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Percutant Savion Glover

Lundi 2 juillet 2012. Solo iN TiME de Savion Glover au Théâtre de la Ville. Avec Savion Glover, Marshall Davis Jr., et les guitaristes Gabriel Hermida et Christopher Cintron.

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Avant de parler du spectacle Solo iN TiME de Savion Glover, il faut d’abord mettre au clair une définition, celle du mot Hooferz. Mouvance de la tap dance, elle s’applique aux claquettistes qui se considèrent avant tout comme des percussionnistes à part entière, et non comme des danseurs ou danseuses.

Savion Glover fait bien partie de ceux là. Ce qu’il fait avec ses pieds, c’est avant tout de la musique. Le geste, le corps, n’ont pas vraiment d’importance pour lui. Ce qui compte, c’est le son. Ses pieds sont ses baguettes, le sol est sa caisse claire. Le spectacle aurait ainsi mieux fait d’être rangé dans la catégorie « Concert » plutôt que Danse », tout est une question de définition.

Mais que l’on soit venu voir Solo iN TiME pour de mauvaises raisons (à savoir, voir de la danse), la vérité saute aux yeux dès les premières secondes. Savion Glover est un prodige de la tap dance. Le genre de personne qui semble être né avec ses chaussons à fer aux pieds, tant tout semble naturel et inné.

Le premier quart d’heure se passe a capella si l’on peut dire, la percussion comme seule musique. Mais comment Savion Glover arrive-t-il à faire autant de sons différents avec seulement deux pieds ? Mais comment Savion Glover arrive-t-il à faire autant de sons différents avec seulement deux pieds et aussi rapidement ? Voir comment peu de moyens peuvent produire autant de nuances, et en un mot autant de musique, est absolument fascinant. Regarder ses pieds bouger est hypnotique.

Après dix minutes, l’envie prend toutefois de quitter des yeux ces chaussures enflammées pour une vision d’ensemble du personnage. Et c’est là que l’on voit qu’il n’est pas un danseur dans ce spectacle. D’abord, Savion Glover, il danse en regardant ses pieds. Durant toute l’heure ½ de spectacle, il aura d’ailleurs très peu de contacts visuels avec le public. Ensuite, son haut du corps semble être étrangement déconnecté. Son dos ne bouge presque pas, ses bras sont légèrement écartés, pour assurer l’équilibre, et sa main gauche pendouille presque inerte. Il n’est pas là pour rendre le geste beau, mais pour faire de la musique.

La musique vient d’ailleurs un peu après, quand deux guitaristes de flamenco arrivent sur scène. C’est définitif, nous ne sommes pas à une performance, mais à un concert. Il s’agit d’un groupe de flamenco, deux guitares et un percussionniste. Sauf que le  percussionniste joue avec ses pieds. Savion Glover ne fait que regarder les deux guitaristes, attentifs aux nuances, chacun en osmose avec l’autre. C’est assez simple, Ils se regardent, ils sont un groupe, ils font de la musique ensemble.

Ceci-dit, c’est très beau. Le but de Solo iN TiME est de mélanger la tap dance au flamenco, et il faut bien dire que c’est très réussi. Les taps de Savion Glover se mélangent aux sons de l’Espagne, à cette voix profonde qui vient de l’âme. La rythmique de cette musique est complexe, et rendue d’autant plus éblouissante par toutes les subtiles nuances qu’arrive à produire notre homme-orchestre. Et quand l’un des guitaristes lâche son instrument pour taper des mains, quand ses deux formes de percussions se joignent sur fond de chant, on n’est pas loin du sublime.

Mais malgré tout, pour l’amatrice de danse que je suis, il manque quelque chose. Il manque la danse, les gestes, ces envolées. Il manque autre chose que des pieds. Alors malgré la beauté de la musique, cela semble parfois un peu long. Ou frustrant. Parce qu’il y a quand même chez Savion Glover quelque chose de génial dans la façon de se servir de son corps pour faire du Beau, et que l’on se prend à rêver de ce que ça pourrait donner dans un vrai spectacle de danse.

La deuxième partie en apporte toutefois un peu plus. Un deuxième danseur de claquettes arrive sur scène, plus danseur, avec un certain déhanché du haut du corps. Le flamenco laisse place à une inspiration plus hip hop, entre vrai-faux duo (un régal) et une battle endiablée. Mais c’est finalement sur la fin que ce sera le plus dansé. Les guitaristes son revenus, et Savion Glover entame un dernier frénétique solo. Il est tellement épuisé qu’il semble rentrer dans une espèce de transe. Noyé dans sa rythmique et sa musique, en symbiose absolue avec les guitares, il s’envole, balançant des bras et de la tête, un immense sourire sur le visage. On en prend plein les oreilles, et enfin plein les yeux.

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Commentaires (1)

  • louison

    Les gens qui n’ont pas l’oreille musicale n’auront pas saisi le travail de Savion, s’attendant sûrement à un spectacle de claquettes traditionnel. Seulement voilà à mon sens il faut se renseigner avant d’aller voir un spectacle. Des gens ont quitté la salle après le premier quart d’heure, puis après l’heure, ils ont manqué le fils de Sammy Davis (le célèbre et très grand claquettiste). Son fils était tout aussi talentueux. J’ai été bouleversée par son travail et son corps est aussi en effet taillé pour danser. U travail trop subtil n’est pas à la portée de tous.

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