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Density 21.5 – Dialogue with Rothko de Carolyn Carlson au Théâtre de Chaillot

Pas moins de quatre programmes mettent à l’honneur Carolyn Carlson, artiste associée au Théâtre de Chaillot, en ce début d’année. Après Seeds et avant Double Vison puis Pneuma, une soirée réunit Density 21.5 et Dialogue with Rothko, les premier et dernier soli, créés à quarante ans d’intervalle, par cette poétesse de la danse disciple d’Alwin Nikolaïs.

Density 21.5 de Carolyn Carlson

Density 21.5 de Carolyn Carlson

À l’heure où le départ surprise du très médiatique Benjamin Millepied de l’Opéra de Paris – suivie de la nomination expresse d’Aurélie Dupont à la tête de son ballet – n’en finissent pas de faire des vagues, où les commentateurs de tous poils nous expliquent que cette vieille institution est rétive à la modernité, il est intéressant de se rappeler dans quelles conditions fut créé le premier solo de Carolyn Carlson, Density 21.5.

En 1973, le compositeur, chef d’orchestre et directeur de l’Opéra de Hambourg Rolf Liebermann, découvre Carolyn Carlson alors qu’elle interprète Kyldex d’Alwin Nikolaïs. Totalement séduit et devenu quelques mois plus tard administrateur de l’Opéra de Paris, il décide de lui commander un solo dans le cadre d’une soirée « Hommage à Varese« . C’est ainsi que nait Density 21.5… Et que la danse contemporaine fait son entrée dans l’illustre établissement. Un an plus tard, il n’hésite pas à nommer sa magnifique interprète « Étoile-chorégraphe« , faisant fi de la tradition qui veut que seul.e.s les danseur.se.s maison puissent obtenir le titre d’Étoile. En 1975, il fonde le Groupe de recherches théâtrales de l’Opéra de Paris (GRTOP) où Carolyn Carlson et ses collaborateurs créent pendant cinq années une dizaine de spectacles expérimentaux.

Density 21.5 de Carolyn Carlson

Density 21.5 de Carolyn Carlson

Recrée en 2015, ce solo inaugural de huit minutes contient déjà en germe toutes les caractéristiques du vocabulaire de Carolyn Carlson. Longues lignes qui se brisent, larges mouvements de bras aux soudaines accélérations saccadées. Le reprendre est une gageure tant sa chorégraphe en fut une envoutante interprète. Mais Isida Micani sait s’en emparer avec brio. Si dans sa version, la virtuosité prend légèrement le pas sur le naturel, elle habite son rôle, entre profondes respirations et déploiements d’ailes. La voir danser dans un espace restreint, devant un rideau de scène, en silence ou accompagnée par la flûte mélodieuse de Timon Nicolas, ajoute à l’intimité et l’intensité de la pièce.

Créé en 2013, soit quarante ans plus tard, Dialogue with Rothko est le dernier solo de Carolyn Carlson, mais aussi sa dernière pièce pour le CCN de Roubaix Nord-Pas-de-Calais. Il témoigne de la passion de la chorégraphe philosophe pour le peintre américain dont elle perçoit l’art comme méditatif. Pour cette pièce, qui fait suite au livre du même nom qu’elle rédigea en 2011, elle se concentre sur une œuvre tardive qui l’a beaucoup marquée, Black, Red over Black on Red.

Dialogue with Rothko de Carolyn Carlson

Dialogue with Rothko de Carolyn Carlson

Ce qui frappe avant tout à l’ouverture du rideau est la longue silhouette aux bras graciles et interminables, la présence toujours magnétique de Carolyn Carlson, sur laquelle le temps ne semble avoir aucune prise. Pendant plus d’une heure, la danseuse, accompagnée du violoncelliste Jean-Paul Dessy, plonge le public dans le processus créatif de Rothko : inspiration, travail, tourment… D’abord vêtue d’une longue robe grège, puis d’un jupon noir laissant entrevoir un pantalon rouge, les mains gantées de diverses couleurs, on ne sait qui de la toile ou du peintre donne à voir Carolyn Carlson. Longtemps sa présence, la beauté épurée de ses lignes et de ses gestes, des costumes et des lumières, fascinent. Mais l’expérience méditative comme le propos s’étirent et finissent pas se délayer. Resserrée, la pièce aurait sans doute gagné en force et en intensité.

Réunir en une soirée deux soli de Carolyn Carlson semble couler de source, tant ce format est emblématique de son travail. Blue Lady n’est-elle pas la plus populaire de ses pièces ? Associer le premier et le dernier d’entre eux est fort intéressant puisque cela permet d’observer l’évolution de son travail chorégraphique. Cependant, les durées respectives de ces deux opus, de huit minutes à une heure dix, rendent ce programme quelque peu déséquilibré.

Dialogue with Rothko de Carolyn Carlson

Dialogue with Rothko de Carolyn Carlson

 

Density 21.5 – Dialogue with Rothko de Carolyn Carlson au Théâtre National de Chaillot.
Density 21.5 de Carolyn Carlson avec Isida Micani et Timon Nicolas (flûte) ; Dialogue with Rothko de Carolyn Carlson, avec Carolyn Carslon et Jean-Paul Dessy (violoncelle). Samedi 6 février 2016. Focus sur Carolyn Carlson à voir jusqu’au 20 février

 

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