Écoles de danse – Ouverture ou fermeture, un point sur la situation
« J’ai rien compris : les écoles de danse, elles ont le droit d’ouvrir ou non ?« . Voilà l’une des questions que nous avions incluses dans notre article humoristique « Les 30 phrases de la Danse de 2020… Que l’on ne veut plus entendre en 2021 ». Pour cette dernière, c’est mal parti. Alors que les cours de danse amateurs pour mineurs avaient pu reprendre le 15 décembre, les nouvelles mesures gouvernementales du 16 janvier ont changé la donne. Des écoles de danse ont dû à nouveau fermer leurs portes et reprendre les cours en visio… Mais pas toutes ! Associations, écoles privées, conservatoires : la situation est ainsi très différente selon les régions, certaines écoles ouvrant même après le couvre-feu, d’autres devant complètement fermer. Avec beaucoup d’incompréhension sur le terrain et des directions d’écoles de danse se retrouvant face à des informations contradictoires. Alors comment savoir si votre école de danse a le droit d’ouvrir ? DALP fait le point sur la situation.
EDIT 18 février – Les cours de danse pour enfants en amateur sont désormais eux-aussi interdits.
Cours de danse en présentiel : pour qui
Tout d’abord, faisons le point sur ce qui n’a pas changé depuis plusieurs mois.
Les pré-pros et pros
Les cours de danse des cursus de formation professionnelle sont toujours maintenus et ne sont pas compris dans ces nouvelles mesures. Tout comme pour les danseurs et danseuses professionnelles, ces classes n’ont pas connu de coupures depuis la rentrée de septembre et ont même pu continuer pendant le confinement. Les cours peuvent se dérouler normalement, sans masque ou distanciation (pour les cours de pas de deux notamment), même si beaucoup ont mis en place des aménagements, avec notamment les cours théoriques (solfège, anatomie, etc.) en visio. Tous les cours des cursus des Conservatoires supérieures, en sport-étude et horaires aménagés des écoles privées, les classes de danse CHAD des CRR, etc. continuent donc leurs cours de danse.
Les adultes amateurs
Les cours de danse pour les adultes amateurs restent toujours interdits, comme ils le sont depuis cet automne. Ils ne sont pas compris dans ces nouvelles mesures.
Les enfants amateurs
La question se pose donc pour les nombreux cours de danse pour mineurs (enfants et adolescents) pratiquant la danse dans un cursus amateur. Ces cours ont pu reprendre logiquement le 15 décembre dernier. Mais ces nouveaux décrets de janvier ont changé la donne pour certaines écoles, et c’est pour ces classes que la question du retour possible en studio se pose. La suite de l’article ne porte ainsi que sur ces cours de danse pour enfants (moins de 18 ans) en amateur.
Dans la loi
Les différents décrets officiels sont à retrouver sur le fil d’information et d’appui au secteur chorégraphique Covid-19 du Centre National de la Danse-CND (à ne pas confondre avec la CND-Confédération Nationale de Danse). Ce fil, regroupant les informations officielles fournies par le ministère de la Culture dont dépendent les écoles de danse, regroupe beaucoup d’informations très utiles. À consulter très régulièrement.
Les décrets
Selon le décret du 15 janvier 2021, les écoles de danse dépendant du secteur culturel sont autorisées à ouvrir pour les personnes mineures en amateur. « Le décret n° 2021-31 a suspendu les activités physiques et sportives en intérieur pour les mineurs, en milieu scolaire et extrascolaire. Ces dispositions ne concernent pas l’enseignement artistique et la pratique amateur dans le secteur chorégraphique« , indique le fil de la CND. « Les activités d’enseignement de la danse sont autorisées pour les mineurs au sein des ERP de type R (établissements d’enseignement de la danse), de type X et CTS (établissements sportifs clos ou couverts et salles omnisports) et de type L (uniquement pour les salles à usages multiples / salles polyvalentes)« .
Cela concerne donc les écoles de danse considérées comme activité culturelle, en général proposant des cours de danse classique, contemporaine et jazz. Les écoles de danse de couple sont dans leur très grande majorité affilées à la Fédération Française de Danse (FFD) et sont considérées comme des activités sportives, ne tombant pas sous le coup de la dérogation des établissements culturels et devant donc restées fermées. La FFD indique sur son site qu’elle a « sollicité les ministères de la Culture et chargé des Sports lundi 18 janvier » pour obtenir des réponses claires.
Les activités d’enseignement de la danse sont autorisées pour les mineurs
Pour les écoles de danse pouvant rouvrir leurs cours de danse aux mineurs, elles ont aussi l’autorisation, selon le décret du 19 janvier, de continuer leurs cours de danse même au-delà du couvre-feu (18h dans toute la France) : « la ministre de la Culture, dans son audition auprès de la commission des affaires culturelles de l’Assemblée nationale, a indiqué que les établissements d’enseignement artistique bénéficiaient d’une dérogation de déplacement en dehors des horaires de couvre-feu pour les cours qu’ils organisent« , précise ainsi le CND. Même chose pour le port du masque : il n’est pas obligatoire « pendant la pratique artistique« , selon le décret du 29 octobre, même s’il reste « recommandé« .
Décision de la préfecture
Selon la loi, toute école de danse classique/contemporaine/jazz peut donc rouvrir ses cours de danse pour les mineurs, après 18h et sans port du masque obligatoire. Sauf que, « l’article 1er décret du 29 octobre prévoit toutefois que le préfet de département est habilité à rendre obligatoire le port du masque. Il peut, en outre, interdire, restreindre ou réglementer les activités qui ne sont pas interdites par le décret ou même fermer provisoirement ces établissements ‘lorsque les circonstances locales l’exigent‘ ». Autrement dit, in fine, il en revient au préfet de votre département si une école de danse peut rouvrir et sous quelles conditions.
Dans les faits
Carolina Moraes qui dirige l’École de Danse Classique à Aix-en-Provence, raconte la complexité de la situation. « Nous avons cherché longtemps et péniblement pour trouver des informations. Les lectures des décrets, arrêtés et tout document administratif sont complexes et les informations souvent contradictoires. Dans notre département (Bouches-du-Rhône) la préfecture a finalement donné son accord pour la reprise des cours de danse, mais il faut respecter le couvre-feu. Dans notre ville, toutes les écoles privées sont ouvertes, ainsi que le conservatoire. Mais la mairie a fermé certains locaux mis à disposition de quelques associations donnant des cours de danse« .
Dans le détail, pour un même décret, des préfet.e.s peuvent prendre des décisions tout à fait différentes. Ce qui donne des situations contrastées selon les départements. Ainsi dans le Val-de-Marne, « l’école de danse municipale où je donne cours est fermée et tous les cours sont en visio, c’est une décision préfectorale« , nous explique la professeure de danse Francine Coutisson. Alors que quelques kilomètres plus loin, à Courbevoie, dans la même région (Ile-de-France) mais dans un département différent (Hauts-de-Seine)… les écoles de danse sont ouvertes, comme le témoigne une mère d’élèves du Centre Culturel de Courbevoie : « L’établissement a rouvert ses cours de danse aux mineurs depuis le 19 janvier, même pour les cours commençant après le couvre-feu de 18h. Mes ados sortent donc du cours de danse à 20h30, avec une dérogation« . Idem au Conservatoire du Centre de Paris… mais avec des adaptations. « Nous avons dû refaire le planning pour terminer nos cours à 18h« , explique Aurélia Lefaucheux, professeure de danse classique de l’établissement. « Mais nous accueillons les étudiant.e.s majeures qui terminent leur troisième cycle« .
Situations contrastées
Encore plus compliqué : la situation peut être différente selon les écoles de danse d’une même ville. À Versailles, Chloé Dozeville, qui dirige l’association Follement Temps Danse a dû fermer ses portes. « Les cours de danse pour les enfants auraient dû reprendre le 15 décembre. La mairie a décidé de ne pas rouvrir juste avant les vacances de Noël, ce qui peut se comprendre. Nous n’avons finalement pu rouvrir que le 13 janvier… Et le 15, nous avons à nouveau dû fermer« , déplore-t-elle. Une situation d’autant plus difficile que, dans la Maison de quartier où elle donne ses cours de danse (elle utilise un local municipal en tant qu’association), la danse est l’une des rares activités qui n’a pas pu reprendre. « Mes élèves peuvent reprendre leurs cours de piano ou de musique, mais les cours de danse sont interdits car considérés comme une activité sportive« . Alors qu’à quelques rues de là, au CRR de Versailles, les cours de danse amateurs pour enfants ont bien pu reprendre. Comment expliquer cette différence de traitement ? « Le CRR de Versailles dépend de Versailles Grand Parc, la communauté d’agglomération. Alors que les maisons de quartier de Versailles, où cette association donne ses cours de danse, dépendent de la direction de la vie des quartiers, des loisirs et de la jeunesse de la ville« , explique la Direction des affaires culturelles de Versailles. Une situation dont ne se satisfait pas la mairie. « Nous voulons harmoniser les choses entre les différentes écoles, mais nous devons faire des réglages par rapport à différents décrets récents, le dernier datant du 19 janvier« .
Un cas qui illustre la certaine marge d’interprétation que laisse ce décret. « Un décret est un objet juridique dans les mains de gens connaissant très bien la grande administration« , explique Lorena Lopez, professeure de danse classique et rédactrice pour DALP. « Le décret reflétant la réalité de terrain n’existe pas car il ne peut y avoir qu’une seule réalité de terrain« . Et en l’absence de décision ferme de la préfecture, l’interprétation en revient aux mairies. « Il y a un premier niveau d’interprétation : la danse est-elle une pratique culturelle ou un sport ? En général, les écoles de danse classique et contemporaine sont catégorisées comme art, alors que les autres dépendent de la FFD et du système sportif, mais ce n’est pas toujours le cas« .
Il y a un premier niveau d’interprétation : la danse est-elle une pratique culturelle ou un sport ?
« Deuxième niveau d’interprétation : la salle où sont donnés les cours de danse est-elle considérée comme un local sportif ou culturel ?« , continue Lorena Lopez. « Tout dépend par quel budget elles fonctionnent. Un conservatoire qui délivre ses cours dans un établissement de la ville financé par la filière sport sera fermé. Une association culturelle de danse classique, donnant souvent ses cours dans le gymnase de la ville, verra en général ses locaux fermés car on les interprète comme un local sportif« . Même si le décret du 15 janvier permet bien aux écoles d’y donner leurs cours de danse (voir plus haut, paragraphe « Les décrets »). Et certaines mairies y sont sensibles, comme l’explique Mélissa Galasso, présidente et co-fondatrice de l’association Résonance Danse de Saint-Brice-Courcelles (Marne), aussi adjointe à la culture de sa ville : « Avec mon association, nous donnons nos cours de danse dans un complexe sportif qui appartient à la mairie de la commune. Même si le décret autorise la pratique de la danse, il a fallu demander l’autorisation au maire pour accéder à nouveau aux locaux. Les cours pour les mineurs ont été autorisés à reprendre. Si nous avons pu ouvrir, c’est parce que notre maire est très sensible à l’importance de la pratique sportive pour le bien-être des enfants et des adultes« .
À qui s’adresser ?
Vous dirigez une école de danse classique/contemporaine/jazz. Concrètement, comment faire pour savoir si vous pouvez à nouveau rouvrir en présentiel vos cours enfants amateurs ? Les décrets sont de votre côté et vous permettent d’ouvrir, après 18h et sans masque pendant les cours. Mais les décisions du préfet/de la préfète peuvent changer la donne, vous obligeant à arrêter vos cours à 18h, à faire porter le masque à vos élèves de plus de 6 ans, ou tout simplement à arrêter vos cours pour enfants en présentiel. Il convient donc de vous adresser en priorité à votre préfecture.
Réponse négative
Vous avez joint votre préfecture et la réponse est claire : les cours de danse n’ont pas le droit d’ouvrir. Vous êtes donc obligés de retourner à vos leçons en visio. Sachez toutefois que, pour être applicables, ces mesures restrictives doivent faire l’objet de la publication un arrêté préfectoral ou d’un décret. Et que vous êtes tout à fait en droit de le demander et de ne pas vous contenter d’un simple « Non » par téléphone.
Réponse positive
La préfecture a statué : vous avez le droit de continuer vos cours de danse pour enfants amateurs. Votre mairie doit suivre les décisions de la préfecture. Demandez bien des précisions sur les horaires (respect du couvre-feu ou non) et du port du masque (obligatoire ou recommandé) pour vos élèves de plus de 6 ans. Dans les faits, quant au port du masque, plusieurs écoles ont préféré l’adopter. « Le port du masque n’est pas obligatoire mais nous avons fait le choix de l’imposer dans le protocole sanitaire, pour éviter à tout prix les cas contacts… et donc une fermeture des locaux en cas de contamination« , continue Mélissa Galasso.
Absence de réponse
Vous n’arrivez pas à joindre votre préfecture malgré vos nombreux appels, vos interlocuteur.rice.s ne savent pas quoi vous répondre… Si votre mairie bloque l’ouverture de votre école de danse, n’hésitez pas à aller la voir avec les différents décrets donnés sur le fil du Centre National de la Danse, informations officielles venant du ministère de la Culture. En tant qu’école de danse « culture » (classique, contemporain, etc.), vous avez le droit d’ouvrir vos cours pour enfants amateurs, même si votre local est dans un gymnase. Avec des écoles de danse ayant énormément de statuts différents, il n’est pas rare que les mairies s’y perdent. Beaucoup évoquent ainsi les règles de la FFD (Fédération Française de Danse), qui n’autorisent pas la reprise des cours, appartenant à la filière sport. Mais en tant qu’école de danse classique/contemporaine, vous n’êtes en rien liés à la FFD mais à la DRAC (Direction régionale des affaires culturelles) et au ministère de la Culture. Vous avez, en l’absence de décision claire de la préfecture, le droit d’ouvrir en présentiel vos cours de danse pour enfants amateurs.
Virginie Labarriere
Suite en effet à une fermeture préfectorale pour les élèves danseurs en HA du CRR de Tours, alors que les musiciens pouvaient poursuivre, les professeurs, la direction du conservatoire et de nombreux parents, soutenus par un adjoint au maire délégué à la culture tous unis ils ont réussi à se faire entendre.Les cours de danse reprennent progressivement , donc ne pas hésiter à se mobiliser pour la danse en présentiel et non en visio.
Laurent Ronzon
Nouveau décret le 25 janvier ?? L’ERP classé X serait à nouveau fermé et donc interdit à toute pratique de la danse, quel que soit le locataire des lieux. Confirmez-vous cette information ?
Le décrêt du 15 janvier autorise une pratique de danse en ERP de type X. Le décrêt du 25 janvier l’interdit.
On a la même lecture ????