Irrésistible Leçon de hip hop [Suresnes cités danse]
Soirée Sylvain Groud/Anthony Egéa, dans le cadre du festival Suresnes cités danse, au Théâtre Jean Vilar. Ma Leçon de hip hop de Sylvain Groud, avec Céline Lefèvre. Rage d’Anthony Egéa, avec SalahKeita, Djaroule Evrard Kévin Gaël Mvou, Salim Mze Hamadi Moissi, Raymond Siopathis, Kirsber Tsengou Dingha et Seibany Salif Traore.
Ma dernière soirée à Suresnes cités danse fut à la fois studieuse et très rigolote. La raison, une magistrale Leçon de hip hop chorégraphiée par Sylvain Groud, et tout aussi magistralement interprétée par Céline Lefèvre. La pièce était présentée comme une « première partie » à la création Rage d’Anthony Egéa. Elle lui a pourtant volé la vedette.
Ma Leçon de hip hop, le principe est simple : retracer 40 ans d’histoire de la danse hip hop en 40 minutes. Raconter, en dansant bien sûr, comment le style est né, expliquer les pas, les différents courants (et il y en a beaucoup), leur philosophie, leur égérie, et bien sûr leurs inspirations, ce qui nous fait remonter au temps des tap-dancers. Un peu trop didactique ? Pas du tout ! C’est au contraire très drôle, vivant, pas ennuyeux pour un sou et vraiment éclairant. L’interprète Céline Lefèvre y est pour beaucoup, excellente danseuse et G.O. sur les bords juste ce qu’il faut.
D’ailleurs, comme elle n’est pas une prof comme les autres, Céline Lefèvre démarre sa leçon de hip hop en parlant de son ostéo. On est danseuse ou on ne l’est pas. Puis elle démarre, direction les Etats-Unis dans les années 1970, sur un bout de carton. Et elle fait dans la pédagogie. Beatmaking, b-boying ou popping s’entrecroisent, tandis que Céline Lefèvre explique les différentes figures en mêlant gestes du quotidien et anecdotes rigolotes. Et elle fait lever le public, rien de mieux pour apprendre l’isolation des muscles et à faire quelques figures. Elle passe par le voguing, cinq minutes plus éclairantes que n’importe quel long article sur ce phénomène, avant de passer… à un cours de danse classique !
Et oui, Céline Lefèvre aime les battles, mais dans les années 1980, elle est un peu la seule fille. Où sont les autres ? À la barre bien sûr, « Mesdemoiselles, on se concentre ! » C’est du vécu pour la danseuse, qui se moque gentiment de ses années de pointes tout en montrant, par une diagonales de grands jetés, qu’elle sait encore se défendre… Tiens, elle parle même de Noureev en marquant un pirouette (il est décidément partout), avant de repartir sur le dance-floor. Michael Jackson a bien été l’idole des danseurs avec son Moonwalk, il n’a pourtant rien inventé. A y regarder de plus près, ça ressemble au mime Marceau, qui lui-même a d’étranges ressemblances avec… Bill Bailey, célèbre danseur de claquettes des années 1950. Le tout, bien sûr, avec démonstrations de danse à l’appui.
La chorégraphie de Sylvain Groud tombe peut-être parfois dans la facilité, faire participer le public, ça marche à tous les coups. L’idée de mettre en scène la pièce avec plusieurs interprètes spécialisé-e-s dans leur style plutôt qu’une soliste pourrait peut-être aussi la rendre encore plus claire. Mais le tout fonctionne tout de même irrésistiblement bien. Ma Leçon de hip hop n’est pas seulement une pièce très drôle, inventive et instructive, c’est aussi un véritable hommage au courant hip hop. Souvent caricaturé, ou considéré comme bien pauvre face à la danse contemporaine, Céline Lefèvre le montre dans toute sa diversité, où les courants se croisent et se recroisent pour sans cesse de réinventer. Elle termine par le krump, cette danse « où lacolère monte, monte, monte….« , et qui est à la base de la pièce qui suit, Rage d’Antony Egéa.
Mais l’attente retombe vite. La nouvelle pièce d’Egéa est pour le moins ambitieuse. Le chorégraphe met sur le plateau six (excellents) danseurs, venus de six pays africains. Il veut y montrer ces silhouettes contemporaines enracinées dans la tradition, la rage et l’attente qui peuvent les animer. Mais l’idée est peut-être un peu trop intellectualisée pour vraiment prendre forme. Mis à part quelques instants, furtifs mais forts, la Rage du titre ne se fait pas vraiment sentir. Les scènes morcelées n’aident pas à suivre le fil conducteur, l’attention se perd. Visiblement marqué par son voyage en Afrique, Antony Egéa a peut-être voulu trop en dire, trop analyser, au lieu de se concentrer sur l’essentiel. La force des interprètes en laissent quelques images impressionantes, des moments qui interpellent ou drôles. Mais l’attention se perd vite et l’émotion avec.
Suresnes cités danse, jusqu’au 3 février au Théâtre Jean Vilar, avec notamment un autre spectacle de Céline Lefèvre, Vous désirez ?
Ariane
Incroyable et génial la leçon de hip hop de Céline Lefèbre et Sylvain Groud. Si c’est possible d’imaginer le montrer à nos élève du collège de gonesse, je veux!!!!
Professeur séduite!