[Prix de Lausanne 2022] La finale remportée par Darrion Sellman
Le Prix de Lausanne 2022 a eu lieu à Montreux, du 31 janvier au 6 février. La finale s’est déroulée le 5 février, et a été remportée par l’américain Darrion Sellman, élève de l’Académie Princesse Grace. Un carton plein pour cette école, qui voit un de ses élèves remporter le Prix pour la quatrième fois en cinq ans, et remporte en tout trois prix cette année. Mais toutes ces jeunes danseuses et danseurs ont brillé sur scène, qu’ils avaient à coeur de retrouver après deux ans de pandémie, pour une finale d’un très haut niveau.
Lauréat du Prix de Lausanne 2021 (OAK Fondation) : Darrion Sellman, 17 ans et 9 mois – États-Unis – Académie Princesse Grace
Même uniquement par écran, il était difficile de ne pas remarquer Darrion Sellman pendant les cours. Sur scène, et plus encore pendant la finale, il a montré tout son talent. En Albrecht, il a fait preuve d’une magnifique technique, impeccablement en place et brillante, de lignes superbes, mais aussi – surtout – d’un vrai tempérament d’artiste, sachant créer un personnage et nous raconter une histoire le temps d’une variation. Sa variation contemporaine était aussi habitée, toute en nuances. Un artiste, qui déjà fait preuve d’un tempérament de soliste. Et donc une médaille d’or de plus pour l’Académie Princesse Grace. Avec Darrion Sellman, c’est la quatrième fois en cinq ans qu’un élève de l’Académie remporte la première place – l’année manquante, elle n’avait présenté aucun élève. Un peu trop ? Ou une juste récompense pour ce qui est la meilleure école de danse d’Europe.
Deuxième bourse (Fondation Caris), Prix de la meilleure Suisse : Tsukino Tanaka, 17 ans et 6 mois – Japon – Tsukino Tanaka – Zurich Dance Academy
Une belle danseuse qui a proposé une très jolie Giselle, pleine de joie de danser et à la technique infaillible. Beaucoup de qualités, donc, même si subjectivement, ce n’est pas elle qui m’a le plus touchée et je ne l’aurais pas mise si haut dans le classement. Mais sa bourse n’est pas volée non plus.
Troisième bourse (bourse Jeune espoir, Prix du public web : Luciana Sagioro, 15 ans et 9 mois, Brésil – Petite Danse School of Dance
Voilà le genre de candidates que le Prix de Lausanne aime promouvoir : une danseuse encore en évolution mais pleine de potentiel, venant d’une petite école, et à qui le Prix peut ouvrir de nombreuses portes. Si sa danse était encore un peu trop scolaire, Luciana Sagioro a montré de très belles qualités en Paquita, un sens de la danse et une présence en scène. Tout chez elle était très juste.
Quatrième bourse (fondation Albert Amon) : Mingyang Xie, 15 ans et 8 mois – Chine – Dance School attached to Shenyang Conservatory of Music
Brillant lors des sélections, Mingyang Xie a montré un peu plus de stress dans Harlequinade pour la finale. Il était un peu plus en retrait que les autres. À l’inverse, il s’est relâché pour sa variation contemporaine et a offert un joli moment. Une récompense qui vient saluer le travail d’une semaine plutôt que la performance du Jour J. Mais ce jeune danseur, plein de potentiel et de promesse, n’a pas volé sa place dans le classement.
Cinquième bourse (Fondation Coromandel) et Prix d’interprétation contemporaine : Dorian Plasse, 18 ans – France – Académie Princesse Grace
Quel plaisir de voir Dorian Plasse dans le classement ! Parce que sa danse est belle, généreuse et pleine d’esprit, qu’il a dansé Désiré avec un souci du style et du détail, sans en jamais oublier l’élégance. Et qu’il a dansé sa variation contemporaine avec une grande sensibilité et beaucoup de personnalité. Voilà un danseur qui prend la scène naturellement, vraiment polyvalent et qui affiche une belle maturité. Une récompense méritée.
Sixième bourse (Logitech) : Maya Schonbrun, 15 ans et 5 mois – États-Unis – Master Ballet Academy
Maya Schonbrun a proposé une très jolie Reine des Dryades, avec un très beau travail du haut du corps, beaucoup de sensibilité et de musicalité. À vrai dire, j’aurais bien aimé la voir plus haut dans le classement. Elle se démarquait déjà pendant les cours, a montré une très belle personnalité en scène : un talent à suivre de près.
Septième bourse (Logitech) : Amy Ronnfeldt, 18 ans et 5 mois – Australie – Australian Ballet School
Alors qu’elle avait l’un de mes coups de coeur des sélections, Amy Ronnfeldt a été un tout petit peu plus en retrait lors de cette finale. La fatigue s’est peut-être fait sentir ? Sa Paquita restait tout de même de belle facture, avec une jolie danse assurée et du style.
Prix du meilleur jeune talent (Fondation Rudolf Noureev) : Miguel Oliveira, 16 ans et 1 mois – Brésil – Basileu França
J’ai beaucoup aimé la proposition de ce jeune danseur en Colas, avec un charisme sincère, une technique jolie et précise qui donnait envie d’en voir plus. Il n’aurait pas démérité à recevoir l’une des bourses. Mais ce danseur prometteur devrait avoir de belles propositions après cette finale.
Prix du public : Yasemin Kayabay, 15 ans et 4 mois – Turquie – Zurich Dance Academy
La jeune danseuse, qui venait en voisine, avait clairement de nombreux supporters dans la salle ! Son Éveil de Flore, meilleur que hier, était plein de grâce, avec une jolie technique qui a du sens et une charmante assurance. Elle aussi n’aurait pas démérité dans le tableau final. Là encore, une jeune talent à suivre, qui devrait avoir de belles propositions.
Young Creation Award 2022 : Milla Look (élève de l’école John Neumeier) pour sa création Cognition et à Luca Branca (élève de l’Académie Princesse Grace) pour sa création Les Ombres du Temps.
Ces deux élèves verront leur création rejoindre les variations contemporaines du Prix de Lausanne 2023. Cinq jeunes talents présentaient leur oeuvre pour ce prix, toutes étaient plus ou moins équivalentes. C’est en tout cas un beau coup de projecteur sur leur travail, et un troisième prix cette année pour l’Académie Princesse Grace.
La finale en quelques mots
Forcément, après deux ans de crise sanitaire et un édition 2011 qui a eu lieu uniquement en vidéo, retrouver le Prix de Lausanne tel qu’on le connaît a été un vrai plaisir. Aussi parce que les 20 finalistes y ont été brillants, montant d’un cran depuis les sélections de la veille. Et le tout a donné un magnifique spectacle. L’on peut toujours être d’accord ou non avec le classement – qui ne compte pas forcément à Lausanne puisque l’immense majorité des candidats et candidates repartent avec des propositions d’écoles et de compagnies. Mais comment ne pas distinguer Darrion Sellman, brillant danseur à l’âme d’artiste ? Mention particulière aussi pour son collègue, le français Dorian Plasse, qui a aussi montré une personnalité affirmée. Pour le reste du classement, le mien n’aurait pas été exactement le même que celui du jury, mais qu’importe. Mon seul regret est l’absence de Seung Min Lee, qui a été brillant et tout feu tout flamme dans la variation du Corsaire.
L’Académie Princesse Grace a brillé de tous les côtés cette année : par la médaille d’or Darrion Sellman, par le finaliste et primé Dorian Plasse, par le Young Creation Award 2022 remis à Luca Branca… Mais aussi par l’intermède. Les grands élèves de l’école y ont en effet proposé sur scène Back on Track de Jean-Christophe Maillot. Et quelle pépite ! Une pièce jouant sur le langage classique, inventive et espiègle, terriblement virtuose et enthousiasmante. Et dansée par des élèves tout simplement superbes, déjà professionnels et brillants. Un vrai régal !
L’intermède fut aussi l’occasion de la remise du Lifetime Achievement Award à Pierre Lacotte. Affaibli physiquement, mais alerte dans son discours, le danseur et chorégraphe français a profité de ses chaleureux remerciements pour retracer sa vie si riche et intense. En citant ses premiers professeurs de danse comme ses plus récents élèves, Pierre Lacotte a retracé plus d’un siècle de danse. Il a aussi saisi l’occasion du micro pour des paroles plus politiques, si l’on peut dire, sur la mise en garde des batailles classiques contre moderne ou d’un certain discours voulant balayer les ballets d’un autre temps, rappelant que son travail était aussi de « faire exister ce qui a existé avant nous« . Ghislaine Thesmar, sa danseuse et compagnie, l’a rejoint sur scène, visiblement très émue par cette remise de prix.
Après une expatriation à Montreux, le Prix de Lausanne reviendra sur ses terres, le Théâtre de Beaulieu de Lausanne, pour son édition 2023. Une année qui marquera son cinquantième anniversaire, qui devrait être fêté comme il se doit. En attendant, encore bravo aux primé-e-s, aux finalistes et non-finalistes pour cette semaine de travail, nous avons hâte de vous retrouver sur les scènes des grandes compagnies.
Nat
Petite Danse, l’école de Luciana, n’est pas une pétite école du tout. En étant une des plus connues institutions de danse au Brésil, elle a déjà formé des talents qui sont au Royal ballet, Allemagne, USA, etc. C’est une institution méconnue de votre part parce que probablement vous ne connaissez pas ce qui se passe en danse ailleurs (c.a.d aux pays pauvres)