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Nicolas Le Riche – Carte blanche au Théâtre des Champs-Élysées

À peine parti de l’Opéra de Paris que Nicolas Le Riche est déjà de retour sur scène, pour une Carte blanche au Théâtre des Champs-Élysées. Quatre mois après son dernier Boléro, le public était nombreux pour le revoir en scène, on ne se sépare pas si facilement de l’un des plus grands danseurs de sa génération.

Nicolas Le Riche

Nicolas Le Riche

Cette soirée avait donc le goût des retrouvailles forcément joyeuses, de nostalgie aussi, et il faut bien le reconnaître également d’un peu d’inachevé. Cette soirée mettait en valeur avant tout deux formidables interprètes. Bien plus que sur le danseur, le programme reposait en effet sur le couple Nicolas Le Riche/Clairemarie Osta. Ces deux artistes ont encore tant de choses à dire et à faire ressentir, leur science de la danse est vibrante. Mais sur le fond, la soirée paraissait bancale et manquait de profondeur chorégraphique. Manque de chance aussi, la superbe pièce Critical Mass de Russell Maliphant avait dû être annulée, suite à la blessure du danseur-chorégraphe anglais.

Martine Bailly et Nicolas le Riche - A Suite of Dances de Jerome Robbins.

Martine Bailly et Nicolas le Riche – A Suite of Dances de Jerome Robbins.

Tout devait pourtant bien démarrer avec le subtil A Suite of Dances de Jerome Robbins. Quatre pièces de Bach au violoncelle, une danse ciselée en solo, où les pas folkloriques se transforment en virtuosité, où le geste est en constant déséquilibre. Les cheveux étaient un peu plus grisonnants. Mais l’intelligence du geste, cette formidable façon de sentir un mouvement et de le rendre si naturel, étaient toujours là chez Nicolas Le Riche. Danseur-né, toujours. Le charme s’est toutefois rompu avec de gros soucis du côté de la violoncelliste (pourtant brillante, un problème technique ?). A Suite of Dances est un dialogue constant entre la danse et la musique, quand l’une ou l’autre ne suit pas, la parole ne peut pas s’échanger. Après les couacs des vents pour son Boléro d’adieux, Nicolas Le Riche est-il victime d’un mauvais sort ?

La soirée continuait avec sa récente création, Une Après-Midi, qui revisite le mythique Après-midi d’un Faune. Ce n’est plus Pan sur scène, mais une Femme. Ou une lutine des bois. Ou un être étrange. Ou un ange tombé au XXI siècle… On ne sait pas très bien qui elle est, mais c’est justement cette ambivalence qui porte la pièce, entre rêve et réalité. Nicolas Le Riche n’est pas vraiment ce qu’on pourrait appeler un chorégraphe novateur. Mais il a le mérite de proposer de belles scénographies (ici, qui rappelle la Lune de son Caligula), de savoir occuper un espace et de bien se servir de ses interprètes. La certaine fascination que procure cette Après-Midi vient ainsi bien plus de l’interprétation de Clairemarie Osta que de la chorégraphie en elle-même. Danseuse petite, elle occupe toute la scène et semble avoir des bras immenses tant l’intention va loin, toujours sur le fil, perpétuellement surprenante. Dommage cependant que cette relecture ait gommé tout l’aspect sexuel du ballet, pour ne s’en tenir qu’à une étrange apparition (certes superbe).

Clairemarie Osta - Une Après-Midi de Nicolas Le Riche

Clairemarie Osta – Une Après-Midi de Nicolas Le Riche

Nicolas Le Riche a ensuite tenu à inviter Hervé Diasnas et sa troupe, pour la pièce Aires Migratoires. Soit une danse minimaliste, « inspirée des bancs de poissons ou des vols d’étourneaux« , sur une musique électro-acoustique, qui a fasciné le danseur. Pour moi, un résultat pas franchement passionnant et qui semblait un peu incongru (mais après tout, c’est SA Carte blanche, il a bien le droit d’inviter qui il veut). Le chef de la bande semble guider ses ouailles par une sorte de bâton de pluie électronique, dont les bruits dictent les mouvements des danseurs et danseuses. Mais qui a aussi la forme d’un sabre-laser (que la Force soit avec lui), cause de quelques fous-rires personnels étouffés (on a les références qu’on peut). La danse est plus une façon d’évoluer dans l’espace, guidée par une communication extrême entre les interprètes, chacun étant lié à tous les autres. Mais dont le sens perd un peu (beaucoup) le public en route.

La conclusion de la soirée se fait par Odyssée, duo de Nicolas Le Riche pour lui et Clairemarie Osta. Les impressions restent les mêmes que pour Une Après-Midi, une chorégraphie pas vraiment originale mais portée par deux interprètes exceptionnel-le-s, en osmose et qui se mettent réciproquement en valeur. Odyssée veut être l’allégorie de la quête d’un couple. De leur couple ? Cette Carte blanche dresse le portrait de deux formidables artistes,  qui ont encore tellement de choses à donner, mais qui semblent encore comme chercher leur voie en-dehors du Palais Garnier. Certains dirigent des compagnies, Sylvie Guillem est devenue la muse des grands chorégraphes d’aujourd’hui. Pour ce couple, tout reste encore à trouver.

Nicolas Le Riche et Clairemarie Osta - Odyssée de Nicolas Le Riche

Nicolas Le Riche et Clairemarie Osta – Odyssée de Nicolas Le Riche

 

Carte blanche à Nicolas Le Riche au Théâtre des Champs-Élysées. A Suite of Dances de Jerome Robbins, avec Nicolas Le Riche et Martine Bailly ; Une Après-Midi de Nicolas Le Riche, avec Clairemarie Osta ; Aires Migratoires de Hervé Diasnas, avec Angéline Soum, Lynda Rahal, Marinette Dozeville, Nancy Moreau, Valérie Lamielle, Damien Briançon et Fabrice Pardoux ; Odyssée de Nicolas Le Riche, avec Nicolas Le Riche et Clairemarie Osta. Mardi 4 octobre 2014. 

 

Comments (3)

  • Joelle

    Superbe revue d’une superbe soirée (malgré les petits couacs – violoncelle et invités minimalistes, même si pas dépourvus d’intérêt). NLR et CMO étaient formidables !

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  • Martine

    J’étais tellement contente de les revoir danser…mais surprise que le spectacle ait été aussi « grave ». J’ai entendu NLR dire que la pièce manquante de Russell Malliphant aurait donné une autre energie au spectacle. Le programme indiquait que les pieces interprétées étaient représentatives de l’humeur du moment! Je rejoins la conclusion de l’article et me demande si cette période de transition n’est pas un peu difficile. Mais le public était là, enthousiaste et chaleureux. J’espère retrouver rapidement ces deux magnifiques artistes dans un programme plus léger qui soit porteur d’une energie plus vibrante et aussi …un peu plus long

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  • BERTRAND

    La danse a, elle aussi une histoire tout comme les autres arts ! et heureusement elle ne se limite pas à celle du classique, et d’une certaine représentation judeo-chretienne de la beauté. La force de Nicolas le riche réside dans son ouverture, et je trouve sa démarche incroyable de ne pas se limiter aux enceintes fermées de l’institution.
    Votre critique sur le travail d’hervé Diasnas est d’un pathétisme latent, tant les réferences et l’imaginaire convoqué sont d’une pauvreté intense.

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