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La Nuit des Étoiles – Édition 2016

Fidèle à sa réputation , le gala La Nuit des Étoiles, qui s’est déroulé le 20 mars dernier à Bruxelles, a été de haute volée, réunissant les grandes Étoiles de la danse européenne. Seule différence avec 2013 et 2014 : le public. Si le Cirque Royal était plein à craquer lors des précédentes éditions, le cru 2016 a eu plus de mal à attirer les foules. L’ambiance pesante du moment se ressent sur les salles de spectacle de Bruxelles, qui ont plus de mal à faire le plein depuis quelques mois. Des lignes particulièrement amères à écrire, La Nuit des Étoiles 2016 ayant eu lieu deux jours avant les meurtriers attentats de Bruxelles.

La Nuit des Étoiles 2016

La Nuit des Étoiles 2016

Pourtant, le délice d’une belle soirée de danse est justement ce qui permet d’oublier pour un temps l’ambiance quelque peu anxiogène qui plane en ce moment. En haut de l’affiche de La Nuit des Étoiles 2016 ? L’Étoile d’Amsterdam Maia Makhateli. Qu’elle soit en Giselle (deuxième acte) ou dans une pièce contemporaine (Minos de Juanjo Arques), la danseuse affiche une personnalité percutante et absolument contemporaine, dans le sens bien de son époque. Son travail dans le pas de deux de Giselle est d’une grande minutie comme d’une grande poésie, son énergie dans la deuxième pièce explose en scène. Le tout bien accompagné par Artur Shesterikov, également Principal au Het Nationale Ballet.

Iana Salenko aussi – bien sûr – est toujours fantastique. Magnétique dans la pièce contemporaine Elegie der Herzen de Raimondo Rebeck, tout simplement formidable dans la Fête des fleurs à Genzano d’Auguste Bournoville. Iana Salenko, c’est un peu l’image de la ballerine idéale, celle qui rend excitant n’importe quel pas de deux vu et revu, celle qui pousse la technique académique dans ce qu’elle a de plus beau. Il y a chez elle ce sens inné du style, de la finesse. Elle est venue comme d’habitude avec Marian Walter, très bon partenaire qui n’a le souci que de mettre sa danseuse en valeur.

Et les hommes donc ? Le frisson de la grande danse masculine est venue avec le couple Vadim Muntagirov et Daria Klimentová. Ces deux artistes ont longtemps été partenaires en scène à l’English National Ballet. Même s’ils ne dansent plus aussi régulièrement ensemble, il reste toujours entre eux une vraie complicité, et une danse qui s’accorde. Le couple est adorable dans le pas de deux de Coppélia (petite merveille souvent oublié des galas), emballant dans la Moszkowsky Waltz d’Asaf Messerer. Ce pas de deux romantique et virtuose est l’occasion de portés vertigineux, la ballerine se jetant littéralement de loin dans les bras de son partenaire. L’occasion de quelques « Oooh ! » de surprise de public, encouragé par le couple qui s’amusait beaucoup avec ça (ambiance « Pfff, trop simple, on le fait même d’une seule main« ). L’occasion de se convaincre que Vadim Muntagirov est non seulement un grand danseur, mais aussi un grand partenaire.

 

Chez les hommes, il y avait aussi David Yudes. Vous ne connaissez pas David Yudes ? Bien. Il va falloir apprendre à le connaître. Formé à l’Académie Princesse Grace, primé à Lausanne il y a deux ans, Artist du Royal Ballet, 19 ans tout juste, il déboule sur scène dans un pur numéro de virtuosité à la russe, Gopak de Rostislav Zakharov. Et coupe le souffle à tout le monde. Il se jette sur scène, saute vertigineusement haut, est d’une explosivité rare, le tout saupoudré du charisme irrésistible de la jeunesse. Il a dansé en deuxième partie un pas de deux du Corsaire avec la toute aussi jeune Rina Kanehara (Artiste à l’ENB). S’il n’y avait pas encore l’aboutissement d’artistes chevronnés, les deux jeunes talents ont proposé un pas de deux déjà mûr, engagés dans leur danse, et éminemment virtuoses. À suivre de près.

L’école française était représentée par Myriam Ould-Braham, Étoile de l’Opéra de Paris, et Mickaël Lafon (Coryphée). Ils ont présenté un pas de deux on ne peut plus école française : le Grand Pas classique de Victor Gsovsky. Myriam Ould-Braham excelle dans ce genre de répertoire, proposant une danse élégante, toute en finesse et en précision, avec un grand sens du style et une autorité scénique qu’on ne lui a pas toujours connu. Elle-aussi est l’image même de la ballerine, d’autant plus dans ce pas de deux. Mickaël Lafon est un artiste attachant avec plein de qualités, mais ce n’est pas dans les pas de deux virtuose qu’il brille le plus. La différence avec les Étoiles chevronnées masculines du reste du programme était par trop frappante. Les deux artistes ont ensuite proposé le pas de deux de La Nuit s’achève de Benjamin Millepied. Un extrait plutôt efficace en gala, où le couple a montré toute sa complicité et une belle danse musicale.

Le Ballet de Hambourg était représenté par Mathias Oberlin et Maria Florencia Chinellato. Ils sont venus, forcément, avec deux oeuvres de John Neumeier : Adagietto et un extrait de Roméo et Juliette. Pour le premier, ils étaient parfaits esthétiquement, mais avaient un peu de mal à instaurer une ambiance (ils ouvraient le bal, ce qui n’est jamais simple). Le couple a réussi à faire passer plus d’émotion dans Roméo et Juliette, même si l’on sentait chez eux une trop grande maîtrise des choses, alors que la danse de John Neumeier est si belle dans l’abandon.

Maria Florencia Chinellato

Adagietto de John Neuemeier – Maria Florencia Chinellato

Reste l’ovni, Steven McRae. Il devait danser avec Sarah Lamb qui a dû annuler à la dernière minute. L’Étoile du Royal Ballet est tout de même venu, pour un solo de claquettes hybride. Des claquettes à la Broadway sur une Czardas, il ne faut pas chercher la logique. Qui la cherche, d’ailleurs ? Ça n’a aucune importance. Pendant trois minutes, Steven McRae fait son show. Et c’est totalement et absolument formidable et jouissif. Le danseur sait attraper le public, le chauffer, lui faire faire un grand huit avant de le redéposer à sa place hors d’haleine. Steven McRae est un danseur incroyable, un vrai show-man aussi, qui s’éclate sur scène et ne cherche qu’une chose : que le public s’éclate aussi.

 

La Nuit des Étoiles au Cirque Royal de Bruxelles. Avec Myriam Ould-Braham et Mickaël Lafon (Ballet de l’Opéra de Paris), Iana Salenko et Marian Walter (Staatsballett de Berlin), Steven McRae (Royal Ballet de Londres), Maia Makhateli et Artur Shesterikov (Het Nationale Ballet), Daria Klimentova (English National Ballet) et Vadim Muntagirov (Royal Ballet de Londres), Maria Florencia Chinellato et Matias Oberlin (Ballet de Hambourg), David Navarro Yudes (Royal Ballet de Londres) et Rina Kanehara (English National Ballet). Dimanche 20 mars 2016.

 

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