Les Clichés de la Danse – Le tutu en cours de danse
Débuter la danse classique est source d’un riche imaginaire. Parmi ces symboles, le tutu est l’un des plus forts. Qui n’a pas osé franchir la porte d’un cours de danse de peur d’y devoir d’emblée y porter un tutu ? Et quel Balletomane ne s’est pas entendu dire : ‘Tu fais de la danse ? Ah mais tu portes un tutu alors !« . Non, le tutu, objet symbolique de la Ballerine, ne se porte que sous le feu des projecteurs. Mais cette caricature a un fond de vérité historique. Notre série Les Clichés de la danse traverse cette fois-ci la frontière qui sépare le mythe du tutu de la réalité scénique.
Le monde d’avant
La danseuse Marie Sallé (1709-1756) ajoutait à son corset et son jupon une robe de mousseline. Cette superposition de froufrous est une révolution à la veille des événements du même nom. Plus tard, la mode de La Sylphide (1832) balaye les lourdeurs de la tenue. Marie Taglioni immortalise ainsi ce rôle avec sa jupe mi-mollet montée sur plusieurs jupons.
C’est cette forme dite romantique fut représentée en abondance sur de nombreux dessins et de célèbres peintures, et participa au mythe du tutu de la ballerine. Il n’y a en effet qu’un pas pour se rappeler les peintures d’Edgar Degas. L’uniforme par excellence des danseuses s’impose. Tulle plus tulle égale un seul mot : tutu. Et au milieu du XIXème siècle, les Petits rats trottaient de couloirs en couloirs ceinturés de leur tenue tout de tulle. Le tutu peut être l’uniforme du quotidien, il devient aussi ce qui représente la ballerine à travers ces peintures qui ont traversé les époques.
Le monde d’après
Mais le XXème siècle vient tout chambouler. Les guerres, la pauvreté, les manques d’approvisionnement s’opposent à l’innovation, la création et les nouveaux textiles. Le tutu se raccourcit jusqu’à son maintien en plateau. Ce siècle apporte aussi une pointe d’esthétique et de chorégraphie. Le corps devient une œuvre. La ligne du corps crée du phrasé et de la ponctuation. Oubliez le tulle, la mousseline et autres taffetas pour préférer le justaucorps, les collants ou l’académique, qui laissent apparaître les corps.
La professionnalisation du métier d’artiste entraîne l’utilisation systématique de la tenue de cours que vous connaissez. Les cours de danse représentés sur les peintures de Degas ne sont ainsi au XXe siècle plus d’actualité. Cependant, le tutu peut être parfois porté en cours. En répétition par exemple, lors du travail des grands ballets académiques comme Le Lac des Cygnes ou Giselle. Mais les amatrices peuvent aussi s’y essayer. En tant que professeure de danse, il m’arrive ainsi de proposer à mes élèves des « tutu parties », soit un cours de danse en tutu, qui attire toujours autant d’intéressées. Dans les deux cas, il y a un travail d’adaptation et de mise en place. Le passage de bras, l’axe du corps, et les portés sont autant de gestes à revoir. Il y a aussi le mental : comment ne pas voir le style et l’émotion du geste magnifié à la seule vue de son corps en tutu au miroir ?
Alors en ces temps improbables où les cours de danse se font par Zoom, n’hésitez pas à mettre de la joie et du rire dans votre danse. Pour le prochain cours virtuel, tenue correcte exigée et tutu exigé !