Il n’est pas encore minuit… de la Compagnie XY – La nouvelle danse aérienne
Avec le « nouveau cirque » comme on l’appelle, la frontière entre danse et pratique circassienne est souvent floue. Et c’est ce qui fait toute l’originalité et la fraîcheur de ce mouvement (très éclectique aussi). La Compagnie XY se pose comme une troupe de cirque. Mais son acrobatie fait réellement penser à un ballet. Un ballet aérien où tout semble facile, où la difficulté s’efface pour faire place à l’émotion et à l’humour. La force est ici celle du collectif, qui permet d’aller plus haut, plus loin. Un spectacle qui frappe comme une bouffée d’air frais.
Il est compliqué de voir un spectacle en faisant abstraction de ce qui se passe autour. En tant que public, nous recevons chaque proposition artistique différemment aussi en fonction de ce que l’on vit. À l’image de Gala de Jérôme Bel, Il n’est pas encore minuit… de la Compagnie XY s’apprécie d’autant plus dans le contexte actuel. Vue quelques jours après les attentats, cette nouvelle pièce a résonné comme un regain d’optimiste dont tout le monde semblait avoir besoin, artiste comme spectateur.rice. Car le spectacle pourrait se sous-titrer par « Ensemble, tout est plus joli ». Ensemble, on peut sauter plus haut, aller plus vite. Ensemble, on peut toucher le plafond du chapiteau, multiplier les sauts périlleux. Ensemble aussi, on est en sécurité. Chacun.e fait attention à l’autre, le rattrape, veille à sa chute. Ensemble, on se sert les coudes. Ensemble, on rigole mieux.
Tout démarre pourtant par une bagarre (point sociologique plutôt intéressant en passant : deux hommes qui se battent font frémir le public, deux femmes qui se battent le fait rire). Mais ces coups de poing ne sont que pour de faux. Très vite, les duos se transforment en couple de danseur.se.s, dans un joyeux brouhaha que forment pas moins de 22 acrobates en scènes. Le jeu est classique : une acrobatie de mains à mains. Mais le tout le réinvente. Le nombre des acteur.rice.s multiplient les prises, les sauts se croisent. C’est une véritable chorégraphie qui se met en place, un ballet aérien qui ne semblent avoir aucune limite, surtout pas d’apesanteur.
Le défi d’avoir autant d’artistes sur scène est souvent de les laisser chacun.e s’exprimer. C’est ici réussi. Tout le monde trouve sa place, tout en montrant sa personnalité. Le collectif n’est pas un groupe uniforme, mais une somme d’individus. le fil conducteur se perd un peu plus. On n’échappe pas à quelques passages un peu brouillons, qui partent dans tous les sens sans vraiment savoir comment revenir. Mais les acrobates récupèrent le tout avec l’humour, sous-jacent tout au long du spectacle. Tout comme les quelques regards de défi qu’ils lancent parfois au public, lorsqu’ils sont trois ou quatre les uns debouts sur les autres. Genre c’est trop facile. Genre on peut aller encore plus haut. Genre vous n’avez rien vu. La piste est avant tout un vaste terrain de jeux.
Il n’est pas encore minuit… de la Compagnie XY à l’espace Chapiteau de La Villette. Avec Abdeliazide Senhadji, Amaia Valle, Andres Somoza, Airelle Caen, Alice Noel, Ann-Katrin Jornot, Antoine Thirion, Aurore Liotard, Charlie Vergnaud, David Badia Hernandez, David Coll Povedano, Denis Dulon, Evertjan Mercier, Guillaume Sendron, Gwendal Beylier, Jérôme Hugo, Mohamed Bouseta, Romain Guimard, Thomas Samacoïts, Thibaut Berthias, Xavier Lavabre et Zinzi Oegema. Mercredi 18 novembre 2015. À voir à la Maison de la Danse de Lyon du 12 au 20 janvier.
Laetitia
Merci Amélie pour cette belle chronique, qui prolonge l’effet enthousiasmant de ce spectacle !:) Ca fait effectivement du bien de voir de tels spectacles.
CashPistache
Oh merci, tu m’as donné envie de voir ce spectacle, et ça à l’air réellement spectaculaire pour le coup ! si en plus l’humour et l’émotion sont au rendez-vous, je ne souhaite qu’une chose : que la tournée passe par Marseille ou Aix !
Vanessa
Amélie Bertrand
@ CashPistache : Il y a bien une tournée, mais elle ne passe pas forcément dans votre coin : http://ciexy.com/?page=agenda&date=new