Alvin Ailey American Dance Theater : deuxième soirée plus mitigée
Mardi 3 juillet. L’Alvin Ailey American Dance Theater au Théâtre du Châtelet, dans le cadre des Etés de la Danse. Cinq ballets : Night Creature d’Alvin Ailey, In/Side de Robert Battle, Takademe de Robert Battle, The Hunt de Robert Battle et Love Stories de Judith Jamison.
J’ai un peu de mal à dire que cette deuxième soirée Alvin Ailey fut un peu décevante. Parce que cette troupe est tout sauf décevante, qu’elle est pleine d’énergie et de joie de danser, et qu’elle fait vraiment plaisir à voir. Mais cette combinaison du soir manquait d’inspiration chorégraphique pour vraiment passer un excellent moment.
Takademe de Robert Battle s’est révélé brillant la première fois, et l’est tout tant la seconde. Voilà un solo jazz/ hip hop comme on les aime, mélangeant performances, humour, et grande souplesse du corps si agréable à regarder. J’étais donc plutôt enthousiaste à découvrir deux autres œuvres du chorégraphes, mais je fut plutôt déçue.
Robert Battle a une grande qualité, il a parfaitement compris l’énergie de la compagnie. Il sait faire aux danseurs et danseuses Alvin Ailey des chorégraphies sur mesure, que personne ne saurait sûrement mieux danser qu’eux et elles. Ce n’est d’ailleurs pas pour rien qu’il a été nommé directeur de la compagnie. Mais Robert Battle a aussi un gros défaut, en faire trop. Et à force de vouloir absolument plaire au public, faire une danse compréhensible, il en arrive à des pièces beaucoup trop démonstratives et sans véritable subtilité.
The Hunt, par exemple, avait absolument tout pour me plaire sur le papier : six danseurs (beaux gosses) deviennent combattants sur fond de percussions sonores. C’est comme ça j’ai toujours un faible pour les ambiance guerrières. Mais l’ensemble manquait de finesse, et à trop montrer une gestuelle battante, et pas forcément très inventive, l’effet perd de sa force. Idem pour In/Side, un cours solo sur du Nina Simone, qui n’a pas le parfum si séduisant de Takademe.
Ces trois pièces de Robert Battle étaient précédées par Night Creature du Maître Alvin Ailey. L’intérêt en est plus historique qu’autre chose, car la pièce reste marquée dans les années 1970, et a du mal à trouver une véritable modernité au XXIe siècle. On repère néanmoins ces gestes sur lequel semble se baser le chorégraphe, et notamment ce beau travail de bras et de dos, ce mouvement que font souvent les danseurs et danseuses en groupe, comme un oiseau qui s’envole.
Heureusement, l’Alvin Ailey American Dance Theater a l’art de réussir ses finals. Après l’enthousiasmant Revelations pour la Première, place ce soir à Love Stories de Judith Jamison. La pièce n’est pas forcément d’une inventivité folle, mais elle n’en reste pas moins magique. Danse jazz, hip hop, moderne, africaine… Tous les styles faisant la spécificité de la troupe fusionne, pour une ½ heure de danse vraiment plaisante.
On pourrait râler sur une certaine facilité, mais ce serait tout de même dommage de bouder son plaisir face à une pièce qui résonne comme un véritable hommage à Alvin Ailey. En groupe ou en duo, chaque danseurs et danseuses se plongent dans le jazz, avant d’évoluer petit à petit vers le hip hop, leur véritable style de prédilection pour les années à venir. L’énergie, bluffante, est là. La joie de danser encore plus, ce plaisir qui ne peut qu’emporter le public avec lui, devant tant de bonheur d’être sur scène et de montrer d’où l’on vient.
Alors forcément, avec un tel finale, et malgré les déceptions du début, cette soirée n’a pu se terminer qu’en standing-ovation.
Alvin Ailey American Dance Theater, au Théâtre du Châtelet jusqu’au 21 juillet, dans le cadre des Etés de la Danse.