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Ce que j’appelle oubli – Angelin Preljocaj

Ce que j’appelle Oubli d’Angelin Preljocaj au Théâtre de la Ville. Avec Laurent Cazanave (le narrateur) , Aurélien Charrier, Fabrizio Clemente, Baptiste Coissieu, Carlos Ferreira Da Silva, Liam Warren et Nicolas Zemmour. Lundi 5 mars 2013.

Ce que j'appelle oubli - Angelin Preljocaj

Ce que j’appelle oubli – Angelin Preljocaj

C’est un fait-divers sanglant qui a inspiré la dernière création d’Angelin Preljocaj. Un jour de décembre 2009, un jeune homme désœuvré ouvre une canette de bière dans un supermarché sans l’avoir payé. Quatre vigiles le surprennent, l’emmènent au fond d’un couloir et s’acharnent sur lui. Le jeune homme meurt sous les coups.

Lors du procès, le procureur dira : « Un homme ne doit pas mourir pour si peu« . L’écrivain Laurent Mauvigner s’est emparé de cette phrase pour démarrer son texte Ce que j’appelle oubli, une lettre au frère de la victime d’une seule phrase de 60 pages. La base de travail de la chorégraphie.

Je ne sais pas si Angelin Preljocaj est un chorégraphe novateur, dans le sens où il a inventé une nouvelle gestuelle. Mais il sait trouver les bons outils, et il sait s’en servir. Ici, l’outil est le texte de Laurent Mauvigner, une œuvre forte qui couple le souffle, marquant comme une musique les pas de danse. Le narrateur égrène les mots, les six danseurs évoquent ce qu’il y a entre les lignes.

Ce que j'appelle oubli - Angelin Preljocaj

Ce que j’appelle oubli – Angelin Preljocaj

La danse des quatre vigiles est mécanique, froide, calculée et désincarnée. Celle du jeune homme, presque gracieuse, n’est pas loin de l’hymne à la liberté. Et elle ne rend que mieux l’absurdité d’une telle violence. L’étau se resserre autour de lui, les quatre vigiles se rapprochent. Le combat commence alors que le texte s’écoule, implacablement. Pendant une heure, le public assiste impuissant à la scène, sachant déjà comment elle se termine.

Puis le texte part sur le procès et quelques réflexions sociales. Qu’es-ce qui séparait le jeune homme des vigiles ? Ils avaient le même âge, venaient du même milieu, avaient déjà cette sensation que tout est joué à 20 ans. La chorégraphie a malheureusement un peu de mal à suivre. Angelin Preljocaj part dans des évocations de la vie de la victime, entre une Vierge et des bouchers, le public perd un peu le fil pour se concentre sur ce qu’il entend. Dommage que les dernières 20 minutes perdent un peu en intensité, mais cela ne nuit pas finalement à la pièce. Le public en ressort aussi secoué.

Ce que j'appelle oubli - Angelin Preljocaj

Ce que j’appelle oubli – Angelin Preljocaj

Ce que j’appelle oubli est une chorégraphie difficile, parce qu’elle force le-la spectateur-rice à regarder la violence en face. Ce ne sont plus des mots que l’on lit dans un journal, vit oubliés. C’est une violence direct, nette, d’autant plus réaliste. Il n’y a pourtant à aucun moment la sensation d’être voyeuriste. La chorégraphie, en elle-même, n’est pas forcément ultra-explicite. Mais cette dureté, cette mécanique implacable des vigiles, cette façon d’enserrer de plus en plus le jeune homme, sont bien plus terrifiantes que n’importe quel litre hémoglobine.

Ce que j’appelle oubli, du 8 au 10 mars au 104

Comments (1)

  • C’est le fait de voir ce théâtre parisien huppé complet parce qu’on y donnait une pièce sur un fait divers sanglant qui m’a fait parler de « voyeurisme »… pas la chorégraphie en elle-même. Je crois que je serais complètement rentrée dedans s’il n’y avait pas eu le narrateur, qu’as-tu pensé de sa prestation ?
    Sinon je suis d’accord avec toi sur la seconde partie, on s’y perdait un peu (ce qui était sans doute dû au texte).

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