Rencontre avec Dada Masilo pour The Sacrifice
Depuis l’annulation brutale de sa venue au Festival d’Avignon en juillet 2021, en raison de la pandémie, on attendait avec impatience le retour en France de Dada Masilo. La voici avec The Sacrifice, sa dernière création inspirée du Sacre du Printemps. Avec cette version du chef-d’œuvre de Stravinsky, la chorégraphe sud-africaine, qui nous a charmé.e.s et bousculé.e.s avec ses relectures des grands classiques comme Le Lac des Cygnes ou Giselle, revient à ses origines africaines et puise dans la gestuelle élégante et précise de la danse tswana. Il y a quelques semaines, nous avons pris de ses nouvelles par mail avant ses premières dates françaises.
Comment se sont passées ces deux dernières années de pandémie ?
Tout s’est bien passé même si de toute évidence, le Covid 19 a gâché beaucoup de choses pour chacun d’entre nous. C’est très triste de voir les gens vivre dans la peur et dans l’incertitude permanente de ce qui va se passer. Être sur scène et partager mon travail avec les différents publics du monde entier m’ont beaucoup manqué.
Comment avez-vous vécu l’annulation de votre venue au Festival d’Avignon en 2021 ?
C’était évidemment très décevant, mais en fin de compte, la sécurité passe avant tout et nous ne souhaitions faire courir aucun risque aux danseurs et danseuses de la compagnie.
Qu’est-ce qui vous a donné envie de vous plonger dans Le Sacre du Printemps ?
J’adore travailler avec des histoires et je suis restée un peu sur ma faim avec Le Sacre du printemps. Dans The Sacrifice, j’ai donc voulu explorer ce que pourrait être l’histoire plutôt qu’une grande danse et une jeune fille qui danse jusqu’à la mort. Je voulais créer une œuvre où l’on ne regarde pas seulement la mort comme quelque chose de triste et de morbide, mais aussi en révéler la beauté. Je voulais que ce soit une œuvre qui nous mette au défi de nous engager profondément avec nos émotions, avec honnêteté et fragilité.
Comment avez-vous abordé la complexité de la musique de Stravinsky ?
C’était un véritable défi et parfois, lorsque j’improvisais sur la partition, je riais toute seule parce que je n’arrivais pas à croire que quelqu’un ait pu écrire une telle musique. C’est vraiment génial. Finalement, j’ai choisi de ne pas utiliser la partition de Stravinsky, mais de travailler avec quatre musiciens sud-africains : voix, violon, percussions et clavier. La musique est inspirée de Stravinsky mais elle est très enracinée en Afrique du Sud.
Pourquoi avez-vous choisi de fusionner la danse contemporaine et la danse rituelle du Botswana ?
La danse contemporaine est mon socle, elle est au centre de mon travail. La danse tswana est une danse de rythme, c’est pourquoi j’ai voulu fusionner les deux. Je voulais aussi explorer les idées de culture et de rituel et voir comment elles ont évolué au XXIe siècle.
Qu’avez-vous voulu exprimer en abordant le thème du sacrifice ?
Il faut bien reconnaître que nous faisons tous des sacrifices d’une manière ou d’une autre. Nous faisons des sacrifices pour nos proches, nos familles et nos amis. Certains sont difficiles à accepter. La vie est un grand sacrifice.
Cette notion de sacrifice a-t-elle une résonance particulière pour vous ?
Je ne dirais pas cela, mais les sacrifices que j’ai faits m’ont donné la liberté d’entreprendre ce que j’aime. C’était probablement difficile pour les autres de le comprendre, mais je suis heureuse de l’avoir fait. Je n’ai pas de regrets.
Comment avez-vous choisi les interprètes de cette pièce ?
Nous auditionnons les danseurs et danseuses. J’adore travailler avec des artistes passionné.e.s et qui ont une grande présence scénique. Ils doivent aussi avoir une technique incroyable, même si la technique n’est pas tout. Ceux-ci sont géniaux ! Amusants, fous et extrêmement travailleurs et comme moi, ils adorent être sur scène.
Quel est votre quotidien en tant que danseuse ? Vos conditions de travail ?
Nous travaillons de 10h00 à 15h00. Nous commençons par un cours d’une heure et 15 minutes, suivi d’une pause de 15 minutes, puis nous répétons de 11h30 à 15h00. Nous avons la chance de travailler dans un studio beau et spacieux. Il est beau et grand et nous pouvons vraiment bouger.
Quelle est la nature du lien qui vous unit à la France ?
La compagnie tourne dans toute la France depuis 2012. Nous avons interprété ma version du Lac des cygnes, Carmen, Giselle, mon solo The Bitter End of Rosemary et maintenant The Sacrifice. Je suppose que c’est presque devenu comme notre deuxième maison !
The Sacrifice à voir du 18 au 25 au Festival d’Avignon.