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Singin’ in the Rain au Théâtre du Châtelet

« Formidable« . C’est toujours le même terme qui revient en sortant d’une comédie musicale produite par le Théâtre du Châtelet. Peut-être lassant à lire, mais que voulez-vous : les musicals made in Châtelet sont un régal pour les yeux et les oreilles. Singin’ in the Rain, présenté depuis le 12 mars et jusqu’au 26, n’échappe pas à la règle. Mise en scène efficace, troupe extraordinaire rodée au West End, exigence artistique comme on n’en voit qu’à Broadway (et même mieux puisqu’il y a ici un orchestre d’une cinquantaine de musicien-ne-s, ce qui ne se fait presque plus à New York), cette comédie musicale se savoure et enthousiasme, sans temps mort. Deux heures de plaisir de spectacle, ni plus ni moins.

Singin' in the Rain

Singin’ in the Rain

Le film Singin’ in the Rain racontait le passage du cinéma muet au parlant. Petit rappel des faits. Don Lockwood et Lina Lamont forment à l’écran l’un des couples stars du cinéma muet (même dans la vie ils peuvent difficilement se supporter). Quand arrive le parlant, il faut bien se plier à la nouvelle mode et se mettre à parler. Sauf que Lina a une véritable voix de crécelle. Le producteur décide donc de la doubler (sans qu’elle ne le sache), par la jeune et jolie Kathy Selden, dont Don Lockwood est tombé amoureux.

Comme le film, la comédie musicale rend hommage au cinéma, avec une mise en scène mêlant habilement scènes de théâtre et séquences filmées (tournées au Château de Versailles). Le théâtre à l’italienne se transforme ainsi parfois en salle de cinéma ou en décors du 7e art. Les costumes sont en noir et blanc, délicieusement 20′, et les chorégraphies ponctuées de numéros de claquettes dans la pure tradition du genre. Quant au scénario, il suit le film quasiment pas à pas, avec même quelques scènes parfois copiées-collées (notamment les essais de micro tordants de Lina).

Singin' in the Rain

Singin’ in the Rain

Mais la troupe d’acteurs et d’actrices, tous et toutes excellent-e-s-, arrivent à ne pas faire tomber ce musical dans une pure séance de nostalgie. Clare Halse joue la parfaite jeune première quand Emma Kate Nelson bluffe par son numéro d’actrice à la fausse voix pincée. Daniel Crossley apporte un grain de folie avec le personnage de Cosmo Brown. Quant à Dan Burton, il produit l’exploit de faire oublier Gene Kelly. Même dans la fameuse scène sous la pluie. Tout est là, les torrents d’eau, les claquettes, le policier, l’humour et la joie de danser. La personnalité de Dan Burton en plus, qui s’amuse comme un fou et colle un sourire à n’importe quel public renfrogné.

L’excellence de la troupe et l’ingéniosité de la mise en scène emporte donc le tout, et font même oublier pourtant deux points importants du spectacle : la certaine banalité de la partition et des chorégraphiesSingin’ in the RainGood MorningWould You ?… Tout se fredonne avec un évident plaisir, mais le tout n’arrive pas à la richesse des musiques de Stephen Sondheim ou Richard Rodgers. Les chorégraphies sont efficaces et plaisantes, bien exécutées, mais ne crèvent pas non plus la scène d’originalité (le souvenir de la modernité des danses de Christopher Wheeldon pour Un Américain à Paris il y a quelques mois n’en est que plus vivace). Tout est fait pour plaire au public, mais parfois de façon un peu trop évidente.

Singin' in the Rain

Singin’ in the Rain

 

Malgré ses défauts, il faut s’incliner devant le sens du spectacle de Robert Carsen. Les plus de deux heures de spectacles de Singin’ in the Rain s’écoulent non seulement sans temps mort, mais avec un plaisir qui ne faiblit pas. Le tout se termine en couleur, ciré jaune et parapluie, pour une dernière danse savoureuse et pétillante. Deux adjectifs résumant parfaitement le show.

 

Singin’ in the Rain de Betty Comden et Adolph Green (scénario), Nacio Herb Brown et Arthur Freed (chansons) et Robert Carsen (mise en scène), au Théâtre du Châtelet. Avec Dan Burton (Don Lockwood), Daniel Crossley (Cosmo Brown),  Clare Halse (Kathy Selden), Emma Kate Nelson (Lina Lamont), Robert Dauney (R.F. Simpson), Jennie Dale (Dora), Matthew Gonder (Roscoe Dexter), Matthew McKenna (Rod & Tenor) et Karen Aspinall (Zelda). Mardi 10 mars 2015 (répétition générale).

 

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