau, le bling-bling les pieds sur la table du hall. Les costumes sont bien là, mais pas les caractères, les tempéraments différents et ce qu’il faudrait pour installer une petite dramaturgie. On a travaillé l’apparence, pas le fond. Tout le monde se ressemble ainsi un peu sur scène, et au lieu de créer des saynètes, cela devient un enchaînement de numéros, alors que le cadre et l’idée de départ ne pouvaient que débrider l’imagination. Il manque la surprise, des traits de caractère qui étonnent, un fil conducteur un peu plus épais qu’un décor. Le groupe tend, de plus, parfois un peu trop vers l’acrobatie, où il s’en sort honorablement mais ne peut rivaliser avec les nouveaux cirques contemporains, ce qui ne les met pas toujours en valeur alors que ce sont tous de brillants danseurs.
Le groupe rend néanmoins ce spectacle sympathique par la générosité des interprètes en scène, et leur envie de faire plaisir au public. Ils n’ont finalement pas la prétention d’autre chose, et savent y faire pour faire pousser quelques « Oh » d’admiration après un duo d’acrobatie, quelques rires d’ados ou inviter tout le monde à taper dans ses mains sur un ensemble hip hop énergique et franchement virtuose. Lobby ne tombe pas non plus dans le piège du temps qui s’étire, et sait s’arrêter à temps pour se choper une ovation spontanée et chaleureuse du public, surtout qu’ils dansent à la maison. Tie Break est avant tout un travail collectif, avec quatre chorégraphes et danseurs à sa tête, peut-être manque-t-il un ou une vrai.e chef.fe pour rendre le tout plus percutant. Les qualités et l’énergie des interprètes sont en tout cas bien là pour aller plus loin.
Lobby de Moncef Zebiri, Fares Baliouz, Patrick Mbala Mangu et Naguéyé Mahmoud par le groupe Tie Break, à la Maison de la Danse. Avec Moncef Zebiri, Fares Baliouz, Patrick Mbala Mangu, Naguéyé Mahmoud, Rémi Michault, Wassim Beriss, Yves Constant Bankoué et Osmane Camara. Vendredi 18 mai 2018.