L’Opéra de Paris compte aujourd’hui 19 Danseurs et Danseuses Étoile. Un chiffre assez important, mais visiblement pas assez pour la Directrice de la Danse. Avec deux nominations en quelques mois, Brigitte Lefèvre veut promouvoir un maximum de gens avant de partir (et bloquer ainsi son successeur, disent les mauvaises langues). Depuis la nomination-surprise d’Amandine Albisson, les rumeurs courent dans tous les sens dans le petit monde des danse-addicts. Qui pourrait encore accéder au titre avant octobre prochain ? La danse-fiction a de quoi se nourrir.

La nomination probable – François Alu

C’est la rumeur qui court après la nomination d’Amandine Albisson : François Alu serait nommé Étoile lors de la tournée au Japon de la compagnie (du 13 au 23 mars), où il danse Basilio dans Don Quichotte. Le public japonais réclame une nomination d’Étoile chez eux, ce serait après tout un signe amical de la compagnie envers ce public toujours si fidèle et enthousiaste (les danseurs sont de véritables stars là-bas). De façon générale, il semble peu probable que Brigitte Lefèvre se prive de nommer l’un des futurs grands talents de la danse. François Alu est certes très jeune mais il est prêt à danser des grands rôles. Le nommer sur Don Quichotte où il excelle semble naturel (et il n’y aura de toute façon plus beaucoup d’occasions par la suite).

Seul point contrebalançant ce scénario, François Alu aura pour partenaire sur ce ballet Valentine Colasante, qui ne semble pas être vue comme une Étoile potentielle au vu des distributions. En général, l’on nomme un-e artiste Étoile que s’il-elle danse ce soir-là avec une Étoile. Sinon c’est un couple de Premier-ère danseur-se qui est nommé. Une règle qui n’a toutefois pas toujours été respectée.

François Alu en Oiseau bleu (avec Valentine Colasante) – La Belle au bois dormant

La nomination coup de coeur de la direction – Vincent Chaillet

Vincent Chaillet correspond au type d’interprète qu’affectionne Brigitte Lefèvre : un danseur malléable même si plus à l’aise dans le répertoire contemporain, solide, souvent choisi pour les créations, un bon leader et meneur de groupe sans toutefois faire part d’une personnalité tranchante et écrasante par rapport au reste de la compagnie. Un profil assez typé, qui ne pourrait donc pas forcément plaire à la nouvelle direction. Une nomination aujourd’hui lui assurerait une place d’Étoile et une certaine qualité de distribution. Cela pourrait arriver sur Notre-Dame de Paris en juillet.

Vincent Chaillet avec Laetitia Pujol et Alice Renavand – Sous apparence

La nomination coup de coeur du public – Eve Grinsztajn

Eve Grinsztajn a toujours eu un public fidèle. L’enthousiasme envers cette danseuse s’est amplifié ces derniers mois entre ses interprétations d’Olga et Mademoiselle Julie. Surtout qu’Eve Grinsztajn s’affirme de plus en plus comme la digne successeure d’Isabelle Ciaravola, la danseuse tragédienne. Mais une nomination serait surprenante aujourd’hui, la danseuse n’étant pas outrageusement distribuée comme une Étoile.

Eve Grinsztajn et Agnes Letestu – La Dame aux camélias

La nomination qui est peut-être passée – Florian Magnenet

Il y a deux ans, Florian Magnenet était perçu par le public comme le prochain Étoilé. Non pas qu’il souleva un enthousiasme démesuré, mais c’est qu’il était devenu tout simplement indispensable. Très grand, bon partenaire, solide, il a sauvé plus d’une série en remplaçant – parfois au pied levé – les (nombreux) blessés. Quand il est passé Premier danseur, il était aussi un peu le seul. Aujourd’hui, la nouvelle génération est arrivée, brillante. Son tour semble passé, mais sait-on jamais. Cela pourrait éventuellement avoir lieu sur Orphée et Eurydice de Pina Bausch où il danse le rôle principal.

Florian Magnenet – La Belle au bois dormant

La nomination qui peut peut-être attendre – Pierre-Arthur Raveau

Beau danseur noble, Pierre-Arthur Raveau a souvent eu sa chance, et en général au bon moment. Il est toutefois assez surprenant de voir que, depuis qu’il est Premier danseur, il n’a pas spécialement eu beaucoup d’opportunités. Le danseur a encore besoin de mûrir, c’est en tout cas ce que laissent penser ses distributions. C’est de toute façon un danseur de talent qui devrait être nommé dans les années à venir, quelle que soit la direction future.

Pierre-Arthur Raveau – Don Quichotte

Les nominations possibles techniquement

Si Brigitte Lefèvre a envie de nommer la moitié de la troupe avant de partir, elle pourra toujours le faire avec Nolwenn Daniel, Mélanie Hurel, Stéphanie Romberg, Muriel Zusperreguy, Audric Bezard, Alessio Carbone, Christophe Duquenne ou Emmanuel Thibault. Hypothèse jugée à l’unanimité comme peu crédible par la planète danse (hypothèse qui ne s’appuie que sur les distributions et autres bruits de couloir, sans prendre en compte la qualité de chacun de ses solistes, dont certains sont très appréciés).

La nomination surréaliste – Mathilde Froustey

La danse-fiction a ceci d’intéressant qu’il en faut peu à l’imagination des danse-addicts pour s’emballer. À peine le public avait-il ainsi fait son deuil de revoir un jour Mathilde Froustey à Garnier que la nouvelle est tombée : la danseuse est invitée à danser Kitri au Japon avec Mathias Heymann. Le public japonais veut une nomination, et si c’était celle-là ? (il n’est pas obligatoire d’être Première danseuse pour être nommée). Une nouvelle réjouissante en soi mais qui semble vraiment improbable. Au-delà de mettre la danseuse dans une situation délicate (Mathilde Froustey s’est engagée jusqu’en juin avec le SFB), au-delà d’être une gifle cinglante envers les autres brillantes Sujets, cette nomination remettrait en cause toute la hiérarchie de l’Opéra et le concours de promotion dans sa globalité, soit les fondements de l’organisation de la compagnie. Un beau cadeau de bienvenue à Benjamin Millepied (les mauvaises langues, levez la main).

` Mathilde Froustey – Don Quichotte