Pneuma de Carolyn Carlson – Ballet de l’Opéra de Bordeaux
Après la création Seeds pour le jeune public, deux solos emblématiques et le spectacle Double-Vision, le focus sur Carolyn Carlson continue au Théâtre de Chaillot. Place cette fois-ci à Pneuma, une création pour le Ballet de l’Opéra de Bordeaux montée il y a deux ans, une compagnie qui a régulièrement travaillé avec la chorégraphe. On y retrouve les thèmes chers à Carolyn Carlson – la nature, la poésie, une sorte d’esprit zen – portés par des interprètes à la technique classique affûtée. Un travail forcément différent de ses pièces plus contemporaines, qui sonne comme un souffle d’air. Une idée puisée dans L’Air des Songes de Gaston Bachelard.
D’emblée sur scène, l’ambiance se veut apaisée. Des groupes de danseurs et de danseuses occupent la scène avec des gestes amples, profonds, s’ancrant dans le sol pour mieux s’élever. De la scénographie à la danse, tout est fait pour être le plus pur possible, le plus léger, sans geste inutile, sans parasite. En toute harmonie. Le Bien (une sorte de fée moderne aux allures mutines) et le Mal (un Ange noir) se croisent. Ils ne sont pas forcément en confrontation, ils sont plutôt les deux parties d’un ensemble qui trouve son équilibre dans leur opposition. Dans Pneuma, les êtres humains ont trouvé comment vivre avec la nature, en complémentarité.
Carolyn Carlson se sert avec intelligence de la qualité des danseurs et danseuses du Ballet de l’Opéra de Bordeaux, pour une danse plus virtuose et plus classique que ce qu’elle peut faire avec sa propre troupe. La chorégraphe met en avant l’unité de la compagnie, un groupe homogène qui s’écoute et évolue ensemble sur scène, là encore en harmonie. La jeune Étoile Sara Renda, rayonnante, se dégage du groupe, tout comme Neven Rtimanic qui a droit à un solo mettant en avant sa grande virtuosité. La danse n’est pas forcément nouvelle – tout comme l’esthétisme du ballet – mais elle est belle. Du groupe sort par moments une saynète plus absurde, sans toutefois heurter l’ambiance volontairement zen du ballet.
Une ambiance zen donc, qui parfois l’est un peu trop. Sur la fin du spectacle, Carolyn Carlson semble se complaire dans son univers. Il y manque quelques surprises, comme un rebondissement sur cette scène où tout se passe presque trop bien. La technique propre des danseurs et danseuses est aussi moins utilisée, les séquences semblent comme se répéter. L’arbre suspendu dans les airs a cependant continué son chemin, comme porté par un souffle. Sommes-nous dans les nuages ? Il manquait peut-être d’un peu d’orage.
Pneuma de Carolyn Carlson par le Ballet de l’Opéra de Bordeaux au Théâtre de Chaillot. Avec Natalia Butragueño, Emilie Cerruti, Marina Guizien, Marina Kudryashova, Diane Le Floch’, Alice Leloup, Nicole Muratov, Sara Renda, Stéphanie Roublot, Claire Teisseyre, Mika Yoneyama, Felice Barra, Kase Craig, Pierre Devaux, Austin Lui, Samuele Ninci, Take Okuda, Neven Ritmanic, Alvaro Rodriguez Piñera, Ashley Whittle, Mar-Emmanuel Zanoli. Mercredi 17 février 2016.