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[Cinéma] Black Swan de Darren Aronofsky

J’avoue, malgré les avis très positifs de balletomanes lus ici, ou , j’étais assez septique à l’idée d’aller voir Black Swan, de Darren Aronofsky.Trop de clichés, trop de sangs, trop de mutilations, trop de tout.

Je suis ressortie de l’avant-première mardi soir totalement bluffée, et assez bousculée. Si le film ne ma pas tenue en haleine vraiment tout du long (il y avait quelques longueurs au début), il est néanmoins difficile de ne pas en ressortir soufflé-e, notamment face aux 30 dernières minutes, véritablement du grand art cinématographique.

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Black Swan est d’abord un thriller psychologique. C’est l’histoire d’une jeune femme, Nina, sage, qui glisse petit à petit dans la schizophrénie. Danseuse d’une grande compagnie de ballet, elle se voit enfin confier un grand rôle, celui du double personnage Odette/Odile du Lac des Cygnes. La première ne lui pose aucun problème, la deuxième beaucoup plus. Mais elle a en elle cette quête de la perfection, qui la pousse à interpréter au mieux son personnage. Quitte à, tout comme elle, se dédoubler.

Où est la réalité ? Où sont les délires de Nina ? Où est la frontière entre les deux ? Le-la spectateur-rice se pose constamment la question. Le mal-être et le suspens, eux, sont bien là. Darren Aronofsky nous embarque dans son histoire de bout en bout, nous fait vivre un grand huit émotionnel, et nous lâche au bout d’1h40, un peu sonné.

C’est parfois très violent, j’ai du mal à voir une goutte de sang au cinéma, je me suis donc cachée les yeux un certain nombre de fois (et ma voisine a fait un malaise) (le public du 92 est faible). Mais ce n’est jamais gratuit. Cette violence physique (et psychologique) est bien là pour servir le film, servir cette ambiance noire, et jamais pour l’unique plaisir de déranger le public.

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D’un point de vue septième art, Black Swan est donc indéniablement une réussite. A vrai dire, j’avais assez peu de doutes sur le sujet, au vu du réalisateur et des nombreuses critiques positives. Ce qui m’inquiétait, c’était plutôt la façon dont était traité la danse. Et là encore, j’ai été bluffée.

Nina est, a priori, une accumulation de clichés : elle est anorexique, perfectionniste au point d’oublier de vivre, vit chez sa mère surprotectrice qui projettes sur sa fille ses rêves de gloire, et dort au milieux de peluches. Sauf que ce n’est pas la danse qui fait de Nina ce qu’elle est. Mais c’est son histoire, son passé, ses parents et sa psychologie propre qui la rend comme cela. Nina aurait être actrice, comptable, n’importe quoi plutôt que danseuse, elle aurait cette même folie en elle. Les autres ballerines sont d’ailleurs parfaitement normales.

La vie de la compagnie est également bien décrite, sans sombrer dans la caricature totale. Le directeur artistique de la troupe, Thomas Leroy (magistralement interprété par Vincent Cassel), est dur, très dur. Mais, si l’on occulte son aspect prédateur sexuel, il doit y avoir pire que lui. Niveau crédibilité, mon œil d’habituée voit bien que Natalie Portman n’est pas une danseuse, qu’elle n’en a pas les bras. Mais elle est tellement dans son rôle que j’adhère totalement à l’histoire qu’elle me raconte, et que son manque de crédibilité physique passe finalement au second plan. Le mélange avec sa doublure est très bien fait, et le cinéaste se joue complètement de cette difficulté, sans que cela ne choque le public.

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Le cinéaste avait songé à transposer cette histoire dans une compagnie de théâtre. Cela aurait aussi pu fonctionner. Mais en le mettant dans le monde du ballet, il rajoute quelque que seule la danse a : l’engagement physique total, la dureté sur son corps, et en même temps la maîtrise quasi parfaite qu’un-e danseur-se peut en avoir. Black Swan est physique, parce que la danse est physique.

En fait, plus qu’un film sur la danse, j’ai eu l’impression que Black Swan était un film sur Le Lac des Cygnes. Une sorte d’hommage à ce ballet, voir même une relecture. Odette/Odile est omniprésente dans le scénario, et l’évolution de ce personnage se fait en même temps que l’évolution de Nina. Le ballet y est analysé, décrypté, et apparait comme une œuvre formidable de modernité (ce qu’elle est d’ailleurs). La musique de Tchaïkovski est présente quasiment à chaque scène, et porte véritablement l’émotion tout au long du film. Encore plus lors de la dernière partie, la représentation, où Nina fait enfin totalement corps avec Odette/Odile, jusqu’au bout.

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Il y a peu de chance que Black Swan crée des vocations de danseuse. Mais des envie d’aller découvrir en vrai Le Lac des Cygnes, sûrement beaucoup plus.

© Photos : Twentieth Century Fox France

Commentaires (22)

  • Les bras de poupée Barbie sur les photos font un peu peur mais il faudra vraiment que j’aille le voir. Et oui, dans une interview le réalisateur disait avoir voulu faire une transposition – hommage au Lac des cygnes. Comme quoi, quand c’est fini, on en parle encore (et bientôt à Londres, on pourra lire ce qu’en pense Pink Lady).

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  • Contente que ça t’ai plu!

    Franchement je ne comprends pas les critiques que certains balletomanes (qui je suis sure n’ont pas tous vu le film) ou personnes du monde de la danse. Comme tu le dis, ce n’est pas les danseuses qui ont des travers, c’est Nina. C’est elle qui regroupe tous les clichés dont s’offusquent les gens. Lily est très cool, les autres ballerines sont tout ce qu’il y a de plus normal…

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  • @Mimy : Surtout que ses bras, c’est un peu tout ce qu’on voit de la Natalie Portman danseuse (les plans filment soir le haut du corps, soit le bas, et là, c’est une doublure). Mais ce n’est pas franchement gênant.

    @Cams : La critique de John Neumeier, particulièrement véhémente, est pas mal dans ce style 😉

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  • Swan Londno

    J’ai beaucoup d’envies de voir ce film
    je pense qu’il est très positif qui se produisent des films sur le ballet classique
    il fait au grand public une curiosité pour découvrir le vrai Swan Lake dans un théâtre.
    En effet, il est possible que ce type de film ne contribue guère à susciter des vocations chez les jeunes , comme il le ferait au moment où le grand film de l’année 2000, CENTER STAGE, où on pouvait voir rien de moins que la danseuse étoile du ABT Julie Kent et le grand Ethan Stiefel avec une vraie danseuse qui dansait également très bien, Amanda Schull; qui au moment du tournage du film était une danseuse au Ballet de San Francisco,et à qui j’ai eu le plaisir de voir danser en Europe en Septembre 2001, Le Lac des cygnes avec Lucia Lacarra comme Odette/Odile et Amanda Schull comme danseuse du corps de ballet.Amanda Schull a démontré dans ce film, qui est tout à fait compatible d’être une vraie danseuse et aussi une bonne actrice.

    Je suis sûr que Natalie Portman fait un bon travail, mais je pense que le réalisateur ait choisi une vraie danseuse, le film aurait été plus crédible avec une vrai danseuse. Quoi qu’il en soit, je pense toujours que c’est de bonnes nouvelles à faire des films sur ballet.

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  • Helen

    Elle a quand même fait 10 ans de danse classique la petite Nathalie…
    En tout cas, vivement la séance de cinéma tout à l’heure! 🙂

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  • Helen

    Me revoilà après visionnage: J’avoue, c’est sans doute après avoir lu ton résumé, mais j’ai focalisé sur les bras de Nathalie Portman au début… Et après j’ai tellement été emmenée par l’histoire que je n’y ai plus pensé.
    Il n’y a pas que le public du 92 qui est faible, moi aussi j’ai souvent mis la main devant mes yeux… certaines fois plus par appréhension de ce qui allait suivre d’ailleurs.
    Je suis encore toute tourneboulée par ce film, que je n’arrive pas vraiment à en parler… Et que dire sur la musique? Tout simplement magnifique (mais ça c’est pas nouveau). En bref, une bande-annonce très trompeuse, un film assez dur, mais qui vaut le détour.

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  • @Swan London : en même temps, le rôle de Natalie Portman est très particulier, très intense, avec beaucoup de scène très dures. Il faut une vraie expérience d’actrice pour le tenir. Il faudra venir nous donner tes impression quand tu auras vu le film 😉

    @Helen : Bon, tu me rassures sur ma faiblesse 😉 Oui, on en ressort assez secoué… Au passage, si tu passe sur Paris, faudra qu’on se prenne un cours de danse un de ces 4 ! 

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  • Swan London

    Effectivement, aussitôt que j’aie vu le film je le commenterai; et oui, tu as raison, ce type de film est totalement différent de « Center Stage »; comme tu bien dis,il faut une vraie expérience d’actrice pour ce rôle très particulier, très intense et avec beaucoup de scènes très dures.
    Et par les critiques que j’ai lues et de plus, par le prix qu’elle a récemment reçu,il semble que Natalie Portman réussit à la perfection à réaliser ce difficile rôle.

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  • C’est étrange, moi je l’ai trouvée très bien physiquement Natalie en tant que danseuse. Au début je me suis dit peut-être que c’est parce que j’aime Natalie comme actrice… J’avais l’impression d’être seule dans mon coin à penser ça.
    Puis j’en ai discuté avec mes collègues profs (dont une qui était première danseuse aux ballets de Joanesbourg et qui a dansé plusieurs fois le lac) et on s’est trouvées toutes du même avis, même celles qui n’ont pas aimé le film.
    Du coup je me dis qu’ont doit avoir un regard différent quand on est prof, je ne sais pas…
    En tout cas c’est intéressant de lire les différents avis ici et là.
    (faudrait que je me bouge pour publier le mien…)

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  • Bernard

    Je l’ai vu mais je n’ai pas vraiment aimé , j’ai trouvé ça un peu « too much » d’ailleurs certaines personnes étaient aussi interloquées dans la salle … bon c’est pas un « film d’horreur » mais franchement c’est une certaine vision des chose filmé un peu à la Lelouch ; bien sur , c’est bien joué surtout l’actrice principale …
    Mais je regrette mais 8.5 euros …

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  • @Swan London : Natalie Portman est véritablement bluffante…

    @Julie : Je me demande si notre regard différent ne vient pas de ce que nous voyons d’habitude. Par la force des choses, je vois surtout la danse (et encore plus les ballets classiques) avec le Ballet de l’Opéra de paris, qui a des critères physiques très particuliers, et poussés parfois à l’extrême. J’ai donc, malgré moi, l’habitude d’un certain esthétisme, qui n ‘est pas le même que les compagnies que tu vois.

    @Bernard : Oui, c’est violent comme film, et très particulier. Je comprends qu’on n’accroche pas du tout. S’il n’y avait pas eu le prétexte de la danse, je ne crois pas que j’aurais été le voir.

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  • ladyyummy

    Grande fan de natalie portman depuis ses debuts et étant danseuse pro moi meme, je tenais à vous dire qu’il n’y a eu aucune doublure pour natalie portman quelque soit la scene. Elle a été danseuse pendant 10ans et a repris un rythme de travail d’acharné pour danser au ballet. d’ailleurs Benjamin Millepied, son « coach » pendant l’année de préparation est aujourd’hui son fiancé et futur papa de l’enfant qu’elle porte.
    Donc pour toutes les petites jalouses AUCUNE DOUBLURE POUR MISS PORTMAN DANS CE FILM… suffit de bcp de volonté et j’avoue, un certain « cachet » ($$$$$$) pour se motiver à avoir le niveau voulu 😉

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  • @ladyyummy j’ai lu le dossier de presse et il me semble (à revérifier) que les jambes sont doublées. Ce n’est pas toujours elle dans les passages sur pointes. Cela n’enlève rien à sa volonté et l’entrainement intensif qu’elle a suivi.

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  • C’est Sarah Lane qui double Natalie Portman, surtout pour le bas de jambe. D’où la façon de filmer, soit le haut du corps, soit les pieds, soit de loin et flou. ça ne m’a pas gêné, mais c’est quelque chose que ressortent ceux et celles qui n’ont pas aimé le film.

    Mais comme dit le Petit rat, ce n’est pas parce que Natalie Portman a eu une doublure pour certaines scène que ça amoindrit l’énorme entraînement qu’elle s’est imposé pour être crédible.

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  • Swan London

    Effectivement, c’était Sarah lane celle qui a doublé à Natalie dans les moments les plus compliqués, par exemple, les fouéttes ils sont de Sarah Lane.´
    Darren Aronofsky a choisi une autre danseuse, Kimberly Prosa, pour réaliser d’autres prises , puisqu’il lui a dit qu’elle ressemble beaucoup à Natalie.
    Sarah lane a seulement été deux semaines en réalisant les prises, le reste de prises dans lesquelles on avait besoin d’une doublure, ils ont utilisé Kimberly Prosa.

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  • @Swan London : Merci pour ces précisions 🙂

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  • powortki

    Natalie Portman est une superbe actrice alors pourquoi clamer dans toutes ses interviews que c’est elle qui danse ( à part les bras et le buste) elle est doublée par Sarah Lane qu’elle ne mentionne jamais(voir interviews youtube), Grâce à Look Effect’s CGI head replacement (remplacement de tête), la tête de Natalie Portman est posée sur le corps de Sarah Lane lors des fouettès et des piqués!! Etant moi même danseuse professionnelle et coach d’acteurs, il ne faut pas 8h d’entrainement par jour durant 1 an pour faire une variation de bras et de buste, surtout si comme elle le prétend elle a dansé jusqu’à 12 ans, quelques semaines suffisent!!! toute cette mystification est faite bien sûr pour les Oscars!!

    Comment peut on croire un seul instant que Natalie Portman n’était pas doublée.
    Savez vous le nombre d’années qu’il faut à raison de plusieurs heures par jour pour avoir le niveau d’une première danseuse, comme la doublure de Natalie Portman (pas un an évidemment)
    Pourquoi ne pas inviter Natalie Portman en direct tv après son accouchement et lui demander de nous refaire ses fouettés et piqués sur pointes, croyez moi une telle technique ne se perd jamais!!!

    Cela rappelle la supercherie du film Flashdance avec jennifer Beals prétendant danser alors qu’il s’agissait en réalité de Marine Jahan tenue au secret par son contrat…

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  • Bernard

    Ah ! Sacrilège Amélie 😉

    Et moi qui croyait que c’était Jennifer Beals qui dansait dans flashdance 😥
    Bon ben on en apprend tous les jours …

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  • @Bernard:ça y est, le mythe est brisé 😉

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  • ZOUBAZ

    👿 Désolé j ai trouvé ce film hyper mal réalisé , mal filmé sans aucune finesse .Tout est lourd, grossier Les ficelles sont enormes. La moitié du film repose sur les boutons à l ‘epaule de Portman et ses doigts qui saignent ou pas . Je suis très deçu. Le sujet était magnifique , le résultat est bien raté.

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  • @ZOUBAZ:Mais pas besoin d’être « désolé », tous les avis sont les bienvenus, même s’ils vont à l’encontre de la majorité. 😉

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  • J’ai « vu » ce film, enfin ! je précise que j’étais accompagnée d’un ami qui m’a fait l’audio description des images… Je ne vous dit pas le problème : vision ou pas ? réalité ou non… Mais la musique, les bruitage, ça aide ! un film super bien fait… Et dont les 3/4 des critiques, même ceux qui ont été positifs n’ont pas compris ou signalé l’essentiel !
    Mais quoi ! c’est évident depuis le début et la scène du rêve qui se transforme en cauchemar : c’est l’histoire de l’enfance, de la pureté surprotégée -en plus et qui crée la folie- qui est mise en valeur ! Une seule chose : le sang… C’est tout simplement le symbole menstruel ! et ça se lit parfaitement à la fin ! il y a plus que le double/Folie… Que le noir/Blanc… Il y a l’histoire de toute femme en âge de devenir mère la dedans…
    J’ai un compte rendu à faire… Je ne sais par où commencer tant ily en a à dire… Mais pour ces idiots qui ont – dans la presse – décrié cette « fausse vision de la danse (qui ne l’est pas tout à fait) vous n’avez dnc pas compris que si Nina est filmée si souvent de dos, c’est parce que c’est son regard à elle qui est mis en valeur !
    Je sais, je vais très loin, trop loin dans mes analyses… Et encore, je ne parle pas du traitement de la musique…
    Désolée pour le désordre… Il faudra vraiment que je construise quelque chose de sensé sur le forum…
    Si quelqu’un sait où lire le scripte …

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